Chapitre 7

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Je n'ai vraiment plus l'habitude de monter à cheval.

Nous prenons enfin une pause après plus de deux heures de voyage, et la douleur dans mes cuisses est terrible. J'ai l'impression d'avoir le feu aux fesses... mais pas dans le bon sens du terme. Pas du tout.

Tandis qu'Oriana s'assied sur une souche au sommet de la colline où nous avons décidé de faire halte, je reste debout afin de me dégourdir les jambes. Devant un coucher de soleil aux teintes orangées éblouissantes, une grande étendue de champs, de plaines et de chemins de terre se présente sous mes yeux. Nous sommes encore en hiver, alors j'ai surtout droit à un paysage terne et brun, mais je n'en suis pas moins subjugué. Je n'ai jamais vu un tel décor naturel de ma vie. Hormis quelques cabanes de paysans desquelles s'échappent des volutes de fumée depuis les cheminées, il n'y a aucune trace de vie humaine devant moi. La nature semble reine ici, et je me sens soudain si petit face à son immensité.

— On va devoir chevaucher de nuit, ça te convient ? m'interroge Oriana en me tendant une gourde que j'accepte volontiers.

Tout en dévissant le bouchon, je réponds :

— Moi, ça ne me pose pas de problème. Mais les chevaux, comment vont-ils faire ?

Elle me répond en ouvrant le sac qui pend en bandoulière sur son épaule pour en sortir un orbe noir de la taille d'un poing.

— Un luminol, soufflé-je en me penchant vers l'objet pour mieux l'observer.

— Exactement, me confirme mon instructrice.

Les luminols sont de petites sphères de lumière chargées de puissance magique. Elles sont très complexes à fabriquer et seuls quelques mages chevronnés sont capables d'accomplir une telle prouesse, ce qui rend ces objets extrêmement chers. Je savais que mon père en avait acheté une quantité non négligeable pour équiper l'armée, mais je n'avais aucune idée que l'HURGE en possédait.

— Avec ça, les chevaux n'auront aucun mal à se guider, poursuit-elle tandis que je porte la gourde à ma bouche, savourant l'eau fraîche qui s'écoule entre mes lèvres. Par contre, ça risque d'attirer les créatures en tous genres. Loups, stryges, hippogriffes, ... Si on veut atteindre le camp en un seul morceau, il va falloir aller vite.

L'évocation de toutes ces menaces me serre la gorge, et je rabaisse la gourde, incapable de boire une goutte de plus. J'ai déjà vu chacun des animaux qu'elle a cités, mais dans des cages au cirque ou au zoo. Pas en pleine nature, à l'état sauvage. Je n'ai même pas d'arme pour me défendre en cas d'attaque.

— Comment pourrais-je me défendre sans épée ?

Oriana pousse un ricanement tout en secouant la tête, visiblement aussi amusée qu'affligée par mon interrogation.

— Si une bête sauvage t'attaque, avec ou sans épée, elle t'aura tué avant même que tu puisses réagir.

J'écarquille les yeux. Je n'aurais jamais dû poser cette question.

— Ne traînons pas, ajoute-t-elle en se relevant de sa souche. Il nous reste au moins deux heures de trajet jusqu'au camp. Alors, nourris ta monture et on se remet en route.

Elle glisse une main dans sa besace pour en sortir une pomme, qu'elle me lance d'un geste assuré. Ma réception l'est beaucoup moins, et je manque de laisser le fruit dévaler la paroi de roche escarpée derrière moi.

— T'as encore du boulot, marmonne-t-elle avec un sourire moqueur.

Une nouvelle fois, j'ai envie de la rappeler à l'ordre pour son insolence. Je me ravise toutefois en me rappelant que je suis bien loin du palais, et qu'elle est la seule personne capable de me conduire en lieu sûr. Alors, elle pourrait bien me traiter de tous les noms, je ne compte aucunement me la mettre à dos.

Timothy - La naissance d'un guerrierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant