Chapitre 10

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Moi, je suis né dans la faute, j'étais pécheur dès le sein de ma mère.
- Psaume 50 :7 -

Quelques jours plus tard, cette information ne cessa toujours pas de saturer mes pensées. Inconsciemment, je m'étais légèrement éloigné de Loïs, refusant nos rendez-vous après les cours sous prétexte que j'avais mal au ventre, à la tête ou que mes parents voulaient que je rentre plus tôt. Des mensonges.

Et il le savait. Je n'arrivais pas à agir comme si de rien n'était, comme si je n'étais pas à la fois offusqué, blessé, jaloux, gêné, mort de trouille. Tout ça en même temps. C'était vraiment la pagaille dans ma tête.

Je n'écoutais plus en cours et je n'avais plus l'énergie de sourire aux blagues de mes amis, encore moins celles d'Arnaud, qui ne me lâchait pas d'une semelle. Sans doute avait-il remarqué mon humeur préoccupée.

Ce jour-là, à la fin des cours, mon meilleur ami me prit à part et me proposa de venir réellement chez lui le soir pour discuter de ce qui n'allait pas. Son inquiétude était palpable et j'avais donc accepté, conscient que j'avais besoin de me confier.

Lorsque j'annonçai à Loïs qu'encore une fois, je repoussais notre moment ensemble pour aller chez Arnaud, ses yeux sombres scintillèrent d'une lueur colérique. Et blessé.

Installé dans le bus aux côtés d'Arnaud, je regardai mon italien descendre à son arrêt, les épaules voutées. Habillé d'une énorme doudoune gris foncé, je ne pouvais apprécier sa carrure, mais je la savais cachée par toute cette masse de tissus. Je repensais alors à nos douces étreintes lorsqu'il m'enveloppait de ses bras et mon cœur palpita plus rapidement.

Je me devais de mettre de l'ordre dans mes pensées, au risque de le perdre.

Quelques minutes plus tard, ce fut à notre tour, avec Arnaud, de descendre du bus pour rejoindre sa maison. Le froid en cette fin janvier piquait ma peau violemment, j'étais toujours frigorifié, même affublé de mes meilleures parkas.

Arnaud me devança pour longer le trottoir et les divers immeubles du quartier. Leur façade était d'un beige terne, les traces d'eau longeaient les arrêtes et tous les volets semblait être peint dans une teinte terne. Notre village était assez triste en hiver.

Pour arriver à la maison de mon ami, il fallait sillonner plusieurs rues, jusqu'à ce que quelques maisons se détachent des immeubles.

Une fois chez lui, la chaleur de son intérieur m'enveloppa instantanément dans un cocon à la riche odeur du bois de santal. Eline adorait ce parfum et toutes les pièces en étaient gorgées.

Arnaud lâcha son sac, son manteau et ses chaussures dans son entrée et j'en fis autant lorsque Eline apparut, tout sourire et nous salua avant de nous laisser tranquille.

En moins de temps qu'il n'en fallait pour que je rejoigne le canapé beige recouvert de plaid, Arnaud s'installa à côté, déposant nos verres de Coca et des biscuits sur la table basse en verre.

—    Allez, vas-y, raconte-moi tout, mec.

Il enfourna une galette chocolatée dans la bouche, son regard vert marron indéfinissable fixé sur moi.

—    C'est compliqué.

—    Hum-hum, as de ah aek oi.

—    Quoi ? ricanai-je.

Arnaud s'efforça de mâcher plus vite et d'avaler avant de réessayer :

—    Pas de ça avec moi. Je veux tous les détails.

Après un soupir énorme qui libéra un nœud dans mon ventre, je m'affaissai dans le canapé et commençai à parler :

—    La dernière fois, quand j'étais chez Loïs, on a... c'est devenu un peu...

Entre NousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant