Chapitre 29

114 13 0
                                    

Héloïse


Je lâche malgré moi la main de Kayleigh quand la porte s'ouvre, me tenant prête à me défendre. Je la regarde marcher timidement. Elle s'est faite jolie, s'est coiffée et maquillée, mais cela ne m'atteint pas. Je suis un mur de glace et de l'acide coule dans mes veines. Je vois qu'elle veut me toucher, me prendre la main, m'enlacer ou m'embrasser, mais elle reste prudemment à distance en voyant mon visage fermé. Je vois son regard se poser sur Kayleigh, j'y lis le jugement. Je me promets de l'égorger si elle prononce ne serait-ce qu'une parole blessante. Je suis prête à lui arracher le cœur avec le coupe-papier que j'ai repéré sur le bureau du juge.

« Bonjour, mon ange, c'est maman. »

Je ne t'ai pas oublié, ordure.

« Tu as changé, tu as l'air en pleine forme, Hélo », sourit-elle.

Pas grâce à toi.

Elle regarde le juge alors que je reste silencieuse, la fixant d'un regard éteint.

« Tu ne dis rien, mon ange ? » chuchote-t-elle en approchant sa main.

« Tu es dans mon espace vital, tu m'agresses, recule ! »

Ma mère s'arrête, surprise par la dureté de mes mots.

« Je veux que tu viennes vivre avec moi, mon ange. J'ai trouvé un beau petit appartement, nous serons bien, tu verras. »

Je ne dis rien, mais je retire ma veste, puis mon soutien-gorge. La secrétaire qui prend l'entretien en note hoquette en voyant mon corps meurtri alors que je tourne sur moi-même.

« Tu veux finir le travail ? Il y a encore des endroits où tu n'as pas laissé ta marque !

— Pardon, mon ange, j'étais malade, mais je suis guérie maintenant. Je m'excuse de t'avoir fait souffrir. Peux-tu pardonner à ta maman ? »

Kayleigh repose ma veste sur moi, je vois le regard de ma mère, elle n'a pas changé, cette lueur, je ne l'ai que trop vue.

« Tu n'es pas ma mère, je n'ai plus de mère.

— Tu m'as remplacé par elle, c'est ça ? »

Elle.

« Elle, comme tu dis, ne m'a jamais frappé, ne m'a pas torturée. Elle, comme tu dis, m'a sauvé la vie alors que j'étais en train de mourir. T'es-tu seulement inquiété de savoir où j'étais depuis plus d'un an ? Je vivais dans la rue, comme une clocharde ! Elle, comme tu dis, m'a tendu la main alors que je pensais mettre fin à ma vie. Elle, comme tu dis, m'a donné l'affection dont j'avais besoin pour réapprendre à vivre. Elle, comme tu dis, a été plus une mère pour moi que tu ne l'as jamais été ! Alors tu vas signer ce putain de papier et tu vas me laisser vivre. S'il existe une seule loi qui m'oblige à retourner vivre avec toi, je te jure que je te rendrais toutes les souffrances que tu m'as infligées. Je commencerai par te couper la langue pour ne plus entendre tes mensonges. J'ai vu ton regard quand tu as regardé Kayleigh, tu es exactement la même, tu n'as absolument pas changé. Tu joues un numéro devant le juge, mais tu ne peux pas le jouer devant moi ! »

Je me retourne et fixe le juge, je veux faire baisser la colère qui est en moi, mais je n'y arrive pas, je sais que si j'ouvre la bouche, cela va se retourner contre moi.

« Tenez, Monsieur le Juge, la demande d'émancipation », dit la secrétaire en tendant un document.

« Madame Gagnon, vous avez quelque chose à dire ? » demande le juge.

« C'est ma putain de fille ! Je veux la récupérer. Je ne signerais jamais cette merde !

— Bien, je le ferais pour vous, étant donné que j'ai des raisons de croire que sa santé est en danger à vos côtés.

Cupidon ne doit plus avoir de flèches ou il ne m'a jamais vue !Où les histoires vivent. Découvrez maintenant