"Qu'un minuscule individu dans le vaste monde" Tolkien

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Lorsque revint Stan, c'est silencieux. Il n'était plus amusé ni taquin. Son air impassible et sa tension indicible ne plaisaient pas à Aéna qui choisit de ne pas y faire attention. Elle finirait par avoir une explication. Ne pas savoir à l'instant T n'était en rien dramatique. Que sera sera, dirait une amie anthropologue qu'elle connaissait.

Evan lui avait proposé de dîner ensemble. Elle espérait trouver de quoi se changer dans sa chambre, mais force était de constater qu'elle avait laissé la plupart de ses affaires chez son père.

De fait, elle était en route avec Jade et Stan dans les ombres de la ville, pour aller chez son père récupérer ses dernières affaires. L'aide des deux vampires était bienvenue pour ne pas devoir porter des caisses trop lourdes. Ainsi elle pouvait enfin récupérer toutes ses affaires. Elle avait écrit à Evan qu'elle allait récupérer ses affaires chez son père, ce à quoi il n'avait rien répondu. Il lui avait dit qu'il allait avoir une journée chargée lorsqu'ils avaient déjeuné ensemble au matin.

Elle savait qu'il n'aurait pas été enchanté par le fait qu'elle aille là bas, mais bon... Elle ne roulait pas sur l'or et surtout n'allait pas remplacer toute sa garde robe parce que son père était obsédé par l'idée qu'elle épouse Emer.

- Nous serons dans l'ombre, mais nous surgirons au moindre appel. Il est complexe pour nous d'entrer avec vous dans l'appartement, aussi merci de ne pas vous attarder là haut, avait demandé dans un sourire aimable Jade. Il suffit d'un appel, un bruit suspect, un éclat de voix, et nous arriverons, nous le promettons.

- Je vous fais confiance, sourit, rassurée, Aéna.

- Il faudrait que son père soit Chasseur pour nous être problématique, commenta Stan dans un rire léger.

- Toutes les familles ont leur lot de secrets, l'eut taquiné Aéna lorsqu'ils avaient quitté le Manoir.


Elle grimpa les marches qui la séparaient du second étage au pas de course,souhaitant enrer et sortir de cet appartement le plus vite possible. Elle sortit ses clés en même temps. Elle n'avait pas envie de perdre plus de temps : elle avait envie de pouvoir dîner paisiblement avec Evan, qui était la seule personne avec qui elle pouvait être elle-même sans se sentir en danger ou méprisée... Cette étrange sensation qu'était le confort en compagnie du jeune homme qu'elle n'avait que récemment rencontré la troublait, et la grisait à la fois. Elle voulait se complaire dans ce bien être, dans cette légèreté. Dans ce quotidien qui se présentait à elle et se montrait potentiellement paisible.

- Enfin, de retour, grinça un voix qu'elle reconnut lorsque la porte de l'appartement, ombragé par les tentures tirées, se ferma derrière elle dans un claquement sec.

- J'ai dit que je ne vivais plus ici, répondit-elle simplement, tentant de maîtriser l'affolement qui venait de prendre son cœur.

Son père était assis sur le fauteuil une place du salon, la fixant de son regard noir, ses prunelles se confondant avec la noirceur de la pièce.

-Alors que fais-tu là?

- Je viens récupérer mes affaires, répondit-elle d'une voix qu'elle ne reconnut pas : il la terrorisait. Elle n'osait pas s'opposer à lui. Elle n'en avait pas la force. Il lui avait fait trop de mal, verbalement, physiquement, pour que son corps passe outre ces traumatismes, cette violence.

- Tu n'as pas répondu à mon message.

Elle l'ignora, se dirigeant d'un pas vif vers sa chambre, au fond de l'appartement, pour commencer à ranger, de ses mains tremblantes, ses affaires, fourrant dans sa valise ses vêtements sans voir ce qu'elle emportait. Son père la terrorisait. Elle ne voulait pas trainer, elle voulait s'éloigner de lui...

- Aéna... Je te parle.

La proximité de la voix la fit sursauter, elle tourna un regard effrayé vers la porte, le voyant debout dans l'encadrure. Il lui faisait peur. Horriblement et foncièrement peur.

- Je n'épouserai pas Emer, répondit-elle.

Le visage vallonné de rides de son père se crispa. Son regard se fit acéré alors qu'il plissait des yeux. Il grogna, d'une voix presque inaudible :

- Pardon?

-J'ai dit que je ne l 'épouserai pas, répéta-t-elle, d'une voix à la fois ferme et tremblante. Pour trouver le courage d'appuyer son propos, elle lui tourna le dos, continuant ce qu'elle faisait.

Une vive douleur la traverse lorsqu'il s'empara de sa tignasse pour la forcer à se retourner, à lui faire face. Elle hoqueta, la souffrance semblant lui couper le souffle et la silencer... Il grogna, la regardant dans les yeux :

- Tu crois avoir le choix, Aéna ?

- Je...

- Tu n'as PAS LES CHOIX !

Les mots criés la tétanisèrent, la laissant dans un silence empreint de crispation et d'horreur. Il avait toujours été ainsi... Et elle qui croyait pouvoir vivre sa vie maintenant qu'elle avait une personne soutenante à ses côtés...

- Tu vas rester dans cette pièce jusqu'à l'arrivée de Emer. Il te fera sienne et tu cesseras enfin tes enfantillages.

Cette phrase dite, il la repoussa d'un geste brusque et violent, envoyant par la même occasion sa tête heurter le sol. Elle resta à terre, sonnée, alors qu'il quittait la pièce, fermant derrière lui à double tour sans un regard en arrière. Dans sa tête, la panique ne venait pas. Dans un état figé, tétanisée, elle entendait cette phrase résonner encore et encore dans ses oreilles : " tu n'as pas le choix" ...

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Au Nom de ma Liberté...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant