Chapitre 15 ❝When the pain pours out❞

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⫯ ❝Quand la douleur ce déverse❞

Les Olsen sont partis ce matin en vacances à l'étranger. Ça faisait complètement mon affaire, j'aurais une pause et le droit de faire tout ce que je veux, mais le seul hic est que je dois travailler (ou quêter bien sur) pour avoir de quoi m'acheter un dîner.

La journée est passée rapidement et maintenant, me dirigeant d'un pas nonchalant vers le bloc sportif pour l'entraînement, je soupire.

J'allais encore devoir me confronter à M. Caniche (et au regard de Gabi).

Dans les vestiaires, je sortis mon maillot d'équipe et jette un petit regard autour de moi. Personne. Pas que j'étais pudique pour ne pas m'autoriser à me déshabiller devant les autres, juste pour pas qu'ils voient les bleus partout sur mon corps.

Je me change rapidement avant l'arrivée des autres et part en direction du terrain.

-Aitor !

Je me retourne vers Arion qui me souriait de toutes ses dents, JP à ses côtés.

Ils me suivirent jusqu'au terrain où certains des autres joueurs nous attendaient.

Je jette un petit coup d'œil à Riccardo qui parlait à Gabi quelques mètres plus loin.

Quelque chose se gonfle dans ma poitrine, et une douleur se fait ressentir alors que je serrais les poings. Je ne supportais absolument pas de les voir ensemble et je ne savais pas pourquoi.

Les derniers joueurs restant arrivent sur le terrain à la hâte.

Riccardo se tourne finalement vers nous.

-Bon, pour l'échauffement, les coachs Sharp et Evans ne seront pas là, ni Mlle. Hills, donc je vous dirais quoi faire.

Je roule des yeux et il semble le remarquer.

-T'as un problème, Aitor ?

-Ouais, tu vois, j'suis pas trop du genre à écouter les bourges papoter, donc tant que le coach Evans ne sera pas là, je ne suivrais aucun de tes ordres.

Tout le monde se tut. Un rire se fit entendre.

On se retourne tous vers Victor qui riait, les bras enroulaient autour de son ventre.

-Ce que j'ai voulu te dire ça Riccardo mais j'en ai jamais eu les couilles !

Le concerné le regarde, les yeux ronds.

Personne n'aime les petits bourges prétentieux dont ton genre. (Bon, ouais Rosie est un cas à part.)

Finalement il se tourne vers moi.

-C'est moi que tu traites de bourges ?

-Non, le ballon de foot derrière toi.

-Laisse moi te dire un truc, t'es juste tellement mal placé pour dire à une personne qu'elle est bourge vu le palace où tu vis.

J'haussa un sourcil.

-Le palace où je vis ? Tu sais, une personne peut très bien avoir un désert entier de livres, mais à quoi ça sert s'il ne sait pas lire ? C'est la même chose. Ouais je vis dans un palace, selon vous tous, mais pensez-vous que vivre quelque part veut forcément signifier y vivre ?

Tout le monde me regardait, l'air de ne pas comprendre ce que je disais.

-Ce que je veux dire, c'est que tout le monde à beau me voir franchir le seuil de cette beeeelle et grande maison qui coûte un bon milliard de dollars mais après que j'ai passé la porte, vous pensez qu'un serviteur viendra, enlèvera ma veste et l'accrochera soigneusement au porte manteaux ? Non, mais juste, vous ne savez en rien ce que je vis. Toi, Riccardo et vous tous j'en suis sûr, vous dormez tous sur un lit, le soir ? Oui, pour certains vous partagez vos chambres avec vos frères et sœurs, mais vous dormez sur un lit ? Vous avez bien trois repas par jour complet ? Et moi alors ? Oh oui, je rentre chez moi, je passe directement à table et mange jusqu'à ne plus pouvoir me déplacer.

Je marque un temps de pause et serre les poings.

Riccardo me regardait, plus de ce vilain regard supérieur et dominant, non il semblait perdu, déboussolé. Il comprenait où je voulais en venir.

J'avais commencé, j'avais franchit la voie du non-retour, je devais continuer :

-Ma mère avait fait cinq ans de prison quand elle avait 18 ans pour avoir agressé un policier et quand elle fut libérée, les services sociaux l'avaient menacé que si elle avait un enfant, à cause de son casier judiciaire, ils le lui enlèveraient. Alors à 30 ans elle m'a eu et s'est mariée. Elle m'avait caché de l'État, mon nom était nul part, elle n'est même pas partie à l'hôpital pour son accouchement au-cas où les services sociaux l'apprenaient et me prennent à elle. Pour m'inscrire à une école, elle a dû en choisir une banale, qui n'a aucun encadrement scolaire et qui a accepté qu'ils me prennent à condition qu'elle paye deux fois plus chers mes cours. Puis à 38 ans, elle est morte, me laissant seul avec mon père qui m'avait promis qu'on traverserait cette épreuve ensemble mais qui, quelques jours plus tard, m'avait abandonné.

J'avais baissé les yeux au sol, n'osant croiser le regard de personne.

Tu peux être fier Riccardo, de m'avoir forcé à dire aussi facilement ce que je tente de cacher depuis des années.

-J'ai fini dans une famille qui me prend pour un animal. Je mange par terre, je dors par terre, pour aller pisser, je le fais dehors ! Je suis un esclave dans cette maison, j'y habite à condition de faire tout ce qu'on me demande de faire.

Je sentis ce regard sur moi. Son regard. Il me disait doucement de continuer, pour me libérer. Mais me libérer de quoi ?

-Ils me battent... j'en ai rien à faire, à force, mais ce qui me fait mal c'est quand les gens me disent que quand je cherche la bagarre, je la trouve. Je ne cherche pas la bagarre. Je suis la seule victime de ses coups.

Les larmes avaient rempli mes yeux, mais je refusais de les laisser couler. Ma voix se casse alors que je continuais :

-Vous... vous avez tous des baisers de la part de votre mère sur le dessus de votre tête, vous avez tous droits à chaque matin à des "je t'aime, sois sage", vous avez tous votre père qui vous ébouriffe les cheveux et vous dis "passe une bonne journée et travail fort", vous avez tous une famille qui vous aime, vous vous disputez tous avec vos parents des fois et vous réconciliez plus tard... Vous avez tous un lit confortable où dormir, de la nourriture complète à manger, des petites tendresses... Et moi alors ? moi dans toute cette histoire ? Je suis obligé de me rappeler que plus jamais j'aurais ça, moi ?

C'était trop à dire pour moi.

Et après 6 ans de retenu, je laisse perler mes larmes sur mes joues.

Bien sûr que j'avais pleuré pendant toutes ses années, mais que par les coups que je recevais. Jamais pour la douleur que j'avais au fond du cœur.

Personne n'osait parler. J'avais légèrement levé les yeux vers Riccardo. Sa main droite était posée sur sa poitrine et l'autre tremblait alors qu'il me regardait.

-Je suis désolé... Je murmure avant de quitter en toute hâte le terrain, prendre rapidement mes affaires dans les vestiaires et quittais le collège.

Mon ange GabrielOù les histoires vivent. Découvrez maintenant