Chapitre 15*

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Le lendemain matin, je me lève aux aurores pour me rendre à la salle. Les événements de la veille m'ont mise dans un état second et je dois absolument libérer tout ça. La boxe va encore une fois m'aider. Mon coach est surpris de me voir si tôt, mais il ne me pose pas de questions, il me connaît bien et il sait que je vais devoir m'épuiser pour me détendre.

J'enchaîne les exercices pour enfin me retrouver sur le ring prête à mettre au tapis mon adversaire. Une fois équipée des accessoires de sécurité nécessaires, je me retourne pour faire face à mon adversaire en sautillant. Je découvre un Thierry surpris :

— Je ne pensais pas te voir là ce matin. Pas fatiguée de la veille ?

— Si... mais j'avais besoin de me détendre.

Il me regarde interloqué comprenant que quelque chose ne va pas. D'un signe de tête, je lui fais comprendre que je lui expliquerai après et nous commençons notre combat improvisé.

Évidemment, je sors perdante, mais épuisée physiquement comme je le souhaitais.

— Alors la crevette, tu m'expliques ? On dirait que t'as mangé du tigre ce matin. Qu'est-ce qui s'est passé ?

Qu'il utilise encore une fois ce surnom bien à lui me fait sourire. Je m'assois sur le banc pour reprendre mon souffle et lui explique mes péripéties de la veille.

— Merde, pas cool. Je ne savais pas pour les appels au boulot. Tu en as souvent ? m'interroge-t-il.

— Assez oui, presque à chaque fois, je suis seule donc aucun moyen de le prouver.

— On est là, t'inquiète. Si tu as besoin tu sais que tu peux m'appeler.

Je lui confirme par un hochement de tête et après un échange rapide de nos numéros, je quitte enfin le gymnase.

Les jours suivants s'enchaînent. Mon histoire a fait le tour au sein de l'équipe du soir. A priori, ces appels restent très rares donc le fait que j'en ai reçu aussi souvent semble anormal d'après les dires de Rémi. Je n'ai eu aucun autre appel depuis l'autre soir et j'en suis ravi. Peut-être que tout ceci n'était qu'une série de coïncidence.

Le dimanche arrive très vite et je me retrouve avec Thomas, Rémi et Sam de notre équipe, les seuls courageux et volontaires. Me sentant de plus en plus proche d'eux je me décide en quittant le bâtiment à minuit :

— Je vous paye un verre ?

- Yes ! Enfin une bonne nouvelle après cette sale journée ! Accepte Sam aussitôt.

La pauvre n'a eu que des clients compliqués aujourd'hui. À croire qu'ils étaient tous dirigés vers son poste.

— Oui pourquoi pas, valide Thomas sans trop hésité.

— Ok pour moi !

Nous rejoignons tous les quatre mon appartement. Il est très rare que je fasse rentrer du monde dans mon antre, mais je me dis qu'il est tant de m'ouvrir un peu plus.

— Sympa chez toi ! C'est hyper grand ! T'as deux chambres ?

— Oui j'avais une coloc avant, mais je n'ai pas envie de trouver plus petit.

Nous nous installons tous sur le canapé et je demande à chacun ce qu'il souhaite boire. J'observe Rémi qui scrute ma bibliothèque et en extirpe un exemplaire bien caché de Twilight. Il me fait un sourire en coin pour me faire comprendre que ce choix littéraire ne lui convient pas ce qui m'amuse beaucoup. Je ne m'en étais pas ventée lors de notre conversation sur le sujet.

— Téquila pour moi évidemment ! s'écrie Sam toujours aussi extraverti, nous coupant dans notre échange silencieux.

— AH ouais, pareil ! me lancent les deux autres.

J'ai comme l'impression que ce petit verre va se transformer en une soirée bien alcoolisée. Après tout pourquoi pas ?

Effectivement, nous enchaînons les verres pendant plus de deux heures. Il n'y a plus de filtres et chacun parle sans gêne.

— J'ai envie de sortir, m'exclamé-je dans un état presque second après tout l'alcool ingurgité.

— Ah beh c'est pas moi qui conduirait, avoue Thomas mort de rire.

— J'appelle un taxi, je veux vous emmener quelque part.

Au bout d'une demi-heure, nous nous installons enfin en haut de la tour de gai. Il fait un froid de canard, mais avec l'alcool qui coule dans nos veines, nous sommes peu gênés par la température extérieure. Il y a bien longtemps que je n'avais pas été dans cet état.

— Whouaou, comment c'est trop beau ici ! s'exclame Sam, toujours sans aucune retenue.

Nous nous installons tous les quatre face à la vue grandiose de la ville illuminée par l'éclairage public en contre bas. Ayant vérifié que le ciel était très dégagé, je rajoute :

— En fait le plus beau, c'est au-dessus de nos têtes.

— Ah ouais ! s'extasie Thomas, rejetant la tête en arrière.

Aucun nuage ne vient parasiter la vue qui est parfaite. Les étoiles brillent par millier au-dessus de nos têtes. La Voie lactée est clairement visible ce qui est rare à cette époque de l'année. Il aurait été dommage de rater ça.

Nous nous allongeons en étoile, les têtes collées pour observer cet exquis spectacle. Personne ne parle, c'est le silence complet.

— Comment tu connais cet endroit ? me demande Rémi curieux.

— Mon père m'y emmenait souvent...

Rémi s'assoit et j'en fais de même. Je ne veux pas parler de tout ça... pas maintenant. J'ai envie de passer une soirée à rire, pas à pleurer. Nous nous observons quelques secondes. Avec un sourire faisant ressortir une fossette, il ajoute :

— Je crois que je suis complètement ivre là... se marre-t-il sans quitter mon regard.

Je ne peux m'empêcher de l'observer sous la lueur de la lune. Depuis notre première rencontre, je me suis toujours demandée ce qu'étaient ses cicatrices, mais je n'oserai jamais lui demander.

— Pourquoi la grande ourse s'appelle comme ça ? C'est une casserole... c'est débile. On devrait dire la grande casserole.

Nous pouffons de rire après cette remarque très scientifique de Thomas. N'entendant plus Sam depuis un certain temps, je me penche vers elle et remarque qu'elle s'est profondément endormie.

Assis tous les trois face à la ville, nous discutons un moment histoire de dé-saouler un peu avant de rappeler un taxi. L'aube se lève au loin. La clarté naissante nous permet de voir le pont du nord de la ville.

— Je n'avais jamais vu que ce pont était si grand en fait, lance Rémi.

— On l'appelle le pont des lâches... précisé-je.

— On imagine un peu pourquoi je pense... c'est glauque.

— Oui carrément... il doit y en avoir un dans chaque grande ville, j'imagine.

Sam se réveille d'un coup, surprise de s'être endormie à priori. Elle se lève et commence à descendre les marches d'un pas décidé.

— Faut qu'on rentre là, sinon je fais finir ma nuit là.

Au retour, nous déposons les garçons chez Rémi, et Sam rentre avec moi. Elle a accepté rapidement ma proposition de l'héberger pour la nuit, se justifiant par le fait que je n'avais qu'un étage à monter chez moi.

Ravie, je me repasse les événements de la soirée. Décidément, je pense que j'ai trouvé une bonne petite équipe dans cette boîte. Je ne peux pas m'empêcher de penser à Alice. J'aimerais partager tout ça avec elle et j'arrive aussi à me dire que je serai curieuse de savoir où elle en est avec James. En pensant à ma meilleure amie, je finis par sombrer doucement dans le sommeil. 

Panique au bout du filOù les histoires vivent. Découvrez maintenant