Chapitre 40

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Juillet


Elle parlait.

Quand elle commençait, elle pouvait parler des heures entières. Aussi bien qu'elle savait écouter. Et ce soir, elle parlait à nouveau de sa mère.

Assise en tailleur au milieu du lit, elle avait commencé par simplement répondre à une question. Et lui, allongé, la tête sur son oreiller, la main sur son genou, il n'oublierait rien.


- J'étais encore en internat au lycée, je l'ai appelé la veille en la trouvant particulièrement de bonne humeur. Elle me parlait d'aller manger au restaurant le week-end. Je croyais qu'elle allait mieux après un petit passage à vide. Et finalement, le lendemain matin notre voisine l'a trouvé dans sa voiture, dans le parking souterrain. Elle a fait une overdose de médicaments.


Adam ne dit rien pendant qu'elle baissait les yeux pour respirer avant de reprendre.


- On m'a dit qu'elle était très bien habillée. Qu'on aurait pu la croire endormie. Que parfois les gens qui se suicident pensent à ce genre de détail pour ne pas choquer ceux qui les trouvent... comme s'ils ne pensaient pas que la mort était traumatisante, même bien habillée.


Elle posa sa main sur la sienne et en caressa le dos.


- Au début j'ai pas compris pourquoi elle avait fait ça dans la voiture... mais je crois qu'elle à pensé à moi, à ne pas rendre notre appartement invivable, à ne pas m'obliger à la trouver moi-même. C'est là qu'on se rend compte que la réflexion des gens qui souffrent à ce point ne va jamais assez loin.

- Pourquoi ?

- J'ai plus jamais pu vivre dans notre appartement... il n'était pas à moi, elle n'avait pas fini de le payer alors il fallait rembourser nos dettes. Et puis payer les obsèques, et trouver un endroit où vivre, travailler, laisser tomber la vie de gamine et grandir tout d'un coup alors...


Il la sentit s'essouffler.


- Où est-ce que tu as vécu après ?

- Chez Myriam et Imani. Leurs parents se sont occupés de moi pendant des mois comme si j'étais leur fille aussi. Mais je me sentais pas bien chez eux avec tout ce qu'il se passait avec Imani. Me voir souffrir comme ça l'a fait s'éloigner davantage.

- Et après ?

- J'ai pas fini ma dernière année, sans surprise, j'avais pas la tête à ça. J'ai commencé à travailler, dans n'importe quoi, là où on voulait bien de moi vu que j'avais même pas le bac. Je me suis trouvée un appartement minuscule où on ne pouvait pas tenir à deux et puis voilà, j'ai continué...

- J'aurais voulu te trouver à cette époque... pour veiller sur toi.

- Surtout pas, dit-elle en venant s'allonger près de lui, sur le ventre. Je t'aurai manqué, j'étais trop aveuglée par tout ce qu'il se passait à l'époque, j'aurai manqué ma chance.


Il sourit, elle parlait enfin. Et elle disait de si belles choses.


- Le timing est parfait, je ne veux rien changer.


Après un silence doux et deux corps qui se rapprochèrent avant de s'endormir :


- Tu as acheté un maillot de bain alors ?


Elle gloussa un peu en sachant que la réponse allait légèrement le décevoir.


- J'en ai un.

- Mince... je dois annuler tellement choses dans ma tête là.

- C'est un deux pièces, tu en verras plus qu'il n'en cache.


Il la serra par la taille et murmura très bas :


-J'ai vraiment hâte de partir avec vous deux.

- Moi aussi.

Celle qu'il aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant