Chapitre 9

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— Debout, le nouveau ! résonne une voix féminine quelque peu criarde alors que je sors doucement de ma torpeur.

— Le prince... ricane une voix rauque à côté d'elle.

J'ouvre les yeux, ébloui par les rayons du soleil à travers les vitres. Il me faut quelques secondes pour me rendre compte que je ne suis pas dans mon grand lit à baldaquin, mais dans un petit lit une place au matelas relativement mou, que l'arôme de lavande qui embaume habituellement ma chambre a laissé place à une odeur mêlant les pieds et la sueur. Je ne suis pas dans ma grande chambre du palais. Je suis au camp de l'HURGE.

Tournant la tête pour regarder le reste de la pièce, je vois la jeune fille et le garçon grassouillet sortir du dortoir, riant ensemble en me jetant des petits regards de travers.

— Ne fais pas gaffe à eux, m'interpelle une douce voix masculine sur ma gauche.

Il s'agit du jeune garçon auquel il manque un bras, qui m'adresse un timide sourire. Ses cheveux bruns sont totalement ébouriffés au-dessus de sa tête, chaque mèche partant dans une direction différente, tandis que ses yeux bleus mi-clos marqués par la fatigue ne font qu'accentuer son aspect chétif et fragile.

— Moi, c'est Gaston, se présente-t-il en me tendant son bras gauche.

— Timothy, indiqué-je simplement en lui serrant la main.

J'imagine qu'il sait très bien qui je suis, de toute façon.

Entre nous deux, le lit qui appartient au beau jeune homme à la peau ébène est vide et déjà soigneusement refait. Si je n'avais pas vu son occupant dormir dedans il y a quelques heures, j'aurais sûrement cru qu'il était resté inoccupé.

Le reste du dortoir est vide aussi, mais la rangée de lit qui nous fait face est toujours en désordre, des draps s'échappant de tous les côtés des trois couchettes.

— Tu es arrivé dans la nuit ? me demande Gaston. Je n'ai rien entendu.

— Oui, vers minuit, confirmé-je. Mais j'ai essayé de ne pas faire de bruit quand j'ai vu que tout le monde dormait.

— Ouais, on se couche tôt ici généralement. Pas plus tard que vingt-deux heures, sauf quand on est de garde, une fois par semaine. Là, on doit veiller toute la nuit sur les remparts.

— Toute la nuit ? répété-je, les yeux écarquillés.

— Ouais, mais on est en repos le lendemain, donc c'est pas si terrible, ajoute-t-il en haussant les épaules avant de jeter un coup d'œil à sa montre. Il faut qu'on se dépêche si on veut pouvoir prendre le petit-déj. Le service se termine à huit heures.

D'un coup d'œil à ma montre, je constate qu'il est sept heures quarante-cinq.

— Tu sais où se trouve le réfectoire ? me demande-t-il, visiblement soucieux de m'aider.

Je ne peux pas me sortir de la tête qu'il fait tout ça simplement parce que je suis le prince du royaume et qu'il pense qu'en devenant mon ami, il pourra profiter de mon statut. Les gens ne sont jamais gentils gratuitement, il y a toujours une contrepartie.

Mais puisque je ne sais absolument pas où se trouve quoi que ce soit, ni comment s'organisent les journées ici, je vais avoir besoin de son aide moi aussi.

— Je n'en ai aucune idée, avoué-je.

— Suis-moi, me propose-t-il avec un grand sourire en bondissant de sa couchette.

Je prends le temps de sortir des vêtements propres de la malle au pied de mon lit et, une fois ceux-ci enfilés, nous quittons la caserne d'un pas déterminé.

Timothy - La naissance d'un guerrierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant