Chapitre 5

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Le service des potionnistes se situe au fond d'une aile de l'hôpital Sainte Mangouste. Pour circuler en sécurité dans le bâtiment labyrinthique, je bois une gorgée de potion Trompe l'Œil. Non pas que les paparazzis me suivent H24, même chez le médecin, mais il suffit d'un admirateur insistant pour que mon passage ne passe plus du tout inaperçu.

C'est déjà agaçant en temps normal, mais étant donné les nombreux avertissements de Ron, j'ai intérêt à rester discret sur cette affaire.

Je traverse le grand hall, prends un ascenseur pour descendre d'un étage, arpente le long couloir d'un service quelconque avant de remonter par les escaliers quand je suis certain de ne pas avoir attiré l'attention. Certains diront que j'en fais trop, ceux-là n'ont jamais été suivis jusque chez eux par des énergumènes hystériques. Et, même si la plupart des admirateurs ont un bon fond et des intentions inoffensives, il suffit d'un esprit dérangé pour compliquer les choses.

Je ne me souviens plus si j'ai commencé à appliquer en premier ces techniques de filature dans ma vie privée ou dans mon quotidien d'Auror, toujours est-il qu'on ne perd pas facilement de telles habitudes...

Quand je passe le seuil du Département des Potionnistes, un frisson court sur ma peau comme si une onde magique avait été lancée. Je rumine en constatant dans le reflet d'une armoire en verre que les effets de mon camouflage ont été effacés. Cet endroit est encore plus sécurisé que Gringotts, ma parole !

Je suis encore en train de râler sur le seuil du service quand un jeune potionniste vient à ma rencontre, un bloc-notes sous le bras.

Quelques secondes de silence s'étirent, ses yeux s'écarquillent, puis il se redresse un peu, certainement en train de réaliser que c'est l'Auror Potter lui-même qui vient solliciter une demande.

Exactement ce que je voulais éviter.

Il se penche pour ramasser la plume qu'il a maladroitement fait tomber, se racle la gorge, brosse sa plume qui s'agite et la pointe sur son calepin pour la calmer.

— M. Potter, c'est un honneur de vous recevoir ! Dites-moi, quel est votre besoin ?

J'évite de paraître impatient, mais je jette un œil dans son dos pour tenter d'apercevoir un potionniste peut-être un peu plus expérimenté.

— J'ai juste besoin de quelqu'un qui maîtrise la Memoriae Captiva...

Memoriae Captiva, dit-il en prenant des notes, je comprends, et pour les... archives, je me dois de noter officiellement votre requête, si vous le voulez bien...

— Est-ce que je peux parler à la personne en charge de ce service ?

Mon ton est peut-être un peu sec, mais je n'ai pas le temps de m'éterniser dans un service directement relié au Département des Aurors. Pas si je veux rester discret.

Les joues du jeune potionniste rougissent soudain, comme s'il prenait conscience de mon insatisfaction et s'imaginait déjà les conséquences pour sa carrière de contrarier le grand Harry Potter. Aussi, il balbutie en se frottant la tempe.

— Bien sûr, mais elle est en mission sur le terrain aujourd'hui. Son bras droit néanmoins doit être disponible. Je vais vous le chercher immédiatement, M. Potter. Tout de suite !

Tandis qu'il s'éloigne à reculons, en bafouillant des excuses, je fais quelques pas pour dégager l'entrée et éviter les regards curieux. Dans la salle tamisée, des fioles de potions sont alignées sur de grandes étagères, tandis que du matériel est éparpillé sur les bureaux qui occupent le reste de la pièce. Au fond, une porte débouche dans une grande serre dans laquelle je pénètre en vérifiant qu'il n'y a pas de sorciers en embuscade. L'air y est moite et le silence entrecoupé de bruissements de feuilles. Derrière les grandes baies vitrées brille un soleil artificiel qui fait oublier que Sainte Mangouste est planquée dans un immense sous-sol magique. Des centaines de plantes s'entassent, s'accrochent et s'élèvent dans leurs bacs, en terre ou suspendues. Toutes sont méticuleusement étiquetées avec de petites pancartes écrites à la main. Certaines d'entre elles battent des feuilles lentement, une grande plante éternue bruyamment et s'ébroue tandis que les autres s'écartent un peu pendant son manège. Le son d'une fontaine clapote plus loin, et des insectes colorés volettent entre les plantes. L'une d'entre elles, plus haute que les autres, semble tendre vers moi de grandes feuilles tapissées de velours violet. Quand je lève la main, intrigué par cette texture inhabituelle, une voix s'élève dans mon dos.

Memoriae CaptivaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant