Chapitre 5 : Thélis

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Eleonor, les yeux écarquillés, oublia comment respirer.

Alors Thélis ressemblait à ça ?

De doux rayons de soleil illuminaient le ciel au dessus de sa tête et l'air était si pur qu'Eleonor crut rêver. Sous ses pieds, les pavés étaient peints et formaient des motifs géométriques aussi discrets que précis. Des lanternes renfermant des flammes de magie aux couleurs variées étaient suspendues entre les bâtiments de pierre grise. De nuit, l'effet devait être particulièrement beau, même ce n'était pas aujourd'hui qu'elle pourrait y assister.

- Nous voici à Astras, expliqua Victorien.

- C'est incroyable, s'émerveilla Eleonor. C'est la cité avec les souterrains, c'est ça ?

- C'est ça.

Eleonor avait du mal à tenir en place, mais elle dut s'y résoudre, de peur d'attirer l'attention sur elle. Par précaution, elle abandonna l'anglais et passa au lysirien, ce que Victorien approuva, à en croire le hochement de tête qu'il lui adressa. Il lui demanda tout de même de ne pas parler trop fort.

Eleonor devait l'admettre, elle était jalouse de voir que son accent à lui était parfait. Tandis qu'ils parcouraient les rues d'Astras et se mêlaient adroitement à la foule – personne ne s'attardait sur leur tenue, comme quoi ils ne devaient pas être les seuls magiciens à changer de monde – Eleonor, curieuse, en profita pour lui poser des questions.

- Combien de langues parlez-vous ?

- Quatre, indiqua Victorien. Anglais, français, lysirien et madrigan.

- Je vous demande pardon ?

Elle aussi avait des notions de français, mais à peine de quoi tenir une conversation. Quant au madrigan... Cette langue était un véritable cauchemar à apprendre. Hormis les Madrigans eux-mêmes, qui apprenaient dès la naissance, rare étaient ceux qui s'y risquaient.

Une minute.

- Vous les parlez toutes couramment ? vérifia Eleonor.

- Oui.

- Vous êtes un Madrigan ?

- En partie.

- Mais... Je n'ai pas rêvé, c'est de la magie Lysirienne que vous utilisez ?

- Oui, d'où le "en partie", ironisa Victorien.

Bon sang, où est-ce que les Effacés l'avaient trouvé ? Eleonor avait beau vivre sur Terre dans une communauté où les différentes ethnicités importaient peu, jamais elle n'avait vu un Madrigan et un Lysirien engendrer une descendance commune. À moitié humain en plus de ça ?

Et dire que jusque là, elle trouvait l'assortiment de ses tuteurs, un Astréien et une Ancestrale, particulièrement cocasse...

- Vous avez des origines... Pour le moins uniques, fit-elle remarquer.

- Les choses sont ce qu'elles sont, répondit platement Victorien.

Il l'entraîna en dehors de la grande rue piétonne vers une allée moins fréquentée avant qu'elle ne puisse en rajouter une couche – il n'était pas bavard, et vu sa réponse évasive, sans doute n'aimait-il pas parler du passé. Eleonor, qui ne voulait pas rendre la situation gênante, changea de sujet.

- Je ne vous ai pas posé la question et j'aurais sans doute dû le faire avant, mais où allons-nous ?

- Dans le repère des Effacés d'Astras.

- Vous pensez pouvoir y retrouver le commanditaire de mon assassinat ?

- Non. Je l'ai précisé, la demande était anonyme. En revanche, je peux me renseigner auprès de mes collègues. Beaucoup sont en contact avec des assassins indépendants.

Oracles ~ La saison des AssassinsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant