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— Que nous vaut l'agréable surprise de votre visite, Monsieur Pierrez ?

    L'accent hispanique de sa voix résonne avec force dans mes oreilles mais paraît presque comme une berceuse aux yeux de son ton méprisant. Son regard est plongé dans celui de mon meilleur ami, le transperçant de toute part. L'espace d'un instant je crois même la voir froncer les sourcils mais cette vision s'efface aussitôt puisqu'elle arbore un sourire de façade d'une hypocrisie affligeante. L'atmosphère jusqu'à lors si légère se tend et personne n'ose briser le silence lourd qui s'installe. Jonatan soupire, la mâchoire crispée. Pourquoi a-t-il l'air si mal à l'aise ? et pourquoi ne m'a-t-il jamais dit qu'il connaissait une Inès ?

    Finalement, Grégoire brise lui-même le calme en déclarant à la place de mon ami :

— Jonatan Pierrez est venu me présenter celle qui sera notre nouvelle stagiaire jusqu'à la fin du mois de septembre prochain.

    Inès penche alors la tête vers moi et ses prunelles incandescentes ne manquent pas de me couper le souffle.

— Je m'appelle Jessica Evans et je suis...

    A peine ai-je déclaré mon prénom qu'une étrange lueur fait irruption dans son regard saphir.

— Et bien, miss Evans, aviez-vous réellement besoin de votre garde du corps pour venir nous rendre visite ?, persifle-t-elle en croisant les bras devant sa poitrine sans me laisser le temps de finir.

— Je vous demande pardon ?, articulé-je choquée face à son attaque personnelle.

    Comment peut-elle se le permettre ? Le visage crispé, je la toise lourdement. Jonatan se place devant moi après un geste m'intimant de me calmer. Je lui lance un regard interrogateur auquel il répond simplement par un haussement d'épaules.

— Laisse-la Inès, intervient mon ami. C'est pas le moment.

    Déconcertée par la familiarité avec laquelle il s'adresse à elle, je me tourne vers lui. Son regard, emplis de reproches, ne quitte pas la brune une seconde. Il la connaît décidément plus que je ne croyais. Que me cache-t-il encore ? L'interpellée, elle, décroise ses mains et les dépose à l'arrière de son pantalon noir dans un long soupir.

— Pierrez dit vrai Inès, lance enfin Grégoire. Ce n'est pas le moment pour ces règlements de comptes.

    Le rédacteur en chef ajuste sa cravate dans un mouvement las.

— Vous avez raison, répond-elle en s'approchant de son patron.

    Devant lui, elle s'arrête un instant pour lui expliquer plusieurs informations que je n'écoute pas vraiment, trop sidérée par les évènements.

    Un silence s'installe rapidement et je regarde devant moi. Inès est toujours là, agrippée aux bords du bureau sombre. Elle est magnifique malgré son attitude méprisante. Son teint hâlé contraste à merveille avec le blanc de sa chemise et ses longs cheveux châtains obéissent aux courbes de son corps pour tomber sur son dos.

    Sans prévenir, elle tourne la tête vers moi, me capture de ses iris saphirs et si ils ne me semblaient pas si hostiles, je m'y perdrai sans hésiter. Elle passe songeusement sa langue sur sa lèvre inférieure et mes yeux, complètement absorbés, suivent son mouvement sur sa lippe flamboyante avec attention. Finalement, elle rompt le charme, tourne le regard et s'empare d'une pile de dossiers avant de se diriger vers la porte de verre sans un regard dans notre direction.

— Je suis navré pour ce qu'il vient de se passer, Jessica, me dit sincèrement Grégoire en se déplaçant face à moi.

    Je ne comprends pas vraiment ce qu'il vient de nous arriver. J'ai besoin de parler avec Jonatan. Je ne sais pas si je pourrais travailler ici dans ses conditions.

L'ivresse de notre haine - gxgOù les histoires vivent. Découvrez maintenant