9 - Suffocant

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— Je vous demande pardon ?

La médecin a beau être calme, je crois que je vais suffoquer. Je regarde partout autour de moi, en quête de je ne sais quoi, comme si je voulais m'échapper. Comme s'il était possible de s'échapper de ce qu'elle vient de m'annoncer. Comme si j'allais pouvoir me réveiller. Je n'arrive plus à respirer, je tire sur mon col. J'ai chaud et je frissonne en même temps. Mes doigts se crispent sur l'accoudoir du fauteuil et je ferme les yeux. Cela ne peut pas être vrai. Je vois des étoiles danser devant moi. Je... Je...

— Docteure ! Il...

— Viens ! Porte-le ici !

Je sens deux bras me soulever, je sens ses phéromones, mais elles sont légèrement différentes, plus acides. Il stresse. Je... Il faut que...

De l'air frais arrive sous mon nez. Une main tiède caresse mon front. L'odeur de Jasper m'enveloppe. Mon corps est tout mou. J'ai l'impression d'être liquide. Mes yeux papillonnent.

— Markus ?

Je me redresse. On me repousse. Je suis allongé. J'ai du mal à accommoder, je ne sais pas trop où regarder. Ah. Là. Le visage de la docteure Debois.

J'étais dans son cabinet. Nous étions venus pour les résultats de ma prise de sang. Jasper a tenu à m'accompagner. Je ne voulais pas, mais manifestement il a eu raison de me forcer la main. Sans ses phéromones, j'aurais sûrement été dans les vapes bien plus longtemps.

— Restez allongé, Markus. Je vais m'assoir à côté de vous et nous pourrons discuter. Vous avez fait une grosse chute de tension, ne bougez pas pour le moment. Jasper est près de vous.

— Je sais. Je le sens.

Littéralement. Je ne le vois pas, mais son odeur est partout. Il fait de son mieux pour m'apaiser, et cela fonctionne plutôt bien.

— Reprenez, Docteur, s'il vous plaît. Je suis ?

— Un Oméga extrêmement dominant. Ce qui explique votre cycle tardif. C'est assez rare, mais pas assez pour être inconnu du monde médical. C'est en général génétique, il doit y avoir des Omégas extrêmement dominants dans la famille de votre parent oméga. Cela ne se présente que chez les hommes, qui ont, en plus, leurs premières chaleurs bien après leurs vingt ans au lieu de les voir se produire pour la première fois à la fin de l'adolescence comme c'est le cas normalement.

J'inspire. J'expire. Là. Je ne peux pas me permettre de m'effondrer encore. Bon sang. Je dois absolument... il faut que... Oh, mon dieu. Qu'est-ce que je vais devenir s'ils le découvrent ? Je pourrais dire adieu à mes études. À mon indépendance. Je ne sortirais plus jamais de la maison, sauf le jour de mon mariage. Père, il...

— Markus ? Respire. Ça va aller.

— NON ÇA NE VA PAS ALLER ! TU... TU N'AS AUCUNE IDÉE DE... TU...

Deux bras m'enserrent. Mon nez contre sa poitrine, enfoui dans ses vêtements. Pas loin de son cou. Des phéromones. La mer. Son souffle calme. Le silence, brièvement. Et la voix douce de la médecin.

— J'ai bien compris que c'est un énorme problème pour vous, Markus. Mais ne cédez pas à la panique. Il existe des solutions. Je vais vous aider. Restez un moment avec Jasper. Je dois passer quelques appels pour décaler mes prochains rendez-vous. Laissez-moi prévenir mon secrétaire.

J'opine. Je ne bouge pas. Je ne pourrais pas, de toute façon. En quelques jours, je suis devenu totalement dépendant de Jasper et je déteste ça autant que j'en profite. Et comme s'il lisait dans mes pensées, il murmure :

— Eh. C'est juste le temps que tu ailles mieux. Dans quelques semaines ça sera oublié, et tu n'auras plus besoin de mes phéromones. Ni de moi.

***

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