Crush

P1 / Chapitre 12

Il lui avait laissé ses clés la veille et avait remonté l'allée à pied dans la nuit noire. Florian appréhendait cette fête surprise, plus si surprise, qui l'attendait. Elle était prévue le 13, le jour de son anniversaire. Quelque part il était content d'avoir découvert leur plan, il pouvait s'y préparer. Lui qui détestait se retrouver au centre de l'attention, même si c'était un comble vue sa profession.

Dans son lit, comme souvent, il eut du mal à trouver le sommeil. Cette fois, contrairement à ses habitudes, il ne ressassait pas toutes les pensées négatives qui l'avaient suivi toute la journée. Il revoyait le sourire de Margot, ses lèvres se tordre quand elle s'était mordue la joue.

La main sur ses yeux, l'autre sur son ventre chaud, il tenta de réfréner ses idées. Elle venait tout juste de rentrer, tout juste de divorcer, tout juste de tout recommencer. Il devait absolument la sortir de sa tête.

Peut-être qu'elle le hantait par nostalgie, comme un fantôme du passé venu lui rappeler tout ce qui lui manquait tant ? Peut-être qu'il aimait ce qu'elle représentait, l'époque où il l'avait connue ?

En faisant des efforts, il pourrait s'en convaincre. Et nier que c'était surtout simplement elle, Margot, que personne, lui comme 10 Millions d'inconnus, n'avaient jamais su oublier.

...

L'appartement était juste assez grand, ni trop ni pas assez. Il avait du charme et pouvait l'accueillir immédiatement. Le propriétaire lui proposait déjà d'emménager à la fin de la semaine suivante. Mais Margot lui demanda si elle pouvait prendre le temps de réfléchir, quitte à laisser l'occasion passer. En arrivant elle s'était crue pressée de quitter la maison de sa sœur, de prendre son envol et vivre seule. Et puis, sans se l'expliquer, elle avait paniqué. C'était trop rapide. Elle se sentait bien chez David et Fanny, et ça faisait longtemps que ce n'était plus arrivé.

En sortant du bâtiment, marchant sur le trottoir pour rejoindre sa voiture, elle appela Fanny qui voulait avoir des nouvelles.

- Alors ?

- Je l'ai pas eu, mentit la jeune femme. Quelqu'un a été plus rapide.

- Mince ! Il avait l'air beau sur les photos.

- Tu vas devoir me supporter encore un peu...

- J'adore t'avoir avec moi Margot, reste autant que tu veux.

- J'ai repéré d'autres appart, je vais appeler et voir si je peux en visiter cette semaine.

- Prends ton temps pour trouver l'appart parfait !

Margot fut soulagée qu'elle ne lui mette pas la pression, et culpabilisa un peu moins pour son mensonge. Visiblement aucune des deux n'était prête à s'éloigner de l'autre.

- Par contre je vais me dépêcher de me trouver une voiture.

- D'ailleurs t'as pas pris le vélo ?

- Florian m'a prêté sa voiture.

Justement, elle en ouvrait la portière pour s'installer derrière le volant. L'habitacle sentait le parfum du jeune homme, déjà ce matin ça l'avait troublée.

- C'est super gentil de sa part ça !

- Mais c'est un gentil garçon, tu le sais, plaisanta Margot.

- C'est plus un garçon, tu l'as remarqué ? C'est un grand et beau et célibataire jeune homme de 25 ans, c'est presque trente ans quand on y pense...

- À quoi tu joues ?

Fanny n'était pas sûre de pouvoir plaisanter avec ça. Après les épreuves par lesquelles était passée sa sœur. Pensait-elle à l'après ? À rencontrer quelqu'un et retenter sa chance ? À Florian ?

Pour la dernière question, elle était à 99 % certaine d'avoir la réponse au vu des regards qu'ils s'échangeaient la veille. Mais s'en étaient-ils rendus compte eux-mêmes ?

- Je dis juste qu'il n'a plus 15 ans.

- Je suis là depuis moins d'une semaine et tu veux déjà me remarier, lança Margot en baissant la tête sur son pouce qui grattait les petites peaux autour de l'ongle de son index.

Tant que tout restait enfermé dans sa tête, elle pouvait gérer. Mais en parler la rendait nerveuse.

- C'est vraiment un ange tu sais, le fréquenter ne peut que te faire du bien. Peu importe la relation que tu as avec lui. Mais... il est ma famille aussi.

- Pourquoi on parle de ça, nia Margot, y'a rien entre Florian et moi. C'est mon ami parce qu'il fait partie de ta vie, rien de plus.

- Ok, tu rentres là ?

- Je vais traîner un peu et faire le plein d'essence avant.

- Je te rejoins cet aprem si tu veux et on fait les magasins ?

- Tu m'en veux si je dis non ?

- Non.

- À plus tard ?

- On se voit plus tard, confirma Fanny.

Puis elle posa le téléphone sur son bureau en se reconcentrant sur son écran d'ordinateur.

- Ne joue pas les entremetteuses, lança David qui avait tout entendu depuis la cuisine.

- Je...

- Karine, Ninon, Victoire...

Commença-t-il à énumérer en découpant du concombre.

- Ok ok, mais il est resté presque deux ans avec Karine.

- Un jour toi, comme ma mère, vous serez bien obligées de le laisser vivre sa vie. Il est en train de s'éloigner de nous, si vous l'aviez pas remarquer.

- Je sais, je le vois.

- Et puis, au lieu de t'occuper des histoires de mon petit frère avec ta grande sœur, viens manger en tête à tête avec moi, on est plus jamais seuls tous les deux !

Elle pivota sa chaise pour lui faire face, souriante. Ils s'étaient dit que cette pause que voulait Florian était une bonne occasion de s'en accorder une aussi. Mais elle avait du mal à décrocher.