Chapitre 21

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On ne force pas le secret. Ou le secret vient comme de lui-même à soi, ou bien il vous est interdit.
- De Victor-Lévy Beaulieu –

Eliott

Sa bouche s'écrasa sur la mienne et me prit de court.

Sous le choc de cette initiative, je mis plusieurs secondes avant de réagir. Les lèvres fines et doucereuse de Loïs caressaient les miennes, stimulant ma bouche jusqu'à ce qu'elle réponde à ce baiser.

Cela n'avait rien de lent ou romantique, c'était plutôt un baiser désespéré et hésitant. Désordonné. Peut-être même qu'il n'y eut aucune vraie connexion dans cet échange. Pour ma part, j'étais trop perdu dans ce brouillard de surprise et j'agissais simplement par automatisme, ce fut donc mécanique. Et pourtant...

Lorsque Loïs s'écarta, mon cœur était sur le point d'éclater.

Loïs venait de m'embrasser.

Il me fixa de ses yeux sombres, la lueur du plafonnier créant des petites étoiles dans ses prunelles. J'en étais captivé. L'espoir qui m'animait et que je m'étais évertué à repousser commença à imprégner chaque cellule de mon être.

Ce fut comme si une vague chaude et réconfortante m'enveloppait de toute part. Loïs m'avait embrassé et j'en étais complètement sonné. Bouleversé. En toute logique, je devrais prendre ce geste comme un signe évident de ses intentions, seulement... c'était si compliqué.

—    Pourquoi ? soufflai-je simplement.

—    Pourquoi je t'ai embrassé, ou...

Il n'acheva pas sa phrase, mais ma tête le fit pour lui. Pourquoi tu as arrêté de me parler, pourquoi tu m'as laissé m'éloigner davantage, pourquoi tu n'es pas revenu vers moi une fois sur Grenoble... J'avais tellement de pourquoi.

—    Commençons par le plus facile. Pourquoi tu m'as embrassé ?

—    Facile, ricana-t-il en fourrant sa main dans ses mèches brunes. Rien n'est facile dans tout ça.

—    Je sais, murmurai-je.

—    J'en avais envie, Eliott. Te revoir, ça a réveillé tout ce que je...

—    Tout ce que tu quoi ? insistai-je.

Loïs détourna le regard et alla chercher d'autres bières. La sienne se vida à moitié en quelques gorgées tandis qu'il restait debout, appuyé contre le buffet.

—    Je t'en ai beaucoup voulu de partir du jour au lendemain sans rien me dire avant. De me laisser là-bas alors que j'étais fou amoureux, expliqua-t-il doucement, sans jamais me regarder.

Je serrai les dents, conscient que je n'avais pas à intervenir dans ce déballage émotionnel. Il en avait besoin et j'avais besoin de l'entendre également.

—    Cette nuit-là, j'ai pris conscience que je n'étais pas suffisant pour toi. Et avant que tu ne protestes, nous savons que c'est vrai, même si c'est cruel.

Son regard sombre se posa enfin sur moi et j'y lus toute la douleur d'un cœur brisé accumulée toutes ces années.

—    La peur te dirigeait et tu étais plus terrifié à l'idée de rester auprès de tes parents que tu n'étais amoureux de moi. Je ne comprenais pas ça, j'étais jeune et je... je ne réalisais pas à quel point tu souffrais.

—    Loïs... j'étais amoureux de toi, vraiment, assurai-je, la gorge serrée.

—    Je sais, oui. Mais ce n'était pas assez et tout ce que j'essaie de dire, c'est que j'ai été brisé par cette constatation. Je t'en voulais, j'étais en colère et profondément triste. J'ai simplement pensé qu'il fallait arrêter de se voiler la face et accepter cette séparation donc... je n'ai plus répondu.

Entre NousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant