copine • plk

12.

« Mon temps, mes affaires, mes potes... t'as prévu de me prendre quoi d'autre ? Je sentais sa colère prendre toute la place
— T'étais pas obligé de m'emmener comme ça, je m'amusais bien, je croisais mes bras
— Tu es complètement bourrée Esme, bois de l'eau.
— Mais tu n'es pas mon père putain.

Je sentais les regards sur nous dans cette cuisine qui était devenue soudainement étroite depuis que Mathieu et moi y étions entrés. Je m'étais appuyée contre le plan de travail, bloquée par le corps de Bob le bricoleur face à moi. 

— Encore heureux ! Je ne voudrais pas d'une fille à moitié bourrée qui se dandine devant des mecs.
— On s'amusait nettement mieux quand tu n'étais pas là sale connard ! Je le poussai légèrement en posant mes deux mains sur le haut de son torse
— Dommage pour toi.

Un petit groupe de personnes passa derrière nous forçant Mathieu à se coller à moi. Ma respiration se bloqua au fond de ma gorge alors qu'il posait ses mains sur mes hanches. Ça avait été comme un réflexe de sa part alors que nous n'avions jamais été aussi proche.

Je ne pouvais m'empêcher de noter que sa proximité et son touché m'avaient tout simplement électrifié. Aucun garçon en deux ans n'avait réussi à me toucher de la sorte sans me provoquer une peur bleue. La peur d'un souvenir lointain, enfoui à des années lumières de la personne que j'étais aujourd'hui.

Mathieu venait de changer ça.

Je ne savais pas s'il ressentait l'électricité qui passait du bout de ses doigts jusqu'à ma peau mais aucun son ne sorti, seuls nos yeux parlaient mais j'étais incapable de savoir ce qu'ils se disaient.

J'étais bourrée de toute façon, est-ce que ça voulait vraiment dire quelque chose son regard de miel coulant dans mes yeux chocolats ?

— C'est du ketchup ?

Il glissa son pouce à la commissure de mes lèvres comme pour effacer la couleur puis regarda son doigt. J'avais presque oublié que nous avions fait une bataille de faux sang, ma robe en était recouverte, mes cheveux et mon visage n'avaient sûrement pas dû être épargné. Lisko avait pris le seum car il avait emprunté le costume de son cousin et qu'il allait devoir payer le pressing pour espérer faire disparaître les taches de sang.

— Non, je me raclais la gorge, c'est du faux sang.
— Tu crois que c'est comestible ?

Est-ce que cette conversation était vraiment en train d'avoir lieu ou j'hallucinais complètement ? Où était passé le Mathieu plein de colère qui avait déboulé dans la pièce ? Et où était la Esmeralda pleine d'assurance qui envoyait paître le monde entier ? Je voyais ses yeux loucher sur le bas de mon visage, ça provoquait des pics de douleur dans mon estomac.

— Le Mathieu en colère je sais le gérer, mais le Mathieu tout doux, je galère là, me confessai-je

Évidemment, ça le fit rire. Il se pencha légèrement vers moi et j'ouvris les yeux en grand, totalement paniquée. Qu'est-ce qu'il était en train de me faire ? J'oubliai de respirer.

— J'ai des trucs à faire, je reviens. En attendant, sois sage, ok ?

Il me relâcha et s'éloigna à reculons, son visage affichant un sourire sur le coin de sa bouche.

— Va te faire foutre, lui crachai-je le sourire aux lèvres »

Putain de merde. Il fallait que je retrouve Suzy pour lui raconter ce qui venait de se passer. Un rapprochement entre Mathieu et moi ? Pourquoi faire ?

Presque chancelante, je retournai dans le hall et en me dirigeant vers l'extérieur, je vis le petit groupe dans une pièce qui ressemblait à une grande bibliothèque. Il faisait bien meilleur ici.