Pont

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Les humains sont des acteurs, tous autant qu'ils sont. Des acteurs par nature. Des acteurs en ce qu'ils portent constamment des masques. Les gens ne changent pas, ce sont juste les masques qui tombent et ils les revêtent à différentes occasions.

L'état de nature dont Jean-Jacques Rousseau parlait tient la route : instinctivement égoïste et mauvais, la vie en société serait un chaos. Raison pour laquelle les lois ont été créées, dans le but de canaliser les instincts barbares et grégaires de cet animal doté de raison qu'est l'Homme. La bienséance et la politesse donc, font partie de ces règles mises en place pour harmoniser la vie en communauté. Lorsqu'on est en public, on doit être respectueux, courtois pour mettre ses congénères à l'aise, on esquisse de faux sourires, on aide les personnes malades ou âgées en difficultés. Voici présenter le premier masque : celui que l'Homme porte en sortant de chez lui.

Derrière chaque action posée par un être humain, il y a toujours un intérêt caché, une motivation égoïste qui le pousse. Que ce soit un acte de dit bonté, de charité, de violence, de mesquinerie, derrière se trouve toujours une intention de profit pour le protagoniste. La preuve est que faire la cour est en réalité de la manipulation, bonne ou pas je ne sais pas. Ceci étant, l'un fait montre de ruse pour amener l'autre à tomber dans ses filets. Fonder une famille c'est en fait le désir de perpétuer sa lignée, de laisser son empreinte sur terre. Mentir c'est souvent soit pour se protéger ou faire du tort à son semblable. Tuer c'est souvent pour se nourrir, se protéger ou se débarrasser de quelqu'un ou quelque chose qui nous dérange. Ceci est le deuxième masque : celui que l'Homme met quand il veut satisfaire un besoin. Il met toujours en avant l'intérêt général, alors qu'en fait, il ne désire que combler ses propres envies

***

- Tu peux me retrouver à l'adresse que je t'ai envoyé ?

J'ai reçu le message de Joon avec le test de grossesse en main. Je me suis réveillée nauséeuse avec vertiges à l'appui. Juste pour vérifier que ce que je pensais, n'est pas ce à quoi je pense, j'ai pris le kit pour en avoir le cur net. Je venais à peine d'uriner dessus quand mon téléphone vibra. On a tous ce qu'on appelle le sixième sens, et dans le cas échéant, il retentit dans ma tête après avoir lu ce texto. D'habitude, quand j'allais le voir, je ne le disais pas à Mamie, mais cette fois ci, je lui ai laissé un mot sur le pas de sa porte :

" Namjoon m'a donné rendez-vous à cette adresse, je reviens vite. "

En route pour le lieu du rendez-vous sur ma moto, je repensai à nos dernières conversations avec lui. Il m'a posé beaucoup de questions concernant mon père et le Dalya. Quelque chose ne va pas. Je commençai à envisager le pire. Et si le stripteaser était un agent de l'Inquisition ? Ça justifierait certaines choses et après tout, je ne sais presque rien sur lui, ajouter au cadavre que j'ai trouvé chez lui une fois et le fait qu'il est constamment blessé ou battu. Pitié faites que je me trompe...

Arrivée au pub qu'il m'a indiqué, je garai ma bécane et pénétrai à l'intérieur.

- Hey. Dis-je en m'asseyant près de lui.

- Hey, comment tu vas ? Je t'ai pas dérangé j'espère.

- De toute façon c'est tard pour demander. Qu'est-ce qu'il y avait de si urgent ? Ça va ? Tu n'as pas l'air dans ton assiette. On dirait qu'un fantôme te hante.

Et c'est peu dire. Nigel Rhoades est pire qu'un poltergeist. Je ne dors plus depuis plusieurs jours à cause des horreurs que je l'ai vu commettre et ma conscience qui me torture par rapport à la décision que j'ai prise. Ada vient d'entrer dans le pub, magnifique, à couper le souffle comme d'habitude. "Merde Kim Namjoon, t'es le pire déchet de ce continent ! " Me dis-je intérieurement.

- C'est juste que je fais des heures supp au club. Je lui mens.

- Vas-y accouche, qu'est-ce qui se passe ?

- Il y a une de mes clientes qui est hospitalisée actuellement.

- Tu m'as appelée pour parler d'une de tes nombreuses amantes ? T'es sérieux ?

- Ecoute moi juste, s'il-te-plaît.

- Okay.

- Dernièrement son mari a découvert qu'elle le trompait avec moi. On a été obligés d'arrêter de se voir par la force des choses. C'est lui qui a envoyé des hommes me battre et me faire contracter la fièvre quand tu m'as trouvé inconscient devant ta boutique. Sa femme quant à elle a subi de la maltraitance d'ordre psychologique. Jusque-là ça allait, mais dernièrement, il est venu me voir en personne pour me menacer et me faire chanter pour avoir des informations. Et il y a quelques jours, je l'ai vu battre sa femme presque à mort parce qu'elle lui a manqué de respect en public. Cet homme est un des mercenaires de Blue Soil. Dis-je avant de pouffer un petit moqueur.

- Je sais ce que tu dois penser de moi actuellement, et je ne t'en veux pas pour ça. Repris-je.

- Si je comprends bien, tu t'es servi de moi pour obtenir ce dont tu avais besoin depuis le début.

- Désolé, mais mieux vaut que ce soit toi plutôt que moi. Tu n'as quà blâmer ta naïveté, après tout on est à Red Soil ici.

Ce que j'ai lu dans les yeux et sur le visage d'Ada n'était pas de la déception, de la peur ou de la tristesse. Non, j'y ai vu de la pitié à mon égard. Elle avait compris ce à quoi je faisais référence, que je l'avais délibérément piégée en l'invitant à me rejoindre ici, que je savais que ce qu'est le Dalya, qu'elle est en danger de mort, et pourtant, il n'y avait pas de colère dans son regard. Je me suis senti si misérable à ce moment.

Des hommes cagoulés et armés ont surgi et l'ont encerclé. Elle se leva de son plein chef et mis ses mains derrière sa tête. L'un des hommes lui passa les menottes et lui mis un sac de toile sur le visage avant de l'emmener. Elle n'opposa aucune résistance, ne poussa aucun appel à l'aide. Durant toute son arrestation elle me fixait, muette, regard que j'ai essayé de fuir en vain. Elle ne m'a pas insulté, maudit, rien, absolument rien. Quelque part, son attitude m'a fait me sentir plus minable que je ne l'étais déjà. Elle avait eu le courage d'affronter son destin, courage qui m'a fait défaut, non, dont j'ai refusé de faire montre. Après qu'ils eurent embarqué Ada, Rhoades assis dans un coin du pub, se leva, pris son verre et vint me rejoindre au bar.

- Je ne savais pas que tu irais jusqu'au bout mon petit N-J. Tu n'as vraiment aucune essence. Me dit-il avant de me verser son verre de Whisky sur la tête et s'en aller en m'adressant des rires moqueurs.

The stripteaser Où les histoires vivent. Découvrez maintenant