Colorless

❦

CHAPITRE 17.

– Allez, Oria ! Sors de là. Montre-nous, je suis sûre que tu es magnifique, m'encourage Flavie.

À contre-cœur, elle sort de la salle de bain. Ce soir, Matt et elle ont l'appartement pour eux seuls. Leurs parents ont décidé de se faire un petit week-end en amoureux. Il a donc proposé d'organiser une soirée avant de partir en Arkansas.

Une dernière fête avant la prison sociale dans laquelle chacun va s'enfermer pour réviser les partiels de fin de semestre.

Elle s'attendait à quelque chose de très calme en cercle restreint, avec lui. Mais non. Il s'est révélé être un gros fêtard. Il y a probablement la moitié des deuxièmes et troisièmes années qui sont invités.

Flavie et Emily se sont mises en tête de la pomponner. Ne lui ayant pas vraiment laissé le choix, elle n'a pu qu'accepter. Elle vient d'enfiler la robe que Matt l'a forcée à acheter lorsqu'ils sont allés faire du shopping ensemble à son arrivée.

Elle est assez simple à vrai dire. Elle est en velours (rouge selon l'étiquette) et assez courte. Oria la trouve sublime, c'est vrai, mais elle n'a pas le même avis la concernant. Elle ne me va pas.

– Waw... Tu es magnifique.

La jeune femme n'ose pas la contredire, préférant garder ses complexes pour elle. Elle n'est pas du genre à s'étaler sur ses sentiments, quels qu'ils soient.

Peu convaincue, elle se regarde une nouvelle fois dans le miroir. Lucy, allongée sur son lit en train de lire un livre qu'elle a piqué dans sa bibliothèque, pointe une paire d'escarpins noirs.

– Mets ça.

Elle l'écoute sans attendre. La lectrice n'a même pas eu besoin de lever les yeux de son bouquin pour trouver ce qui lui irait. Oria les enfile et la réaction des trois filles est unanime. Elle a l'interdiction formelle de changer quoi que ce soit sur sa tenue.

Elles sont maintenant toutes prêtes. Ses cheveux lissés retombent sur ses épaules et ses yeux sont maquillés d'un léger smoky que lui a fait Emily. L'étudiante ajoute quelques bijoux à sa tenue.

Puis, elles décident d'aller aider Matt qui termine de tout préparer. Lorsqu'elle pénètre dans la cuisine, son frère – oui, elle le dit enfin naturellement – lâche la même exclamation que ses amies juste avant. Il se félicite pour la robe car c'est lui qui l'a choisie. Selon lui, cette couleur lui va à merveille. Oria ne peut que le croire sur parole.

Malgré tout, elle n'est pas à l'aise. Oria adore ce style, mi-chic mi-sexy, mais son corps est trop dévoilé à son goût. Elle a cette relation compliquée avec lui.

Elle n'avoue jamais ce complexe car il est peu pris au sérieux par les autres, pourtant il est tout aussi important que n'importe quel autre complexe. Comme malheureusement beaucoup de filles, elle est complexée par son poids. Mais là est toute la nuance.

Elle ne se trouve pas trop grosse, bien loin de là, mais trop maigre.

Les rares fois où elle a parlé de ce complexe, on lui a répondu qu'elle devait arrêter de se plaindre et qu'elle devait s'estimer heureuse d'avoir un corps fin car beaucoup de filles en léger ou grand surpoids en rêvent.

Et elle déteste ça.

Un complexe quel qu'il soit reste un complexe. Le minimiser car il est peu répandu est une grosse erreur que font les gens. Quand certaines personnes avec un kilo de trop pensent être énormes, on ne se moque pas d'elles quand elles l'expriment.

Oria, elle, quand elle dit qu'elle a l'impression d'être aussi squelettique qu'Oscar, on lui rit au nez. Et ce n'est pas normal. Quand elle se regarde dans un miroir, elle est obsédée et dégoûtée par ses os qu'elle trouve trop visibles.