8. " Quelqu'un à qui je tiens "

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La porte de l'infirmerie s'ouvrit et je me relevai brusquement malgré mon épuisement. Quand nous étions enfin arrivés au Bunker, Flamme avait été transporté sur le champ à l'infirmerie et lorsque j'avais voulu y entrer à mon tour, refusant de le laisser seul, on m'avait obligée à rester dehors. Je m'étais donc assise par terre, juste en face de la porte. Les heures étaient passées et plusieurs personnes avaient essayé de me déloger, de m'envoyer au lit ou simplement de m'emmener au réfectoire pour que je mange. Mais j'étais restée. Et enfin, après avoir veillé toute la nuit, la porte s'ouvrit.
Doc sortit en se passant une main sur le visage, l'air épuisé. Il leva la tête et croisa mon regard emplit de questionnements. Il hocha la tête et tout de suite, mes épaules se détendirent et je relâchai un soupir que je ne savais même pas détenir. Ce fut comme si on retirait le poids du monde de mes épaules. Il était en vie.

- J'ai réussi à enlever la balle, elle était dans le muscle.

Doc eut un petit sourire, sûrement pour me rassurer.

- Heureusement elle a pas trop fait de dégâts, mais notre cher chef ne va pas pouvoir utiliser son bras pendant un bon moment, continua-t-il avant de poser sa main sur la poignée de la porte de l'infirmerie.

Il l'ouvrit légèrement et me proposa d'entrer, sous la condition que je n'épuise pas trop Flamme, comme si c'était mon genre. Je lui promis et entrai dans cet hôpital miniature. L'odeur était la même que dans sa version taille réelle, les effluves âcres des produits de nettoyage et du désinfectant me firent froncer le nez. Flamme était allongé sur un lit le long du mur, les deux autres couchettes étaient vides. Nous étions donc que tous les deux car même Tina, la petite assistante de Doc, n'était pas là. Il tourna légèrement la tête dans ma direction en entendant la porte se refermer et entrouvrit les yeux.

- Ça va ? demandai-je, sachant très bien que c'était une question stupide au vu de la situation, mais je ne savais pas quoi dire d'autre.

Il hocha doucement la tête, l'air encore à moitié endormi.

- Ça te fait mal ?

Il me répondit d'une voix lente qui ne lui ressemblait absolument pas, comme s'il peinait à réfléchir et à former des mots. Cela me fit légèrement sourire.

- L'anesthésie de Doc fait encore effet... Qu'est-ce que... Pourquoi tu rigoles ?

Je m'asseyai sur le lit d'à côté, n'essayant même plus de dissimuler mon sourire.

- Tu parles presque aussi vite qu'une personne de quatre-vingt-dix ans, remarquai-je avec un petit sourire moqueur.

- C'est pas gentil de s'attaquer à des gens sans défense, répliqua-t-il d'un ton faussement blessé alors que ses yeux se fermaient à moitié malgré lui.

- Excuse-moi, c'est vrai, je laisse ça aux adultes qui ont faillis te tuer.

Mon sourire disparu dès que ces mots quittèrent mes lèvres et que je me rendis compte que c'était une blague de très mauvais goût. Un silence pesant tomba sur la pièce et je me mis à éviter le regard de Flamme. Je savais très bien pourquoi j'avais dit ça, et il l'avait compris aussi. Inconsciemment, je lui reprochais d'avoir failli mourir simplement parce qu'il avait refusé que quelqu'un vienne avec lui. Je lui reprochais de m'avoir fait aussi peur.

- Merci, murmura Flamme au bout de plusieurs minutes, m'obligeant à croiser ses yeux aussi sombres que du chocolat.

Sous mon regard perplexe il clarifia :

- Merci, de m'avoir sauvé la vie.

- De... De rien.

Je n'avais rien d'autre à répondre, je m'étais à moitié perdue dans ses yeux, détaillant chaque nuance dans ses iris. Je me rendis compte qu'il y avait des paillettes dorées tout autour de ses pupilles.

- Je pouvais pas laisser quelqu'un...

Quelqu'un à qui je tiens.

- Je pouvais pas laisser quelqu'un mourir, pas encore, murmurai-je, sans vraiment savoir pourquoi je lui livrais ça maintenant.

Il me regardait toujours fixement, attendant sans me brusquer que je continue à lui raconter, à lui raconter mon histoire, ma vie. Il tapota doucement le bord de la couverture qui le recouvrait, me signifiant de m'installer à ses côtés. Je me rapprochai et m'asseyai sur son lit, ne sachant pas vraiment comment me mettre car il prenait déjà presque toute la place. Il se décala en grimaçant, signe que l'effet de l'anesthésie commençait à diminuer. Avec son bras, il me conduisit contre son torse et m'enveloppa autour de la taille pour m'empêcher de tomber. Je me collai contre lui pour m'éloigner du bord et fus soulagée lorsque je me rendis compte que ce n'était pas du côté de son bras blessé.

- Qui ? demanda-t-il simplement d'une voix calme et encourageante.

Qui j'avais vu mourir ? À qui avais-je pensé lorsqu'il s'était évanoui contre moi dans les tunnels ? C'était cela qu'il voulait savoir. Mais étais-je prête à le raconter ? Étais-je prête à revivre cette nuit qui hantait déjà mes rêves, m'empêchant de dormir même lorsque j'étais épuisée ?

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