Chapitre 44 : le comerce

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La Beremie était spécialisée dans le commerce en tout genre : poisson, pierres précieuses, rendement agricole et métaux rares. Si à première vue les Orvan ressemblaient à des marchands comme les autres, Eden se détrompa rapidement lorsqu'il apprit dans quoi sa belle-famille trempait.

- Des services spéciaux ?

- Oui, lui confirma sa belle-sœur, Ran. La jeune oméga était l'épouse du frère de Galard.

- Les Orvan sont spécialisés dans le commerce de services en tout genre. Cela peut aller de la contrebande de liqueur à l'espionnage. Nous possédons également une troupe de mercenaires pour accomplir certaines tâches que l'armée ne peut exécuter.

- Vous commandez des assassinats ?!

- Il faut bien que quelqu'un se charge de récolter les têtes mises à prix, Den. Père ne voulait pas que tu le saches car il ne te porte pas particulièrement dans son cœur, mais étant donné que tu fais partie de la famille, il faut bien que tu sois mis au courant. Tu l'auras sans doute remarqué, mais nous nous chargeons de tout dans cette famille, chaque personne a un rôle à jouer. Il en sera de même pour toi désormais.

Den ne répondit pas. La nouvelle ne lui avait pas fait tant de mal que cela car il se doutait que Galard trempait dans des histoires louches. Bien sûr, pas à ce point-là. Mais il fut heureux que cette nouvelle ne lui fasse pas baisser son impatience quant à vouloir se marier avec Galard. L'aimait-il ? Il l'ignorait encore tant est-il qu'à une époque où le monde se remettait à peine de la guerre, la barbarie restait normalisée.

Eden en réalité ne s'était jamais vraiment posé la question. Était-ce par résignation et envie de sécurité qu'il voulait si ardemment s'unir définitivement avec Galard ? Sûrement que oui. Et sans doute que lui-même ne s'en rendait pas encore compte.

- Il y aura un bal après ton union avec Galard. Petit père voulait s'assurer que les fidèles de la famille soient mis au courant. Il se peut donc que tu revoies certaines personnes de l'armée... ça ne te dérangera pas, n'est-ce pas ?

Eden tritura le bord de sa manche, le regard dans le vide. Revoir les soldats ? Les insignes impériales ? Le pourra-t-il seulement ?

Il n'en avait aucune envie.

- La guerre est finie, pourquoi les Orvan cherchent-ils encore à entretenir des relations avec l'armée ?

Il avait posé la question doucement, craignant des représailles.

Ran sembla mal à l'aise. Elle se leva de sa chaise, referma son livre et invita Eden à la suivre hors de la bibliothèque. Ils marchaient rapidement et Ran semblait vouloir lui dire quelque chose à l'abri des regards.

Bientôt, ils arrivèrent au niveau de ses appartements, et elle ferma la porte derrière eux.

- Ce n'est jamais bon de parler de ces choses dehors, fit-elle alors.

- La Sparte a besoin des Orvan pour exécuter les missions qu'elle ne veut pas divulguer. Et pour tout te dire, la guerre n'est jamais vraiment finie. Si à l'avenir, la couronne a besoin de s'approprier plus de territoires, il faut que nous soyons prêts.

Eden eut du mal à digérer l'information. La Sparte voulait d'autres territoires ? Après tant de sang versé ? Ou alors, était-ce une manière de ne pas conclure les choses rapidement ?

Voyant le regard perdu d'Eden, Ran se rapprocha et le prit dans ses bras. Plus petite que lui, elle avait des traits typiques des Spartes. Les cheveux noirs de jais et la peau pâle comme la mort. Eden ne sut quoi penser de cette étreinte. Mais après tout, ce n'était pas la faute de Ran tout ce qui arrivait, et peut-être que cela aurait été à elle de se retrouver dans sa position si l'issue de la guerre avait été autre. Il n'extrapola pas plus loin dans sa pensée pour se concentrer sur ce câlin réconfortant dans les bras de son aînée. La jeune fille avait été adorable avec lui depuis son arrivée et contrairement à sa belle-sœur (l'autre oméga de la famille et épouse de l'aîné des Orvan), Ran avait pris le temps de connaître Eden et son histoire. La jeune noiraude connaissait même quelques mots ylennois ! Alors Eden ne pouvait définitivement pas lui en vouloir.

À vrai dire, il l'appréciait, mais se méfiait d'elle à la fois. Enfin, se méfier était un grand mot disons juste que la jeune oméga avait des tendances aux bords homophiles. D'ailleurs, alors qu'il cherchait à enfin s'extraire de sa prise, cette dernière se mit sur la pointe des pieds et l'embrassa.

Les joues en feu, Eden se détacha brusquement de la jeune fille.

- Ran, je ne crois pas que ce soit une bonne chose.

La jeune Sparte ne l'entendit pas de cette manière et se rapprocha d'Eden jusqu'à ce qu'il soit acculé contre le mur. Ses mains rejoignirent les hanches du plus jeune qu'elle pressa contre son bassin.

- Tous les omégas l'ont déjà fait au moins une fois avec un(e) autre. Ne joue pas les effarouchés.

- Mais tu es mariée, Ran, et tu es ma belle-sœur ! fit-il en la repoussant.

- Il n'y a rien de mal à ce qu'on fait, lui dit-elle calmement. Tu es si beau, Eden... Personne ne nous dira rien... nous sommes des omégas...

Eden fixa son amie, à la fois énervé et abasourdi.

- Je ne peux pas, Ran...

- Mais pourquoi... ne m'aimes-tu pas ? N'ai-je pas été gentille avec toi ?

- Mais il ne s'agit pas de ça, Ran ! Comment vais-je me regarder en face si je trahis Galard avant même qu'on soit mariés ?

- Tu veux que je lui demande ?

- Pardon ?

- Si tu le veux, je lui demanderai.

- Ce n'est pas lui, Ran. C'est moi qui ne veux pas...

Et il la repoussa, avant de s'enfuir.

Guram  Tome1 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant