XVI

14 3 0
                                    

- C'est quoi ces chiffres tatoués sous ton sein?

- Ah ça? Rien... Parlons d'autres choses...  Dis-je sur un ton froid et distant.

- Tu recommences... De toute façon c'est comme tu veux.

- Soit pas fâché Joon s'il-te-plaît.

Je sortis du lit et me dirigeai vers la salle d'eau. Ça fait quelques temps qu'on se voit moi et Ada. Elle m'a dit vouloir m'utiliser pour découvrir ce qu'elle est réellement. Par là, j'ai compris qu'elle remet en question son asexualité. Pour ma part, j'aime tout simplement lui faire l'amour. Elle avait quelque chose que les autres femmes avec lesquelles j'ai couché n'ont pas. Mais pour une raison que j'ignore, il y a des endroits de son corps qu'elle m'empêche de toucher et elle se retracte quand je désire aborder certains sujets, notamment celui de la famille et plus particulièrement son père. C'est pareil de mon côté, mais tout de même ça m'irrite d'une certaine façon.

- Joon?

- Qu'est-ce que tu veux?

- Rien, oublie! Je m'arrache!

Elle rassembla ses affaires, se rhabilla et claqua la porte derrière elle comme une furie. Elle est partie mais c'est pas plus mal comme ça. Parfois, je ne la comprends pas. C'est vrai que notre relation est purement sexuelle et intéressée, mais tout de même... Je crois que c'est parce que je n'arrive pas à faire tomber sa carapace. De toute façon, j'ai d'autres chats à fouetter: je dois rendre mon rapport à ce psychopathe de Rhoades et Ilda m'attends au Ruler le soir. Avant qu'Ada ne vienne passer la nuit chez moi hier, j'avais appelé Irène, pour qu'elle m'envoie les dossiers des épidémiologistes et des infectiologues qui avaient travaillé pour le compte de Blue Soil ici, sur le continent rouge.

Je sortis de la douche sans m'essuyer et m'assis dans le lit, nu, avec une serviette sur la tête. Je pris mon ordinateur et effectivement, j'avais reçu les documents: merci à mes charmes et à Irène d'être aussi influençable. J'épluchai les dossiers un à un pendant des heures avant de tomber sur le dossier de l'un d'entre eux qui a retenu mon attention. Emile Stark, ayant travaillé pour le compte des dominants avant d'être envoyé à Red Soil. Il aurait travaillé à la fabrication du vaccin actuel. "Pourquoi se séparer d'un médecin avec un profil comme le sien?" me dis-je. En examinant plus soigneusement son dossier, j'ai découvert qu'il est mort il y a huit ans dans des conditions étranges, quelques années après sa femme et sa fille cadette. Il a eu deux filles pourtant, qu'est devenue l'aînée? Il n'y a aucune trace d'elle après la mort de son père, comme si elle fuyait quelque chose. Ou peut-être la fièvre noire l'a elle aussi emportée, comme sa mère et sa sœur? Au moins il y a son ancienne adresse, je vais y faire un saut dès que possible.

Il est l'heure d'aller au club. Je m'habillai pour foncer dans l'entre de La Rouge. Lorsque je descendis les marches de mon immeuble, le temps pour moi de prendre la rue à ma droite, une voiture noire se gara devant moi. La vitre se baissa et je vis Nigel Rhoades me faire signe de monter. Je m'exécutai malgré moi lorsque je le vis esquisser un rictus moqueur face à ma bouderie, le salaud! Et en plus il se fout de moi!

- Je t'ai manqué je sais.

Je ne dis mot.

- Je t'écoute. Dit-il sur un ton plus ferme que précédemment.

- Je suis la piste d'un médecin qui travaillait pour Blue Soil. Il serait mort dans des conditions suspectes. Il a apparemment travaillé sur l'élaboration du vaccin contre la fièvre. Je voudrais creuser un peu plus sur les circonstances de sa disparition, lui et sa famille.

- Tu parles d'Emile Stark.

- Vous le connaissez?

- C'est moi qui pose les questions. Fais ce qui te plaira, mais tu as intérêt à trouver quelque chose étant donné que tu as décidé de t'arrêter sur les traces d'un mort. Ce sera tout.

En démarrant pour s'en aller, la voiture souleva un nuage de poussière que j'avalai malgré moi; incident qui ne manqua pas de me faire jurer par tous les noms.

Arrivé au Ruler, j'allai dans les vestiaires pour me changer avant de monter sur scène quand Chiaki entra dans la pièce sans se soucier de notre intimité. On est stripteasers c'est vrai, mais... et puis on est juste de la marchandise comme on se charge de nous le rappeler constamment.

- Ilda veut te voir N-J.

La nouvelle me surprit un peu, mais bon je me reproche de rien, à moins qu'elle ait découvert que Min m'a couvert deux fois lorsque j'ai quitté le club pendant les heures de travail. Sur le chemin vers le bureau de sa mère quelques étages plus haut, je posai à Chiaki une question qui me trottait dans la tête dernièrement.

- D'où tu connais Ada, vous aviez l'air proches l'autre jour?

- C'est plutôt à moi de te poser cette question. On est amies d'enfance elle et moi. Quelle genre de relation vous entretenez tous les deux?

- Ça te regarde pas.

- Wai c'est ça, à d'autres. Et puis elle est asexuelle, donc ta queue ne te sera pas utile cette fois.

Je pouffai de rire avant de lui dire avec sarcasme:

- Si seulement tu savais.

- Espèce de malappris!

- Chuuut, Ilda n'aime pas qu'on la fasse attendre. Dis-je arrivé à destination avant de refermer la porte du bureau sur son nez.

À l'intérieur, je vis La Rouge assise dans son bureau, la tête en arrière, et grimaçant de temps à autres. Lorsque j'ouvris la bouche pour lui signifier que j'étais là, elle me fit signe du doigt d'attendre. Quelques minutes plus tard, je vis son fils sortir de sous le bureau et remettre son pantalon en place avant de quitter la pièce. Les rumeurs étaient donc vraies.

- Tu as bien travaillé ces derniers mois; grâce à toi, on a plus de visiteurs au club.

Je ne dis mot.

Elle se leva de son siège, alluma sa pipe, s'avança vers moi, me caressa la joue, avant de reposer sa main sur mon épaule et de me cracher la fumée qu'elle avait en bouche sur le visage. Durant la manœuvre, une bretelle de sa robe en dentelle noire tomba et laissa entrevoir son sein, ce qui ne la freina pas dans son élan et elle ne gêna pas pour le cacher. Doucement dans mon oreille, elle me susurra sur un ton presque inintelligible, d'une voix rauque et sensuelle:

- Les sanctions contre toi sont levées et une dernière chose: j'espère que les "accidents" qui te sont arrivés dernièrement ne sont pas de vaines tentatives de ta part pour me quitter. Si c'est bien le cas, souviens toi que j'ai égorgé mon premier mari parce qu'il a refusé de m'acheter une robe que je voulais, sous prétexte qu'il n'avait pas assez d'argent.

The stripteaser Où les histoires vivent. Découvrez maintenant