Chapitre Onze

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   8 HEURES AVANT LE TEST

  Je ne fais que regarder ma montre.

  Visiblement, je ne fais que penser à ça. Si seulement j'avais comment me changer les idées...

  Depuis l'autre jour, je me suis fixée un objectif en tête; retrouver la soeur de Theo. Je lui ai promis, et je tiens toujours mes promesses.

  Musique dans les oreilles, j'essaye de me relaxer le plus possible, et même, qui sait, dormir un petit peu...

  Que ferait ma mère dans cette situation? Elle aurait sûrement prit son courage à deux mains et serait partie, la tête levée. C'est ce que je devrais faire, mais je ne suis pas ma mère. Je ne suis qu'une pauvre gamine, efrayée de son passé.

  Il faut que je m'endorme. Le test a lieu demain. Dans quelques heures, je retournerai à Countless City, et je mettrai une fin à tout ça. Oui. Je ne me dégonflerai pas. Je ne me dégonflerai pas...

  ***

  Je me reveille. Mon premier reflexe fût regarder l'heure. Six heures. Il me reste une heure avant que je rejoigne Theo dans le garage. je décide de prendre une douche. Une longue relaxante douche brûlante. Je sens la douleur de l'eau brûlante sur ma peau, qui rougit sur le coup. Mais je m'en fiche. La douleur que je ressentirai dans quelques heures sera bien pire. Après un très, très long moment, je décide de sortir de la douche. Devant moi, un miroir. Un miroir dans lequel je me regarde. Mes yeux sont gonflés par les larmes que je ne savais pas que je versais, ainsi qu' entourés de cercles violets; des cernes. Je ne prends même pas la peine de retoucher cette imperfection avec du maquillage; je n'en ai pas besoin. Mes bras et jambes ont rougi, sous l'effet de l'eau brûlante. Mes cheveux sont mouillés; je viens de les laver. Je ne suis vraiment pas belle à voir. Je m'habille: t-shirt gris, pantalon d'uniforme kakis. Je sèche mes cheveux et ne prends même pas la peine de les attacher. Je réfléchis. Il y a quelques mois, je n'étais qu'une orpheline, maintenant je suis un soldat. Je souris à cette pensée. Jamais dans ma vie je n'aurais pensé un jour faire partie d'une armée militaire. Même si j'ai été entraînée à part, pour je-ne-sais quelle raison. Je me demande comment vont Anthony et Amanda. Comment ont-ils réagi à ma soudaine "disparition"? Et Mme Hathaway... M'aurait-elle vendue aux militaires? Pourquoi? Tout ça s'est passé tellement vite... J'aurais préféré avoir moi-même mon propre choix. J'aurais préféré qu'ils me laissent décider au lieu de décider à ma place.

  J'entends toquer à la porte. Je me lève et vais ouvrir. Josh.

- Hey, salue-t-il.

- Hey.

Il me prend dans ses bras. Il ne me faut pas beaucoup de temps pour répondre à son geste. Cette action dure quelques secondes, puis nous nous séparons.

Josh sourit.

- Rappelle-moi ce que je t'ai appris sur les Mutants.

Je m'éclaircis la voix et réponds à sa demande;

- Les Mutants ne voient pas mais ont une ouïe super fine, donc si je me retrouve face à un d'eux, je fais le moins de bruit possible. Ils ont une rapidité surhumaine aussi. Je dois faire gaffe à ne pas me faire mordre ou griffer, sinon je me transformerai en un d'eux.

  Il me regarde attentivement. Je dois lui montrer que je n'ai rien oublié.

- ...  Ils n'ont pas tendance à se montrer, leur endroit préféré est plutôt un endroit obscur et calme,...

- C'est bon, me coupe-t-il, c'est bien, ma jolie.

Je souris. Il me serre une deuxième fois dans ses bras.

- C'est aussi dur pour moi que pour toi, tu sais... Déclare Josh.

Je démontre un regard compatissant et m'assieds sur le lit. Je regarde ma montre, le temps passe.

  Pendant un long moment, nous restons là, sans rien dire, juste à apprécier la compagnie de l'autre. Josh avait posé sa main sur la mienne, et ma tête s'était posée sur ses épaules. Dans ces moments, je me demande pourquoi la vie est si compliquée.

  30 minutes restantes.

  Je descends dans le réfectoire, prends quelque chose à manger. Même n'ayant pas faim du tout, je me force à manger une petite part de gâteau léger au citron que proposait le réfectoire aujourd'hui. Manger est une bonne décision.

  Je fais les cent pas dans ma chambre, stressant comme si je n'allais plus revenir. La moindre des choses serait d'avoir confiance en moi, ce que j'ai toujours eu, mais visiblement, dans ces circonstances, toute confiance s'est envolée. Garder espoir c'est ce que je ne cesse de me répéter, pensant un moment, croire moi-même à mes propres mensonges. Pensant qu'à force de faire croire autour de moi que je vais bien, je finirai par y croire aussi.

***

- C'est l'heure.

  Josh s'était décidé à conduire la voiture jusqu'à Countless City. Sa réaction quand il a appris que Theo venait avec moi était meilleure que ce dont je pensais ; neutre. Il semblait s'en ficher complètement, ce qui m'a soulagée un peu.

  J'inspire un grand coup, comme si j'espérais stocker du souffle en moi quand je n'en aurais plus. J'avais peur. Je pars vers la voiture - une 4x4 - et attends. Theo évite tout contact visuel et physique avec moi, mais même comme ça, le voir me soulage un peu. Il s' installe à l'avant, à côté de Josh. Je prends place à l'arrière, et Josh démarre enfin.

***

  Le soleil venait de se coucher, nous plongeant dans le crépuscule. Le silence dans la voiture est lourd. Vraiment lourd. Personne ne parle ou n'ose parler; nous sommes chacun de notre côté, plongés dans nos pensées. C'est pour retrouver la soeur de Theo que j'y vais. Il faut que je garde ça en tête. Plusieurs fois pendant le trajet, Josh me lançait des regards lointains. Theo reste toujours muet. Je pose ma tête sur la fenêtre. La ville à été mise sévèrement en quarantaine ; avec des murs de quatre cents kilomètres de longueur et trois cents mètres de hauteur, l'espace mis en quarantaine est bien plus large que la ville en question.

  Mon estomac se noue quand j'aperçois ce mur. Nous sommes arrivés.

  Josh arrête la voiture - qui roulait depuis une heure environ -à quelques minutes de marche jusqu'au mur, je dirais. Josh me lançe un dernier regard que cette fois, je décide d'affronter. Theo sort de la voiture et se dirige vers le coffre, ce qui me deconcentre, me faisant le suivre du regard.

- Il a peur, déclare Josh.

  Je recherche le regard de Josh, qu'il a rivé sur la route, tout en serrant ses mains sur le volant.

- C'est humain d'avoir peur.

  Ma réponse semble avoir eu de l'effet. Bien que nous parlons de notre capitaine, Theo Williams, l'homme qui se dit sans peur, j'ai raison, et je le sais. Même en étant fort, moralement invincible, la peur est un sentiment qui ne s'en va jamais. La cacher semble une bonne solution, mais il y aura toujours un moment où elle réussira à détruire les murs de protection créés, peu importe la taille de ceux-ci, et réapparaîtra contre notre volonté. La cacher est possible mais l'éviter est impossible.

  Josh sort de la voiture, me laissant seule. Je peux entendre de faibles voix, mais sans plus. Je sors à mon tour de la 4x4, et mon regard tombe sur un panneau, droit devant moi. Je me dirige vers celui-ci. Il est mis de travers, sur l'herbe qui n'a été coupée depuis, taché de sang et tagué de partout. Il y est aussi marqué en grand: "Bienvenue à Countless City". Je remarque évidemment que "à Countless City" était rayé en rouge - ce qui rend le tag impossible à éviter - et en dessous il était marqué "en enfer". Mon estomac se noue quand je lis la phrase entière:

- Bienvenue en enfer.

A F F L I C T E D [réécriture]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant