Celle qu'il aime

Chapitre 9

Décembre

Imani regardait son ex la rejoindre elle et Myriam dans la queue devant la boîte en se demandant comment allait finir cette soirée. Alice était tellement belle qu'elle eut du mal à jouer la carte de l'indifférence devant sa sœur.

- Alice, viens on est là ! cria Myriam en levant la main.

Cette dernière trottina pour traverser la rue perchée sur ses talons. En arrivant à hauteur de ses amies elle redescendit un peu le bas de sa robe qui avait tendance à remonter quand elle marchait. Pourquoi avait-elle voulu à ce point être apprêtée ce soir, elle avait l'impression d'en faire trop ! En plus, encore une fois, il n'était ni dans le bar, ni chez lui alors à quoi bon ?

Elle croisa le regard d'Imani qui lui sourit sans cacher qu'elle aimait ce qu'elle voyait, Alice se sentit un peu idiote. Est-ce qu'elle pensait que c'était pour elle ? C'était bien son genre de se mettre ça en tête.

Dans la file, Myriam reconnu deux filles qu'elle avait côtoyé pendant ses études et les entraîna toutes les trois dans la queue pour les rejoindre malgré les râles agacés de ceux qui se retrouvaient derrière elles. C'était le genre de choses qui mettait Alice mal à l'aise mais elle n'en montra rien, se contentant d'éviter le regard des gens mécontents. Et quand enfin vint leur tour d'entrer, elle se retrouva plongée dans l'ambiance enfumée et bruyante qu'elle ne se voyait pas supporter toute la soirée.

Déjà, Imani s'aventurait à poser son bras autour de sa taille pour la guider jusqu'à une table comme si Alice n'était pas capable de trouver le chemin toute seule. Une fois assise sur la banquette, Alice se retrouva coincée entre son ex et sa meilleure amie et sentit que le temps allait être long.

...

La veille, Imani était venue chez elle. Alice avait été si amoureuse de cette femme, pendant si longtemps. Et depuis, elle devait bien admettre qu'elle gardait une certaine emprise sur elle. Parce qu'elle maîtrisait parfaitement l'équilibre entre le chaud et le froid, parce qu'elle donnait juste assez pour qu'elle ne meurt pas de soif mais jamais trop pour ne pas l'enivrer complètement.

Pourtant hier, en ouvrant sa porte sur celle à qui elle avait dit de passer pour tromper sa solitude après ses nombreux sms, elle n'avait pas ressenti ce à quoi elle s'attendait.

C'était toujours la même beauté sombre au visage fermé qui donnait envie de tout donner pour obtenir un sourire, un seul. Mais quand elle s'était penchée sur elle du haut de son mètre quatre-vingt, elle n'avait trouvé que les lèvres closes d'Alice.

Alice qui avait tourné la tête en se demandant ce qui lui prenait ? Elles se voyaient toujours comme ça, juste pour se voir quand Imani descendait parfois. Comme pour remettre un peu de paille sur d'anciennes braises qui ne s'éteignaient jamais.

Pourtant, pas de flamme ce soir là.

- Tu as quelqu'un ? s'enquit Imani en s'installant dans le canapé.

Pourquoi aurait-elle refusé sinon ?

- Non, personne.

Imani se sentit blessée dans son égo, c'était un vrai non alors ?

- J'ai quelqu'un, confiait alors la jeune femme en posant sa tête contre son poing.

- T'es pas croyable, qu'est-ce que tu fous là alors ? s'agaça Alice.

- Pourquoi tu fais tout un plat de la fidélité si tu ne restes jamais avec personne, en quoi la fidélité des autres te concerne ?

- Tu n'as aucune leçon à me faire sur la fidélité. Pourquoi tu fais ça à cette fille ?

- C'est récent, rien de sérieux.

- Assez pour que tu m'en parles, rétorqua Alice en montant ses pieds dans le canapé.

- Je veux peut-être juste voir si tu es jalouse ?

- Je le suis pas.

- Qu'est-ce qu'on fait du coup ? J'ai pas pris les clés, je pensais rester toute la nuit, je suis renfermée dehors maintenant.

- Je te laisse le canapé.

- T'es sérieuse ?

- Très.

Alice n'avait jamais été si dure avec elle. Jamais. Comment avait-elle fait ? Pourquoi maintenant ? Si elle avait su que la dernière fois était ...la dernière fois.

- Alors ça y est, t'as décroché ?

- Depuis longtemps, tu le sais.

- Pas si longtemps.

- Tu veux vraiment raviver les mauvais souvenirs ce soir alors que c'est moi qui décide si tu dors dehors ou pas ?

- On a surtout de bons souvenirs, non ?

- Je suis sûre que toi oui, mais les miens...

- Je t'en prie, commença Imani en levant les yeux au ciel.

- Tu sais, personne ne peut devenir aussi accro que moi je l'étais sans souffrir. C'était pas par amour que je m'accrochais, c'était pas ça.

Imani s'étala sur le dos, la tête sur l'accoudoir. Elle ne voulait pas entendre qu'elle ne l'avait pas vraiment aimé, pas encore.

- On aurait pu avoir une conversation bien plus agréable si t'avais été d'humeur.

- Je suis contente de te voir et que ça ne me fasse rien, je dis pas ça pour te blesser.

- Je sais, je comprends.

Mais elle détestait l'entendre.

- Parle moi de cette fille, conclut Alice.