Chapitre 33

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La vie est une rose dont chaque pétale est une illusion et chaque épine une réalité.
- Alfred de Musset -

Loïs

—    Mio figlio ! s'écria ma mère en ouvrant la porte d'entrée.

Son sourire éclaira ses yeux noirs et je fus happé par son petit corps pour un câlin de bienvenue.

—    Salut, maman.

—    Qu'il est bon de te revoir, tu nous manquais, rouspéta-t-elle une fois de plus.

—    Qu'entends-je ? Ne serait-ce pas mon petit-fils qui vient enfin nous rendre visite ?

La voix grondante de mon grand-père, Fernand, s'éleva du petit salon à droite. La maison n'avait rien de luxueuse, néanmoins, c'était un foyer chaleureux, décoré par les antiquités de mon nonno et les tissus à motifs de ma nonna.

En parlant du loup, cette dernière apparut au bout du couloir, un tablier de cuisine bleu et un torchon dans les mains. Sa crinière foncée était attachée en chignon, comme chaque jour que Dieu faisait.

—    Allez, va vite saluer ta grand-mère, elle trépigne, chuchota judicieusement ma mère en récupérant mon manteau.

Sans attendre, je fonçai vers nonna pour la prendre dans mes bras. Elle grogna en italien, protestant sur le mauvais petit-fils que j'étais pour ne pas être venu à Noël et aucun jour depuis. Après avoir suffisamment râlé et inspecté mon allure, j'eus le droit de rejoindre mon grand-père sur le canapé. Celui-ci ne fut pas en reste niveau réprimande, mais venant de lui, tout était mascarade, il le faisait pour imiter l'exagération de sa femme, en bon farceur qu'il était.

Le café apparut sur la petite table basse en bois massif et, tout à coup, je m'aperçus de mon impair. Je relevai les yeux sur ma mère qui me sourit tendrement en secouant la tête.

—    Tu as oublié, je sais. Heureusement que ta grand-mère pense à tout, indiqua-t-elle.

Et en effet, nonna pensait à tout. Un tiramisu ainsi que plusieurs paniers de nombreux biscuits secs s'éparpillèrent sous mes yeux.

Rapidement, la conversation s'anima autour de mon absence, de mes activités et de ce que j'avais bien pu faire de si intéressant pour ne pas avoir le temps de venir ici.

Lorsque les grands évènements m'eurent été transmis, comme la nouvelle lubie de mon grand-père pour la mosaïque, la nouvelle cuisinière de nonna, nécessaire après la mort de l'ancienne au bout de vingt-cinq ans de service ou encore l'essai capillaire de ma mère le mois dernier qui avait eu envie de faire plus « rock » en décrivant un brun acajou... Je n'osais lui dire que le rouge aurait été qualifié de rock and roll, pas un brun des plus classiques, car derrière ce petit geste, ma mère exprimait une émancipation qu'elle avait perdu en restant toutes ces années auprès de mon paternel.

Finalement, le moment arriva et ma nervosité déposa une pellicule de sueur dans mon dos. Mon annonce n'avait rien d'anodine, j'allais certainement bouleverser toute la maisonnée.

Eliott avait eu l'air mitigé en comprenant que ma famille ne savait pas pour nous, il n'y eut aucun reproche, juste l'implacable vérité, exposée simplement. Je ne me sentais pas coupable de n'avoir rien dit, mes raisons étaient valables, cependant, il était temps de tout dévoiler.

—    Loïs ? m'appela mamma. Tu t'es perdu dans tes pensées.

—    Oh, pardon.

—    Qu'as-tu à nous dire, alors ? pressa ma grand-mère.

Entre NousOù les histoires vivent. Découvrez maintenant