1 9 D é c e m b r e

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MÉDITATION MÉTAPHYSIQUE
Arsinoé
https://www.difymusic.com/arsinoe
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Je n'aurais jamais dû rentrer d'Inde.

D'abord, parce que Paris, c'est moche. Il fait froid. Les gens ne sont pas sympas. Mes amis sont nuls. La promotion de mon album ne va pas assez vite. J'en ai marre de devoir faire des trucs chronophages comme commenter sur des blogs. Donc je ne le fais pas. Donc rien n'avance. Donc retour à la case départ. En plus, je n'ai pas de travail.

Je vais finir toute ma vie chez mon père ou quoi ?

Non, sérieusement, ça craint. Rien ne va comme je veux.

Et puis, j'ai plus confiance, voilà. En Inde, c'est tous des exploiteurs. Le monde est pourri.

En plus je ne me marierai jamais et je n'aurai jamais d'enfants. Personne ne se souviendra jamais de moi si je ne fais pas un truc vite.

C'est nul, j'ai la pression.

On était mieux dans mon monastère.

Je soupire profondément et regarde mon téléphone. 15h30. Un appel en absence ; c'est ma meilleure amie qui m'invite à une séance de soins chamaniques.

Non, c'est gentil mais on repassera, là. Je ne suis pas d'humeur.

Je m'assieds sur mon lit et je médite.

Non, parce que dans des cas comme ça sévères de déprime, ça veut dire que c'est grave. J'ai besoin de sortir les grands moyens.

Automatiquement, la prière des supplications s'active.

« Dieu, s'il te plaît si je pouvais gagner au loto pour continuer à vivre sans rien faire, parce que je n'ai vraiment pas envie de trouver un travail en ce moment, en plus il faut chercher et se vendre, tout ce que je déteste. Non mais c'est entendu, que je suis la meilleure, pour n'importe lequel de leurs foutus jobs, et ils devraient tous ramper à terre devant moi pour que je condescende à vendre leurs produits minables... »

C'est sûr, Dieu me punit en restant en France.

Je soupire et je pleure et je me lamente sur moi-même. Tout cela dure bien une heure ou deux. Puis je me relève.

Je suis dans ce moment de ma vie où je ne sais pas quoi faire et où j'ai peur de tout. Peur des autres, de la vie, peur que tous mes projets ratent. Quand on a un job bien précis à faire, c'est simple. Partir d'un point A pour arriver à un point B, et suivre un protocole.

Je n'ai pas de protocole dans ma vie.

Alors oui, il y a bien tous ces trucs que je fais pour rester à flot tant bien que mal. Voir des amis, écrire des lettres, faire de la musique, rechercher des contenus web.

Tout ça ne paye pas. Tout ça ne me paye pas. Mon capital diminue à vue d'œil. J'ai peur de manquer de fric et de devoir mendier pour vivre.

Si c'est ça je me tuerai.

Est-ce que je vais finir ma vie dépressive ? En Inde, j'étais tellement accablée par le travail à faire que je n'avais pas le temps de penser. C'était bien mais un peu éprouvant à la fois, surtout pour mon corps. Ici, au moins, je suis tranquille. Personne ne me demande de soulever des sacs de 100 kilos de grains.

Je regarde autour de moi. C'est comme si, pour la première fois, je voyais réellement ma chambre.

Quand on crache tout ce qu'on a à dire, et l'arrogance et les peurs et le manque d'amour et la solitude... Ben, ça va beaucoup mieux. De toute façon, on est toujours seul dans une certaine mesure. Seul face à soi-même.

Bibliothèque de l'AventOù les histoires vivent. Découvrez maintenant