14- Le château en Sologne

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Léonard

Benoit est l'héritier d'une famille, odieusement riche. Il a perdu ses parents quand il était enfant, a dû lutter contre son grand-père sous l'emprise d'une secte qui voulait leur confier toute sa fortune. Il ne croit en rien, si ce n'est aux affaires et à la raison, bien placé pour savoir que l'argent n'apporte pas le bonheur.

Benoit a acheté un château en Sologne, au milieu des bois. Le château avait du potentiel, avec un étang au milieu des bois, dans le calme et ils en ont fait un paradis. Ceux qui le veulent peuvent faire du sport, VTT, trail, chasse, natation ou tennis. Les soirs, ils font venir des artistes pour des spectacles privés.

C'est ici qu'il a épousé Ginevra.

Elle était une petite chef comptable d'une des boites que l'on a écumées, une métisse potelée avec du caractère et il est tombée fou amoureux. Il aime raconter qu'il apprécie surtout sa raison, son esprit droit et sans faille. Ginevra est devenue notre reine, issue des banlieues défavorisées, elle a dépassé toutes les barrières sociales.

Nous nous étions fixés comme règle de ne jamais draguer dans nos sociétés, il nous a avoué, gêné, dansant d'un pied sur l'autre, qu'il avait dérogé à la règle.

Il l'a emmenée à nos réunions d'anciens élèves, l'épreuve ultime pour les conjoints. Malheur à celui qui ramène une imbécile, les autres ne lui feront pas de cadeaux. Ginevra a charmé par son charisme, au grand soulagement de son mari qui n'en menait pas large, sans le lui avouer.

En arrivant chez eux, je passe le chemin de terre cabossé au milieu des bois, avec l'impression comme à chaque fois de me diriger vers un cul de sac puis vers l'ouverture d'un portail de conte de fées. La majestueuse demeure de pierre blanche est éclairée comme un phare au milieu des bois sombres. Nul besoin de barrière, les bois font office de clôture infranchissable.

J'ai ma chambre à demeure chez eux et je peux m'isoler ou profiter de la compagnie à l'occasion des repas gargantuesques.

Benoit et Ginevra aiment avoir leur monde autour d'eux et nous essayons de ne pas trop parler boulot là-bas, sauf certains week-ends destinés à impressionner un futur investisseur.

Nous nous y retrouvons à une dizaine d'habitués, avec le frère de Ginevra et son épouse, Tanguy et une conquête du moment, et un ou deux cousins de Benoit associés dans nos affaires.

Je suis le dernier arrivé ce soir, je gare ma voiture près des autres.

─ Tu ne ramènes pas de mec ! Tu vas te dessécher !

Benoit est sorti sur le perron pour m'accueillir.

─ Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre ! je grommelle en sortant mon bagage préparé par ma femme de ménage sur les directives d'Anet.

Je souris à la remarque de Benoit parce que j'ai baisé toute la semaine et j'aime notre secret.

─ On aurait dû inviter Julien, cela aurait fait du bien à ton spaghetti, ricane Tanguy qui le rejoint en haut des marches, un verre à la main.

─ T'occupes pas de mon spaghetti ! Déjà là toi ? Tu n'avais pas un audit à terminer.

Il recule surpris avant de réaliser que je plaisante.

─ Oui et je ne suis pas seul je vais te présenter une Maud adorable, à croquer !

─ Elle est majeure au moins ? Et pour Julien surtout pas !

Quelle connerie j'ai fait en l'invitant.

Ils rigolent comme des bossus.

Pour sa Maud, une mannequin en devenir d'après ses termes, une gourde pas fut-fut en réalité, pénible sur les bords avec ses idées à la con, au moins elle nous fait rigoler. Tanguy persiste, il me faudrait rencontrer quelqu'un.

─ Dis Maud tu n'aurais pas un mannequin masculin, qui aurait les mêmes idées que toi que l'on puisse présenter à Léonard ?

La fille sourit ravie, sans comprendre qu'il se moque d'elle.

Tanguy c'est l'extrême dans le diner des anciens de l'école, il essaie de ramener la fille la plus conne ou la plus greluche possible, pour le plaisir. Il prétend élever le niveau tous les ans. Il est sans cœur avec ses partenaires au lit, prétendant que l'amour n'existe pas. Je suis content d'avoir connu Gaspard pour ne pas être aussi con que lui.

Sa théorie sur l'amour c'est qu'il s'agit d'une ruse du pouvoir patriarcal, pour maintenir les femmes sous le joug. Il avait soutenu cette thèse à un concours d'éloquence de l'école, il s'était fait sacrément siffler par les filles de l'école.

Nous nous isolons inconsciemment, les trois amis. J'en profite pour tenter de clarifier les choses.

─ En fait Julien n'est pas si compétent et il a par contre un pouvoir de nuisance assez conséquent. Je vous en parlerai lundi !

Les deux me regardent surpris. Je les comprends, car c'est pareil pour moi. Si je ne couchais pas avec Javier, le tableau qu'il m'en a dressé systématiquement tous les jours m'aurait donné l'image d'un incapable. Je suis furieux à l'idée de m'être fait autant manipuler par Julien qui se révèle une véritable sangsue.

Le samedi matin, nous avons prévu une course dans la forêt, nous visons les vingt kilomètres. Nous nous sommes inscrits à un marathon dans un mois, je ne vois pas comment nous allons y arriver, car on n'a pas assez bossé. L'après-midi, je profite de la piscine et du jacuzzi, tout en rattrapant mon retard dans la lecture des rapports financiers. Il me faut aussi préparer un speech, car Benoit a invité les actionnaires d'une banque pour leur proposer un partenariat pour le diner.

Le soir, alors que j'ai terminé mon discours et que le repas se termine sous les grands lustres décorés de cristal de baccarat, je réalise que je n'ai pas appelé Javier.

J'aurais peut-être pu faire un effort ?

Nous n'avons rien convenu, mais il doit bien se douter que je pense à lui.

Je trouve ça un peu bête de le contacter comme un amoureux transit, nous sommes deux hommes qui couchons ensemble, rien d'autre !

Le dimanche matin, Benoit et les banquiers chassent, moi je préfère travailler la boxe avec un coach. Les coups de feu pétaradent, cela tire beaucoup, pour pas grand-chose à mon avis.

L'après-midi nous trainons tous. Ginevra est enceinte de six mois et ne fait plus aucune activité donc c'est l'occasion de bavarder avec elle. Javier ne m'a pas écrit, il doit être occupé lui aussi.

Benoit reçoit un appel alors que je songeais m'éclipser pour rejoindre mon petit mec. Il grimace et jure, Tanguy croise mon regard c'est surement un problème pour notre société.

Il raccroche et reste silencieux une minute à cogiter.

─ Leo, il faut qu'on aille à Londres pour une affaire urgente la semaine prochaine, lance Benoit avec un geste d'excuse pour son épouse.

─ Quoi, mais non ! je ne ...

─ Allez trois jours, Julien s'occupera de tout !

Ils sont en train de faire confiance complètement à Julien.

─ Je vais l'appelé, propose Benoit qui compose déjà son numéro. Après quelques instants en ligne, il raccroche et me dit que c'est réglé.

─ OK, je cède ne comptant pas tout déballer en place publique. C'est comme au poker, il faut savoir perdre quelquefois.

En préparant ma valise, j'appelle Julien à mon tour et lui donne mes directives. Je n'en ai qu'une : Il ne vire personne pendant. J'appelle Anet ensuite pour régler le détail du voyage et je lui ordonne de ne plus rien confier à Julien, me concernant !

─ Et Anet ? Aucune lettre de licenciement !

La position n'est pas facile pour elle. Je lui demande de contrer Julien éventuellement, elle a compris sans insister. Cependant si elle suit mes consignes je la soutiendrais. J'espère qu'elle continuera à m'écouter.

J'ai songé à appeler Javier, mais Benoit frappe à ma porte, nous devons sauter dans un avion d'ici deux heures. Dans le taxi, j'opte pour un message.

J & L [M*M]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant