Envole-moi

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Hiyori




          Cette nuit, j'ai rêvé. Ce n'était pas un énième cauchemar, de ceux que je connais par cœur et qui ne laissent derrière eux que ma peau en sueur au réveil. Non. Cette nuit, j'ai revu le sourire de Mikey, disparu depuis tant d'années. Cette nuit, je suis allée au cinéma avec Draken, j'ai complimenté Ema sur ses résultats en mathématiques, j'ai bu un thé chez Aikawa, avec Baji, j'ai rendu sa veste en cuir à Papy et j'ai offert une boite de pansements à Hinata. Je m'en souviens si clairement que je mets quelques secondes à reconnaître les murs autour de moi. Quelle étrange sensation. Pas celle qui me rappelle à quel point je suis épuisée de vivre, pas celle qui soulève mon estomac à chaque respiration, pas celle qui me donne envie d'arracher ma peau avec les ongles dès les premières lueurs du jour. Non. Je me sens légère. Si j'avais su, je n'aurais pas attendu dix ans.

Je tousse en tentant de retenir le bruit rauque de ma gorge ravagée par la cigarette pour ne pas réveiller Mikey. Il dort, pour une fois. Ses cheveux blancs se confondent sur l'oreiller qu'il agrippe. C'est long, dix ans. Je ne sais plus si je l'aime à en crever ou le déteste à le crever. Mon libérateur. Mon bourreau. C'est sûrement car il me l'a annoncé hier, que ce rêve a remplacé mes démons. Me voilà apaisée, peut-être plus vivante que jamais. A ma droite, un grognement s'élève. J'avance ma main tremblante pour la poser sur la joue de Mikey. Mes lèvres s'appuient lentement sur les siennes. Depuis combien de temps ne l'ai-je pas embrassé ? Sa bouche est rêche, pâle, froide. Un baiser au goût amer.

 On y va, chuchote-t-il en me dévoilant son regard terne qui porte le poids de nos souffrances.

Je sors du lit pour m'habiller. A chaque mouvement, ma peau se tend, semble se fissurer. Mais je ne le sens pas. Je ne le sens plus. Enfin. J'attrape mon paquet presque vide au sol et m'allume une clope en sortant de la chambre. Sanzu attend déjà. Il me fixe avec toujours autant de haine, couplée à de la pitié. Qu'importe. Je lui en tend une. Cette cigarette d'après la guerre et son odeur vanillée.




Que le temps s'étire lorsqu'il faut attendre sa récompense. Le son de mes talons résonne dans ce bowling désaffecté. J'arpente les rangées de sièges. Mes genoux cognent parfois entre eux, prêts à se casser. Assis à quelques mètres de là, Mikey observe mes allées et venues en attendant l'arrivée de Takemichi. Il ne brille plus. Il n'éclaire plus le monde de sa présence. Le poison continue de se répandre. Je le vois dans ses yeux sans vie, sur sa peau livide, dans ses joues creusées, dans ses cernes violacées. Tout son être respire la violence. Miroir de mes cicatrices.

La pute des gangs [Mikey X OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant