« Le pire de la mort, c'est de penser qu'on en réchappe » Denis Heudré
Ne croyez pas que laisser Barbara derrière moi m'a fait plaisir. J'ai vu dans son regard la peur. J'ai ressenti dans mes entrailles sa détresse. J'ai su ce qu'elle pensait en me voyant partir. Va-t-il me revenir ? Je l'ai su car j'ai failli la perdre par deux fois depuis que j'ai découvert mon amour pour elle. Je l'ai su dans les hurlements qu'elle a poussés. J'ai su qu'elle savait que je ne partais pas sans risque pour ma vie mais je ne pouvais pas me permettre de la perdre. Je préfère la savoir en sécurité dans mon QG à me maudire, que de l'avoir à mes côtés et la voir peut-être mourir.
Nous avons rejoint les hommes de Mancini à l'atelier qu'il a loué, sous un faux prétexte de société nouvelle, dans l'évènementiel. De l'évènementiel, il va y en avoir mais pas celui auquel on pourrait penser. Des malles ouvertes jonchent le sol, elles renferment tout un armement. Famas, AK quarante-sept, grenades, couteaux, grenades de désencerclement, fumigènes, masques à gaz, gilets par balles, des casques, lunettes infra rouges ou à vision nocturnes. Nous avons pris dans nos réserves tout ce dont nous pouvions avoir besoin. Bref, on se prépare à une vraie guerre. Le plan a été déplié sur une table faite de tréteaux et d'une planche. Les équipes sont formées, chacun sait ce qu'il a à faire. Le QG de la Faux Tueuse se trouve à Biganos, à environ trente kilomètres du notre.
Les hommes de Mancini ont loué sept Peugeot Boxer surélevés, les bahuts font six mètres de long sur deux mètres de haut. Le premier est rempli d'armements, les autres contiennent les hommes de Mancini. Quatre-vingt-treize hommes au total. Douze hommes dans le caisson et trois dans la cabine. Il y a quinze hommes par camion dans six camions et trois hommes en cabine pour le septième camion. Il n'a pas fait les choses à moitié. De notre côté, nous n'avons pas pris nos bécanes trop bruyantes pour arriver discrètement vers leur QG. Nous avons également loué un camion mais nous avons privilégié un camion de déménagement avec le logo. Ce n'est pas rare de voir des gens venir s'installer dans la région et ces camions-là, on les croise souvent. On a prévu de s'arrêter à un kilomètre de leur base, elle est entourée de forêts, ce qui est parfait pour nous. Il y a des avantages à être entouré d'arbres, la discrétion, la tranquillité mais il y a aussi des inconvénients, on ne voit pas le danger venir. La fouine a neutralisé toutes les caméras de leur club en diffusant les images de la veille. On va pouvoir s'approcher sans se faire voir. On sait que les cinq types que l'on cherche depuis plusieurs jours, sont à l'intérieur. On va donc aller les chercher car ils ne sont pas sortis depuis les derniers évènements. Je pense que leur président a dû leur demander de faire profil bas et de rester planquer pendant un certain temps. D'après le drone qui a survolé leur QG, ils n'ont qu'un bâtiment principal, qui doit faire au moins deux mille mètres carrés. Il y a plusieurs issues, c'est pour cela que nous avons dû former des groupes, pour qu'aucun d'entre eux ne nous échappent et donnent l'alerte au reste de leur troupe basée à l'extérieur de leur enceinte, ou à un gang allié au leur, sinon c'est avec trois cent hommes que nous devrions nous battre, là nous ne ferions pas le poids. Mancini à certes beaucoup d'hommes à son service comme moi, j'ai d'autres gangs au mien, mais ils ne sont pas sur place donc on n'aura pas de seconde chance, c'est maintenant ou jamais. On a choisi un horaire de jour, car il y aura moins d'hommes sur place mais certainement plus de femmes, donc moins de danger mais plus de risque de faire des dommages collatéraux.
Il est treize heures quand l'assaut est donné. Nous avons envahi leur bois en coupant leurs clôtures grillagées, rien ne vaut des murs si on veut être mieux protégé. On avance le dos courbé, en silence, personne en vue pour l'instant. On se rapproche du bâtiment et au moment où on sort du bois, un homme nous aperçoit. Ce dernier donne l'alerte avant qu'une balle pleine tête vienne le faucher. Nous n'avons plus le choix, nous nous ruons vers le bâtiment. Des vitres sont brisées, on commence à nous canarder. Nous ripostons par le lancement de grenades lacrymo ce qui en fait sortir de la baraque. Les femmes tout d'abord, que nous laissons partir mais neutralisons leurs hommes. Nous enfilons nos masques à gaz pour pénétrer dans l'enceinte arme au poing, ça tire de tous les côtés, moi je n'ai qu'un objectif, retrouver celui qui a failli tuer Babe. Je le vois en haut d'une passerelle entourant l'intérieur du bâtiment, il tire sur tout ce qui bouge, blessant ou tuant quelques-uns de nos hommes. J'arrive à monter discrètement par l'escalier en colimaçon. Je le veux vivant, c'était un ordre, c'est pour cela que personne ne l'a encore atteint. Je sors mon kyoketsu shoge de derrière mon dos mais au moment où il m'aperçoit, il est déjà trop tard pour lui, je l'atteins pleine main et le pointe dans la paroi derrière lui, comme dieu sur sa croix. Il n'a pas le temps d'essayer de la retirer que je lui assène un coup de crosse de mon AK quarante-sept dans la tempe, ce qui le sèche d'entrée. Je pose mon doigt sur mon oreillette et interpelle Mancini.
— Objectif atteint, le paquet est touché, je l'évacue.
— Mes hommes ont chopé les trois autres et je viens de trouver le dernier.
Puis il interpelle tous les hommes.
— A tous ! On se replie, on n'oublie personne derrière vivant ou mort ! Tous nos hommes doivent rentrer !
On lance nos dernières grenades fumigènes puis celles de désencerclement. Nous sortons nous réfugier dans les bois pour regagner nos véhicules. L'attaque aura duré moins d'une heure, trois quart d'heure, si on veut être exact. J'ai toujours mon paquet sur l'épaule quand j'entends Mancini hurler dans mes oreilles.
— Shaw ! derrière, fais gaffe !
Je n'ai pas le temps de réagir que je reçois enplein milieu du dos une balle. La douleur est atroce et me coupe le souffle.J'entends la riposte et la confirmation que le mec est mort avant de perdre monfardeau et de m'écrouler sur le sol terreux. C'est un coin de ciel bleu que jevois au milieu du feuillage et le sourire de Barbara avant de fermer les yeux.
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DARK FORCES T.1
ActionBarbara : J'ai tout perdu. Mes parents lorsque je n'étais qu'une enfant, puis mon frère, sa fille et mon meilleur ami et collègue. J'avais un travail, un avenir prometteur et il n'aura fallu qu'une année pour que mon monde s'écroule comme un château...