Chapitre Seize

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Il a le visage ensanglanté et sale de boue.

Mon corps près du sien, je peux sentir son coeur battre à vive allure - c'est mieux que ne plus le sentir du tout. Il s'était écroulé par terre quand je l'ai enlacé. Maintenant, nous sommes tous les deux au sol, nous ne parlons pas. nous ne faisons qu'apprécier la présence l'un de l'autre. Un instant, j'ai cru revenir en arrière, j'ai cru revivre nos années passées à l'orphelinat, à nous amuser comme deux enfants heureux, qui n'avaient jamais eu à faire face à des situations pareilles. Un instant, alors que j'ai enfoui ma tête dans son cou, j'ai cru que tout ça n'était qu'un rêve, que toute cette histoire d'épidémie mortelle n'était qu'une simple fiction, un simple mauvais rêve. Mais je sais que tout ça est vrai. Je sais que l'épidémie a tué plusieurs milliers de personnes. Je sais que je ne suis pas entrain de rêver. Je sais que je vais mourir.

Je continue a laisser des larmes m'echapper, pendant que je me rends compte qu'Anthony est peut-être blessé. Je ne sais pas pourquoi ni comment il est arrivé ici, mais maintenant n'est pas le moment de lui demander. Lorsque je commence à reprendre mes esprits, je lache mon étreinte, et, malgré l'obscurité, j'aperçois un faible sourire sur le visage de mon ami. Il faut le mettre en lieu sûr. Il ne peut pas rester ici. Si je dois mourir, je veux qu'Anthony survive.

J'entends Theo s'éclaircir la voix, ce qui attire mon attention. Je porte mes mains à mon visage et l'essuie avant de me lever. Je pense à m'excuser pour mon attitude, pour ma faiblesse, mais je me retiens. Enfin, c'est surtout l'envie de fondre en larmes qui m'empêche de parler. Je le regarde brièvement avant de reconcentrer mon attention sur Anthony. Ils me regardent tous les deux, comme s'ils attendaient que je dise quoi faire. Ou du moins, que je dise quelque chose. Mon instinct m'a plusieurs fois dit de bouger, mais je suis collée sur place, essayant de comprendre ce qui se passe. Anthony a surgi de nulle-part, alors que je le croyais à Seattle. J'ai pleuré, et je suis restée dans ses bras pendant plusieurs minutes. En tout cas, si moi je ne comprends pas grand chose, Theo doit être encore plus perdu.

Anthony tousse, et je m'acroupis à côté de lui. J'essaye de parler sans succès, alors je décide d'inspecter son corps. Mes doigts effleurent son bras, puis descendent tout son long. Je fais la même chose sur son torse et m'arrête brusquement lorsque il pousse un gémissement de douleur. Je retire ma main et plisse mes yeux en essayant de mieux voir, mais aucune chance. J'ai juste ressenti quelque chose d'humide. Je porte mes doigts à mes narines pour essayer de comprendre ce que c'était. Je n'ai pas eu besoin de le sentir trop longtemps; j'ai reconnu ce que c'était la seconde qui suit:

Du sang.

J'entre en panique. Il saigne. Anthony saigne. Ce qui veut dire qu'il est vraiment blessé. Et je ne sais pas le guérir. Je n'ai rien pour le soigner.

- Je... commence-t-il.

Je le regarde. Il parle. C'est bon signe. Très bon signe.

- Quoi...? dis-je d'une voix brisée - tellement cassée qu'on aurait dit une murmure, impossible que Theo ait entendu.

Je reste là, plantée en regardant mon ami en attendant qu'il continue sa phrase.

- Je... connais...

Il pousse un deuxième gémissement semblable au premier. Je pose ma main sur son bras, l'incitant à continuer.

- ... Une sortie.

Mes yeux manquent de sortir de leur orbite. Une sortie ? Oui ! Il a bien dit une sortie ! Et il la connait !

Il se met à tousser et je me sens mal pour lui. Je donnerais n'importe quoi pour avoir une trousse de secours à cet instant même.

A F F L I C T E D [réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant