26 LE TIR-AU-MALEFOY

46 1 0
                                    

La nuit que Harry et Ron passèrent à l'infirmerie fut sans doute possible une des plus longues de leur existence. Harry, qui n'était pas censé bouger s'il souhaitait être remis rapidement sur pieds, avait dû se contenter d'observer Ron œuvrer précipitamment à leur protection. Stimulé par la peur, il n'avait en effet fallu que quelques coups de baguette à ce dernier pour déplacer leurs lits dans un coin reculé de la pièce. Ron avait ensuite murmuré des enchantements censés les dissimuler à leurs compagnons de chambrée. C'est la couette remontée jusqu'aux oreilles et le souffle court qu'ils avaient suivi les crises épisodiques de somnambulisme dont semblaient souffrir les victimes de la Lethargum Tenebris.

Bien qu'aucune autre intention hostile n'ait transparu dans l'attitude des malades, Harry (tout comme Ron, à en juger par ses ronflements tardifs) préféra attendre que les premiers rayons du soleil filtrent au travers des rideaux pour s'abandonner au repos tant attendu.

Le ventre douloureusement vide, mais le corps en bien meilleur état, il se réveilla aux alentours de sept heures du soir. L'infirmier, un vieillard bourru, se porta à leur chevet. Sans ménagement il les examina tous deux, les manipulant de ses mains râpeuses en leur expliquant avec un fort accent d'Europe de l'Est que, de son temps, les élèves étaient dotés d'une constitution autrement supérieure. Soupçonnant un éventuel lien entre Halcard et son interlocuteur, Harry jugea plus prudent de ne rien laisser filtrer quant aux agissements inquiétants des autres patients de l'infirmerie. S'il y avait bien en revanche une personne à laquelle il était désormais décidé à se confier, c'était à Hermione.

Après un crochet décevant par la Grande Salle (le repas du soir s'était visiblement terminé depuis un moment déjà) ils tentèrent leur chance à la bibliothèque, à l'étage où ils avaient désormais pour habitude de se retrouver et d'étudier jusqu'au couvre-feu. Ils retrouvèrent Hermione, Ginny, Neville et Luna qui leur sautèrent au cou sitôt entrés dans la petite salle d'étude, aménagée dans une des nombreuses alcôves de la tour.

– Harry, Ron ! Oh je suis désolée, s'exclama Hermione, les cheveux en bataille comme si elle sortait d'un combat acharné. On pensait vous rendre visite, mais le devoir du Professeur Helsing sur les capacités exceptionnelles des êtres hybrides nous a pris plus de temps que prévu. Quel casse-tête !

– En même temps, entre se torturer avec les révisions et aller vous voir, le choix était vite fait, fit Ginny d'un air cynique. C'est bon de vous retrouver sur pied en tout cas.

Au loin, le soleil se retirait derrière le Pic du diable et les étagères qui les entouraient se teintèrent un instant de rouge alors qu'ils desserraient leurs étreintes. Les jours rallongeaient avec la venue de l'été, pourtant, étrangement, Durmstrang et ses environs demeuraient aussi froids qu'en plein hiver, si ce n'était plus encore.

– On... on vous a tout de même mis un peu à manger de côté, fit Neville, embarrassé, en révélant quelques sandwichs au poulet empilés sous une serviette.

Mais malgré l'appétit qui leur brûlait l'estomac, Harry et Ron demeurèrent impassibles.

– Vous êtes vraiment guéris ? demanda Luna, fidèle à la fâcheuse manie qu'elle avait de dévisager ses amis comme si elle les voyait pour la première fois.

Ron acquiesça et jeta un regard par-dessus son épaule.

Harry Potter et le Compas du ChaosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant