Don't let me die ~ Un

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Aujourd'hui c'est encore un nouveau départ. Je commence à m'habituer à ne pas m'attacher trop vite aux choses lorsque j'arrive quelque part. Même si en général, je ne m'attache a rien. Ça me soule de bouger à droite à gauche. Rien n'est stable. Ça me déprime, ça me fait littéralement chier. A 17 ans , on devrait être fixée. C'est bon, rester dans une famille et y rester.
Quelqu'un frappe à ma porte, je souffle et lève les yeux au ciel. J'entends la voix du fils de ma tutrice, qui aujourd'hui ne le sera plus.

- Katrina? Je peux entrer?
- Je t'ai répondu quand tu as toqué? Non. Donc c'est non.
- Aller soit pas méchante, c'est ton dernier jour, viens manger le petit déjeuner avec nous, ça me ferait plaisir ! , dit-il avec sa petite voix toute frêle.

Je lève les yeux au ciel encore une fois et me lève avant de prendre quelques habits dans mon armoire. Dernier jour. C'est toujours comme ça. Ils sont tristes de me voir partir , tandis que je ne ressens absolument rien. Comme si rien ne m'importait. Il continue de frapper à la porte, ce qui m'exaspère.

- Oui oui c'est bon j'arrive! Je m'habille juste. , lançai-je.

Je pars dans la salle de bain et prend une douche avant de m'habiller d'un jogging et d'un t-shirt qui laisse entrevoir un peu mon nombril. Je laisse mes cheveux mouillés et frisés lâchés en faisant bien une raie sur le côté. J'enfile mes chaussettes et mes chaussons puis descend en sautillant dans les escaliers.

- Bonjour Katrina, tu as bien dormi? , demande ma tutrice avec un petit sourire.
- Ouais. , répondis-je sans émotion.

Je m'installe à table et elle me sert mon café au lait comme d'habitude. Je me fais une tartine de pain grillé avec du beurre et mange silencieusement. Si de base je ne parle pas vraiment, le matin c'est pire. Je sens un regard insistant sur moi et ferme les yeux en soufflant.

- Quoi?
- Mh, il faut que je te parle Katrina.. , tente ma tutrice.
- Ouais. De quoi? , répondis-je sans lui lancer un seul regard.
- Nous savons aujourd'hui chez qui tu iras dans la journée..
- Ah. C'est pas trop tôt, ils aiment bien faire durer le suspens eux. Bon, qui va m'accueillir pendant un an? Elle est où cette famille d'accueil?
- Justement, ce n'est pas une famille d'accueil Katrina, c'est chez ton père, Will..

Je m'arrête de mâcher et fixe mon café, sans aucune réaction. Du moins, je me contiens. Je reprend la mastication, avale doucement et lève mon regard froid sur elle. La colère fuse en moi. J'essaie de la dissiper, tant que je peux. Parler de mon père me met la haine. J'aurais préféré qu'il n'apparaisse pas dans ma vie. Et là on m'annonce quoi? Que je vais vivre avec lui? Vivre avec ce menteur. Ce lâche.

- Je n'irai pas chez mon père, vous le savez ça?
- Il a reconnu ta garde, il a voulu que cela se fasse discrètement, il s'y met depuis un bon bout de temps maintenant et-..
- Et personne dans cette putain de maison et dans cette putain de vie peut m'en parler? Vous pensez que vous pouvez dicter ma vie comme ça? Mon père est un connard. Il m'a abandonné. Je ne sais même pas où il habite. Je ne sais rien de lui!! , criais-je.
- Calme toi Katrina. S'il te plaît. Crois-moi, j'aurais voulu t'en parler bien plus tôt mais j'étais tenue au secret professionnel. Ton père vit en Californie, a San Fernando. A à peu près 2h30 d'ici. Il a une famille, une femme et deux enfants. Une fille et un garçon. Je ne peux t'en dire plus, tu en sauras davantage quand tu seras chez lui, il t'attend impatiemment.. la dernière fois, pour signer les derniers papiers.. il.. il a pleuré d'impatience.. Il veut vraiment établir un lien..
- Mais j'en ai rien à foutre de ses larmes. Il a cas pleurer encore s'il veut. Je refuse d'établir un lien quelconque avec ce type. On peut me forcer à aller la bas, mais en aucun cas on me forcera à l'accepter. Et ce n'est pas mon père. C'est à peine si c'est vraiment lui qui est à l'origine de ma naissance. Et puis pourquoi il réapparaît comme ça? Quand j'ai 17 putains d'années de vie derrière moi? Il pense pas que c'est un peu trop tard? Qu'il aille se faire foutre.

Je me lève et sors de la table, en colère et dégoûtée. Mon père m'a abandonné quand j'étais encore petite, il avait une double vie, il avait déjà un enfant dans le dos de ma mère. Cela a détruit ma mère et m'a détruit moi par la suite. Il n'a jamais été là, il n'a jamais cherché à me revoir. Rien. S'il avait été présent, peut être que tout ça ne serait pas arrivé. Peut être que maman serait encore en vie. Je monte en trombe et sors la valise déjà remplie, là jette par terre et m'assoie sur le lit. Je me roule en boule et fixe la vitre, le regard vide. Les larmes veulent venir, mais ne trouvent pas le chemin. Encore une fois, j'enfouie ce que je ressens au fond de moi, encore une chose qui ne sortira pas. Ma main passe sous mon t-shirt et frôle ma cicatrice. La toucher m'électrise. Je ferme les yeux et inspire profondément. Un rayon de soleil m'illumine le visage et je vois un papillon d'une somptueuse couleur sur la fenêtre. Ses ailes bleues turquoises battent et un petit sourire se dessine sur mes lèvres. Maman..

La sonnerie retentit. Malgré ma colère, une boule se forme dans ma gorge. Il est là, il va m'emmener et jouer au papa modèle. Ma tutrice m'appelle d'en bas des escaliers et je sers le poing. Ma valise dans l'autre main, je descend à contre coeur. Un homme se tient debout, le sourire au lèvre. C'est un grand homme, brun, yeux verts et des dents blanches. Il est vêtu d'un costard cravate. Cravate Louis Vuitton je précise. Eh bien, nous n'avons pas la même vie.

- Bonjour Katrina.. , avance-t-il.

Je fais un pas en arrière, ce qui l'arrête net. Mon regard l'analyse de haut en bas et il enfouie ses mains dans ses poches. Aucun mot ne sort de ma bouche. Qu'il soit déjà content que je daigne poser mon regard sur lui. Son sourire se fait de plus en plus gêné. J'aimerai le lui effacer pour toujours.

- Hum.. nous devons y aller, la route est longue.. laisse moi porter ta valise Katrina.. , tente-t'il.

Je la fais rouler jusqu'à lui et me tourne vers ma tutrice à qui, malgré le fait que je ne la porte pas dans mon coeur, je la prend dans mes bras quelques secondes. J'ai du mal à m'attacher aux gens. Et ce n'est pas parce que j'ai passé deux ans à leur côté que finalement je ressens une quelconque affection pour eux. Cependant, cracher sur ce qu'ils m'ont donné durant ces deux années, ce serait malhonnête de ma part. Je leur en suis quand même reconnaissant d'avoir toujours été patient. Mais je ne leur dirais jamais..

- Aller ma chérie, prend soin de toi.. , sourit-elle.

Je hoche la tête et me tourne vers cet « homme ». Il sourit à ma tutrice et prend ma valise en essayant d'établir un regard yeux dans les yeux avec moi, mais il n'aura rien. Je le suis et me trouve devant une grande Tesla. C'est peut-être impressionnant mais ça me met encore plus la rage. Avec ma mère on vivait de son petit revenu pendant que lui s'amusait sans doute à participer à des galas de charité et autres événements de riches. Je m'installe derrière et lui au volant, il ne cherche pas à parler, tant mieux. Je met mes écouteurs et pose ma tête sur la fenêtre puis regard le paysage défiler. C'est un long, très long voyage.. 2h30 en sa compagnie.
Je me demande comment je vais réagir en voyant sa belle petite famille. Ma mâchoire se braque à cette pensée et je ferme les yeux pour tenter de penser à autre chose. Une chose est sûre. Personne ne cherchera à établir un quelconque lien avec moi. Personne. Avoir des liens c'est se tuer tout doucement à petit feu car un jour, on te plantera un couteau dans le dos. Ou en plein cœur.

Don't let me DieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant