L'envers du décor

Chapitre 1: Liam Valmont

Je savourais la chaleur écrasante du soleil, un Pina Colada à la main et l'autre dans l'eau. Plus je me disais qu'il faisait chaud, moins je voulais bouger. Bien installé dans l'énorme coussin flottant qui se déplaçait lentement dans la piscine creusée du domaine de ma mère, je n'avais qu'une seule envie : relaxer. La température était parfaite pour me contenter de rester sur ce coussin et enchaîner les cocktails.

Depuis que la tournée était terminée, je m'étais exilé chez ma mère à Monaco, laissant à mon frère Harry le soin d'aller voir notre père à New York. Ma mère était enchantée de m'avoir chez elle, bien que depuis mon retour, nous avions déjeunés ensemble que deux ou trois fois. Je ne m'en formalisais pas. De toute façon, elle était tellement dans les vapes à cause du Valium, que je pouvais à peine lui arracher trois mots cohérents de suite.

En jetant un coup d'œil à ma montre, je me suis rappelé qu'à l'heure qu'il était — presque treize heures — elle était encore emmêlée dans ses draps. D'ailleurs, ça lui avait pris trois jours pour complètement réaliser que j'étais venu lui rendre visite quelque temps. Elle n'avait même pas questionné l'absence de Harry tellement elle était perdue.

Comme je savais que j'allais rapidement mourir d'ennui si je venais seul, j'ai convaincu Ezhékiel de me suivre. En abaissant mes lunettes soleil sur mon nez, j'ai jeté un coup d'œil à mon ami d'enfance qui sortait de la cuisine avec son troisième cocktail à la main.

— Charlie vient de m'appeler. Elle prend l'avion demain pour nous rejoindre au bal doré, a-t-il expliqué en reprenant son coussin de piscine.

J'ai lentement hoché la tête en souriant doucement. Charlie était la sœur jumelle d'Ezhékiel bien qu'ils n'aient d'identique que leur date de naissance et la couleur des yeux. Ez était le portrait craché de son père : blond, les yeux bleus, un sale caractère, une ambition à tout casser et le même sourire en coin d'une froideur insupportable. Charlie pour sa part, tenait beaucoup plus de sa mère. Les cheveux plus roux — qu'elle avait teints rouge cerise l'année dernière. Là où son frère était plus froid et faisait moins de vague — comme son Britannique de père —, Charlie était chaleureuse et explosive comme son Italienne de mère.

J'étais content qu'elle vienne nous rejoindre, j'allais pouvoir m'amuser avec elle au moins. J'avais hâte de voir quelle robe elle avait prévue pour le bal doré de demain soir. Bien qu'elle soit du genre à porter des leggins à motif de galaxie, elle avait d'excellents goûts en matière de mode et de grandes marques — merci à sa mère. Juste de penser à ses longues jambes me rendait impatient de la voir.

— On devrait sortir ce soir, j'aimerais bien me trouver une fille pour le bal. Sachant que tu lâcheras pas ma sœur, je veux pas me ramasser seul, a déclaré mon ami en bâillant.

— T'as qu'à montrer ta dernière Rolex, ça fera peut-être effet.

J'ai sursauté lorsqu'il m'a arrosé, mécontent. L'histoire de sa montre était en fait un running gag transmis par son père. Le grand-père d'Ez, Richard, donnait toujours à son fils Alex — le père d'Ezhékiel — une nouvelle montre pour Noël. Ça a duré plus de vingt ans. Pour poursuivre cette mauvaise tradition, Alex donnait dorénavant des montres à mon ami. J'espérais secrètement qu'Ezhékiel ne fasse pas de même avec ses propres enfants. J'ai tout de même accepté la proposition de sortie. Ça ne pouvait que faire du bien de toute façon.

Lorsque notre pichet de Pina Colada était enfin vide, nous sommes rentrés et nous sommes allés prendre tout notre temps pour nous préparer à la soirée à venir. Ez est allé se coucher pour cuver l'alcool qui avait fait guise de déjeuner.

Dans ma chambre, j'ai allumé la télé pour avoir un bruit de fond. J'ai pris un long bain en textant Charlie qui s'ennuyait chez elle et je me suis amusé à lui demander des photos d'elle. Il n'en a pas fallu beaucoup pour qu'elle remplace ses grimaces et sourires par son décolleté, son ventre et la naissance de ses hanches.