Je crois que c'est la première fois de ma vie que je me rends au travail un dimanche. J'aime assez l'idée. De ce que je sais, il y a peu de monde et surtout peu d'appels, car les gens sont persuadés que le service client est fermé. J'imagine par contre que les quelques appels doivent être des cas bien difficiles à traiter. Arrivé au rez-de-chaussée de l'immeuble, je perçois tout de suite l'activité réduite. L'open space de ce niveau est désert. Seuls deux étages sur les quatre sont occupés et encore pas entièrement remplis. Pénétrant sur le plateau du second, je m'empresse de m'installer entre Dorothée et Nico. Je n'ai que quelques minutes avant de me connecter.— Salut Mél ! Me lance ma collègue attendant patiemment l'heure pour se connecter.
Vous imaginez bien que nous ne devons surtout pas nous connecter avant l'heure, cela signifierait des heures supplémentaires, terme exclu du vocabulaire de l'entreprise.
— Ça va ? Ça fait bizarre y'a pas grand monde.
— Ouais c'est toujours comme ça le dimanche, car même si la journée est payée presque le double, personne n'a vraiment envie d'être volontaire, m'explique Nico.
Je n'ai pas vraiment parlé avec Nico depuis l'autre soir quand j'ai refusé qu'il me raccompagne. Il semble avoir digéré la chose et me paraît bien agréable aujourd'hui.
— C'est l'heure, c'est parti ! annonce Dorothée en appuyant solennellement sur les touches de son téléphone.
Nico me sourit et me fait un clin d'œil en prononçant sa première annonce de la journée, j'en fais de même presque aussitôt.
Vers 18 h, les appels ont fortement diminué et nous nous retrouvons finalement tous à nous balancer sous nos chaises en discutant simplement, coupés de temps en temps par quelques clients mécontents.
— Ça va ? Vous ne forcez pas trop ? nous interrompt Rémi le sourire aux lèvres.
Il s'appuie sur le poste libre en face du mien et nous observe amusé.
— Si on m'avait dit que les journées du dimanche étaient si calmes, je me serai inscrite pour tous les dimanches, précisé-je.
— Tu peux toujours le faire, me murmure-t-il en se penchant sur mon poste. Moi personnellement, je les fais presque tous, ça gonfle mon salaire.
Avec un petit sourire en coin, il s'écarte pour rejoindre son poste d'écoute au bout de la gondole voisine.
— Tu as trouvé une personne pour te raccompagner finalement, me lance Nico plus froid que quelque minute auparavant, appuyant ses dires par un hochement de tête vers Rémi.
Je suis surprise de sa remarque, car il ne travaillait pas l'autre soir. Comment a-t-il pu apprendre ça ?
— Bref...
Il se lève suivant Dorothée pour j'imagine partir en pause. J'observe le plateau et un calcul rapide du nombre de présents m'indique que ma pause me sera refusée tant que les autres ne seront pas revenus. Je me redresse rapidement dans ma chaise quand un bip me rappelle à l'ordre dans mon casque.
— Alipro Bonjour, Mélanie à votre écoute.
— ...
Aucune réponse. Je regarde le numéro qui évidemment est anonyme. Je commence à être agacée par cette histoire. Bien décidée à ne pas lâcher, je garde le client en ligne et mets mon micro en silencieux. Après tout, pas de soucis, on me croira en communication. Toujours aucun son, ne me parvient, pas même une respiration. Au bout d'un certain temps, j'entends un bruit m'annonçant que la personne va raccrocher et effectivement elle met fin à la communication. Ce petit jeu a duré cinq minutes ce qui est long au téléphone. Quelques minutes plus tard, Nico et ma collègue font leur retour, j'en profite pour prendre ma pause sans demander, évidemment.
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Panique au bout du fil
General FictionMélanie doit revoir son plan de carrière rapidement car les fins de mois deviennent difficiles avec ses maigres revenus. Elle finit par décrocher un entretien dans un centre d'appel qui va lui ouvrir ses portes pour une durée indéterminée. Inespéré...