Recueil d'OS : Les histoires de Pierre et Benjamin

OS . 06

Premier et dernier amour . 06

" Alors tous deux, on est repartis
Dans le tourbillon de la vie
On a continué à tourner
Tous les deux enlacés "

Le tourbillon de la vie, Jeanne Moreau

Il y a de ces gens qui entrent dans nos vies et y laissent incontestablement un sceau puissant. On n'a pas besoin de jurer que jamais on les oubliera parce que tout ce qu'ils étaient, demeure imprégné en nous.

Cette façon de rire, des fossettes, une façon particulière de prononcer tel ou tel mot, un sourire ou encore dans leurs manières de se mouvoir.

Pour Pierre, il était évident que le calme et le sourire de cet homme, le marqueraient à vie. Il avait tout aimé chez cet homme, mais ces deux choses l'avaient littéralement fait succomber.

Pierre se souvenait encore si bien de leur rencontre, mais plus tellement à quel moment, il en était tombé amoureux. Il avait beau se creuser la tête, il avait l'impression de l'avoir aimé dès leurs premiers regards. Un sentiment puissant, inexplicable et inextricable, qu'il était tombé sur celui qu'il était supposé aimer pour le reste de sa vie.

Vous voyez de quoi je parle, n'est-ce pas ?

Cette chose qui fait que quand on vous demande pourquoi cette personne et pas une autre, vous n'avez pas de réponses concrètes à part quelques balbutiements banales sur ce que vous ressentez. Tenter d'expliquer, l'extraordinaire avec des mots ordinaires, c'est terriblement frustrant. Vivre quelque chose de transcendant sans pouvoir fidèlement le retranscrire aux autres !

Ils avaient passé cinq ans ensemble.

Pierre aurait aimé trouver les mots merveilleux de ces bouquins qui décrivaient si bien cet amour qu'il ressentait pour lui, mais souvent, Pierre les trouvait trop pédant pour leur histoire.

Une rencontre banale.

Une salle de classe, quelques vannes et Pierre se promit ,de ne plus lâcher ce gars. Pierre avait dix-neuf ans et lui, dix-huit.

La première année qui suivit leur rencontre, fut terriblement pénible pour Pierre. Parce que plus le temps passait et plus, Pierre en tombait éperdument amoureux.

Éperdument était vraiment le bon mot.

Il avait l'impression d'être en roue libre, d'avoir perdu son bon sens jusqu'à ne plus voir que lui. Ce genre de coup que l'on reçoit en plein estomac et qui nous paralyse.

Un an de paralysie entre envie d'essayer et résignation.

Pierre était coincé dans ce que les gens appellent aujourd'hui, la friendzone. Il était devenu le meilleur ami qu'il ne voulait pas être.

Pierre voulait plus, mais il était bien trop intimidé pour partager ce sentiment grandissant avec celui qui faisait littéralement chavirer son cœur. Puis ils étaient amis et Pierre ne voulait pas tout briser et ensuite, Pierre n'était jamais tombé amoureux d'un garçon avant lui.

Tantôt, il avait l'impression que cette attirance était mutuelle et tantôt, il se persuadait que ce n'était qu'une solide et forte bromance.

À l'époque, ce garçon était de toute façon déjà engagé auprès d'un autre que Pierre. Un autre que Pierre n'aimait pas beaucoup d'ailleurs. Il le trouvait snob, trop hautain et pensait que son ami méritait mieux qu'un gars qui n'avait que du mépris à lui offrir.

Sans doute que la jalousie avait obscurci sa vision à l'époque ou peut-être qu'il avait parfaitement raison !

Après un an et six mois, à être un ami fidèle et drôle, sa position dans le cœur de ce garçon changea sans réellement que Pierre ne s'y attende vraiment pas.