Chapitre 5 ❝Let me drown in the ocean of your eyes❞

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⫯ ❝Laisse moi me noyer dans l'océan de tes yeux❞

J'avais toujours été comme ça. Les gens de mon entourage qui savent ce que je vis à longueur de journée me disent tout le temps que ça ne paraît pas que je souffre.

Pour eux, un garçon orphelin qui se fait battre, insulté, rabaissé, traité comme un animal doit avoir l'air du parfait petit modèle de dépression. 

Ben, non, je ne suis pas en dépression et jamais une seule petite pensée du genre "je serre à rieeeeen, personne ne m'aime, je veux mouriiir" m'a traversé l'esprit un jour. Enfin si, des fois. Quand je me dis que je suis nul en ayant un zéro en français. Et aussi que le monde est contre moi, comme quand je m'endors en cours la minute même où le professeur dit qu'on aura un examen mais que je ne l'ai pas écouté. 

Je suis un gars normal, qui déteste sa vie, mais qui n'est pas en dépression.

J'ai juste une confiance en soi et aux autres qui a touché le noyau de la Terre, mais non, je suis en parfaite santé mentale.

Des fois je pleure, de ce qu'on me fait, mais c'est plus par douleur physique que mentale ou psychologique.

Au début, j'avais vraiment des idées suicidaires, quand la blessure qu'avait laissé ma mère en succombant de sa maladie était encore béante, quand mon père m'a abandonné et quand j'avais reçu mon tout premier coup.

Je cherche à attirer l'attention, pour qu'on me remarque.

J'insulte, pour qu'on dresse une barrière entre moi et les autres.

Je frappe, pour savoir ce que ça fait d'être pour une fois celui qui à la main sur la détente et non pas la face devant le canon.

Quand j'avais dis ça à Gabi, c'était pas pour rire - oui, des fois mon côté comique pointe le bout de son nez mais pas forcément pour faire rire - juste pour donner le fond de mes pensées.

Mais certainement que lui n'a pas apprécié mon commentaire vu la gifle qu'il m'a donné...

J'en avais rien à faire, j'en reçois des gifles, au moins trois par jour.

Mais, étrangement, j'avais eu un pincement au cœur au geste qu'il m'avait donné. Par contre j'en avais tout de même rien à faire.

J'avais réfléchi à ma journée toute la nuit, regardant le mur fissuré du placard où je dormais.

Il devait presque toucher le sol, le plafond...

Je me retournai sur mon vieux drap qui me servait de lit et regarda le sol froid en béton.

Peut être que je devrais changer... peut-être que je devrais commencer à plus faire confiance aux autres.

J'apprécie la compagnie d'Arion, de JP, Skie et les autres, même celle d'Adé. Il est amusant, bête, mais amusant.

Mes pensées se perdirent sur Gabi.

Pourquoi il hante toujours mes pensées ?! Je veux arrêter de penser à lui !

Je ferma les yeux, mais cet azur continuait à venir et revenir, sans arrêt. Et je me sentais bien. J'avais l'impression que ce regard m'entourait, me rapprochait du bonheur, éclairait le bout du tunnel où j'étais perdu.

J'aimerais tellement me noyer dans l'océan de ses yeux. Me laissé emporter par le courant, sans jamais remonter à la surface. Vivre dans cet azur.

Alors, j'imagine. J'imagine être dans cet océan d'eau glacée mais douce.

Et je m'endormis sur cette pensée.

-Aitooor !

Cette-fois, j'avais souris. Un vrai sourire.

-Salut Adé.

Il me rejoint en courant, souriant de toutes ses dents.

-T'as passé une bonne soirée ? Il me demanda.

-Ça passe. Et toi ? t'as pêché j'imagine ?

-Oui !

-Tu pêches tout le temps seul ?

Il regarda le sol, et je me surpris à lire de la tristesse dans ses yeux.

J'ai dis quelque chose de mal ?

-Et bien... avant je pêchais avec Eugene, mais on se parle plus depuis un bout, et personne veut m'accompagner pour pêcher ou rester avec moi...

-J'aimerais bien pêcher avec toi, moi.

La phrase était sortie toute seule. J'avais même pas eu le temps de peser mes mots.

Mais seulement à voir le gigantesque sourire sur le visage d'Adé, j'avais même pas pensé à me rattraper et dire d'oublier ce que je venais de dire.

C'était quoi cette sensation ? j'avais l'impression d'être léger, de pouvoir voler. D'avoir une personne qui soigne mes ailes mutilées pour m'aider à les battre et m'élever jusqu'aux étoiles.

-Alors on pourra trouver un moment pour pêcher ensemble ? Adé me demanda.

-Avec joie.

J'avais envie de chanter, d'hurler, de danser tant je me sentais léger. Elle était belle cette sensation.

Adé et moi continuons notre route jusqu'à l'école.

Les cours avaient commencé depuis un bout. J'avais regardé tout le long par la fenêtre de la classe.

Au bout d'un moment, la porte de la classe s'ouvrit et la professeur de français arrêta son cours, se retournant vers le directeur qui venait d'entrer en compagnie d'un garçon dans l'uniforme du collège.

Ses cheveux en bataille mauve, hérissés et arrondis et ses grands yeux noirs lui donnaient un petit air innocent.

Il jouait nerveusement avec ses mains en regardant le sol, comme moi avant-hier.

Faut dire qu'arriver dans une nouvelle école au milieu de l'année, devant plein d'inconnus qui te dévisagent, n'est jamais facile.

Sous la demande du prof après que le directeur sois partit, il se présenta :

-Je m'appelle Lucien... je viens d'emménager dans cette ville...

Étrange, il n'avait pas donné son nom de famille. Tout le monde l'aurait fait, mais bon...

Il marcha entre une rangée de pupitres avant de s'asseoir à la place en face de la mienne.

Il se tourna vers moi et sourit timidement.

-Tu t'appelles comment ? Il me demanda à voix basse.

-Aitor.

Son sourire s'était agrandi avant qu'il ne se retourne vers l'avant de la classe.

Je continue mon observation à travers la fenêtre. 

Mon ange GabrielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant