Chapitre XX : Amertume

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Music/ fall - Eminem

Mon corps est plongé dans une profonde léthargie. Je me sens flotter dans un voile presque imperceptible, semblable à la mort. Suis-je morte ? Peut-être bien. Tout autour de moi est noir, je ne distingue aucune lumière mais étrangement, je suis prise d'un sentiment de quiétude. Je me laisse entraîner dans les limbes, n'ayant nullement l'intention d'y résister.
Mon combat n'a pas de fin. C'est dans l'immensité glaciale qui m'entoure, que je m'en rends finalement compte. Allais je un jour pouvoir souffler et me reposer ? Sans avoir la crainte constante d'être traquée comme une bête.

- Iza ...

Une voix lointaine, presque fantomatique, m'appelle avec douceur. Je n'arrive pas à déterminer à qui elle appartient mais, son timbre bienveillant m'apporte la force nécessaire pour tendre l'oreille.

- Izanami. C'est bien trop tôt.

Trop tôt ? Pourquoi ? Je serre les dents et tends davantage l'oreille, souhaitant en entendre plus. Qui est cette personne qui me parle a travers ce voile de silence ?

- Pourquoi ? Je demande mais n'obtiens aucune réponse.

Je continue à flotter sans réellement savoir ce qu'il adviendra ensuite. Une légère brise m'enveloppe doucement, faisant onduler mes cheveux, semblable à une caresse. Je frissonne, le vent devenant plus violent a mesure que je tente de le fuir. J'ouvre la bouche mais, aucun son n'en sort. Je finis emportée par la bourrasque.

*

J'ouvre brusquement les yeux, tournant la tête de droite à gauche pour trouver des repères. La noirceur ambiante me force à plisser les paupières. La pièce est calme et faiblement éclairée par les rayons de la lune. Un flash me reviens, la course poursuite avec Hanma et ses sbires, le coup de feu et ma perte de conscience. Je soulève les draps pour constater que ma cuisse est bandée, bien qu'elle me lance toujours, je tente tout de même de poser mon pied à terre. Une grimace déforme mon visage et je couine de douleur lorsque mes orteils touchent le sol. Ce simple mouvement me paraît insurmontable, mais je me contente de serrer les dents et presse mon poids sur ma jambe. Un gémissement rauque me monte à la gorge, mes dents grinçant sous l'effort aussi bien que je dois me maintenir au mur pour ne pas flancher. Les jambes tremblantes, je m'avance, les doigts rasant le mur.

N'ayant pas vue Baji ou qui que ce soit, je décide de quitter la chambre. J'ouvre prudemment la porte qui pousse un grincement désagréable et je prie que personne ne l'ai entendu. Je reste figée, à l'affût du moindre mouvement mais, après plusieurs minutes dominées par un silence de mort, je souffle puis m'engage à l'extérieur. L'endroit est sombre, si sombre que je m'agrippe au mur alors qu'un frisson glacial traverse mon échine.
La noirceur restait l'une de mes principales peur. Je me remémore de sombres souvenirs qui hantent encore mes nuits.
L'humidité, la crasse et l'angoisse me serrent encore les tripes. L'odeur putride de mes propres excréments et de mon vomis, dû aux vapeurs nauséabondes de mes déjections, reste ancrée en moi. Le souvenir des chaînes rouillées autour de mes poignets et mes chevilles augmente mon angoisse.
Je dois m'arrêter à mi chemin pour reprendre mon souffle mais, ça ne fait qu'accentuer mon sentiment de terreur.

Souffle, reprends-toi. C'est finit. Répète mon esprit. Finalement, après plusieurs essais, mon souffle et mon rythme cardiaque regagnent en calme. Je prends une grande inspiration et reprends ma route. Au coin du mur, je distingue enfin la lumière de la lune qui se déverse par une baie vitrée. En l'observant, je ne peux m'empêcher de constater qu'elle contrastait énormément avec les portes usées. Comme si son propriétaire n'avait pas eu le temps de terminer les travaux.
Mes pieds se déplacent d'eux-mêmes jusqu'à l'immense fenêtre. Là, je laisse traîner mon regard à l'extérieur. La clarté de l'astre nocturne éclaire toute la propriété, dévoilant un petit jardin à la décoration traditionnelle. Un gigantesque cerisier domine le tout malgré sa position éloignée, couvrant une partie de la pelouse de son ombre.
Soudainement, un point incandescent attire mon attention. Je tourne le regard pour découvrir Baji, assit sur une chaise de jardin, une cigarette entre les dents. Ses cheveux sont relevés dans une queue de cheval dont plusieurs mèches s'en échappent. Ses yeux mordorés sont tournés vers le ciel nocturne, s'illuminants à chaque bouffée de sa cigarette. Je me force à m'arracher de ma contemplation pour ouvrir le mécanisme de la fenêtre. Le frottement du métal alerte le jeune homme qui se tourne immédiatement vers moi.

Prières et châtiments [Tokyo Revengers]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant