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Autour de la grande table qui s'imposait au milieu de la salle à manger, on pouvait compter la présence d'une dizaine de personne. Au petit groupe habituel on avait en surplus Cisco, Ben, puis la mère de Jaïa qui avait fait le déplacement depuis l'Oregon pour fêter le succès de sa fille. Jaïa s'installait enfin, déposant un large bol de salades sur la table, quand quelqu'un lui adressa:
-Alors comment tu te sens quand te voilà officiellement une auteure? Dit Aaron pour engager ouvertement la conversation.
-Hum Eh bien disons que je me sens comme une star. Elle répondit sarcastiquement. Dans quelques temps je ne vous adresserai même plus la parole.
-Je te brûlerai vive. Mary lança en feignant de la menacer avec sa fourchette.
La mère de Jaïa, Caroline, était assise à côté de Cisco. Ayant insisté pour être sa voisine de siège, ils discutaient à voix basse quand Caroline, pour s'adresser à Ben en face, dit hautement:
-J'espère que vous allez vous marier, vous êtes tellement beaux tout les deux.
-Maman! Fit Jaïa.
-Quoi? Je dis seulement ce que je pense. Ce n'est pas une mauvaise chose.
-Je l'espère moi aussi. Ben dit, pour répondre.
Cisco leva Les yeux vers lui, stupéfait de sa déclaration.
-Eh bien voilà! Tu vois j'avais raison ma chérie. J'espère aussi que tu vas épouser ma fille jeune homme. Caroline continua, maintenant se tournant vers Kai.
-Si ça ne tenait qu'à moi, ce dernier dit, on serait déjà marié votre fille et moi. Comme ça elle serait légalement prise au piège avec moi. Tu étais partie une journée hier, et je n'arrivais pas à m'en sortir seul; imagine si tu avais fais un jour de plus.
-Tu m'as blindé de messages et d'appels alors que je n'étais partie que pour une journée. Si je meurs là maintenant tu feras comment sans moi. Jaia dit avec un ton de rigolade.
-Que c'est beau l'amour. Peter dit ironiquement en buvant son verre.
-Tu dis toujours des sottises Jaïa! Caroline gronda à sa fille. Je n'aime pas quand tu parles de mort tout le temps, et encore, elle n'a pas sa place ici. Aujourd'hui est un grand jour pour toi et je n'aimerais pas attirer de mauvaises ondes.
-C'est vrai Jaïa aujourd'hui on ne devrait pas parler de ça. Ajouta Becky. Ça portera malheur.
-La mort c'est quelque chose de naturelle. Jaïa rit en haussant les épaules.
-Sois pas têtue! Dit Mary. Allez! Buvons ce bon vin au nom de ton livre et à ton succès.
Ils trinquèrent.
Le temps passa à la volée, leur petite réunion prît fin aux abords de six heures. Les invités partis, seule Jaïa restait avec Kai et sa mère. Cette dernière, ne voulant pas rester une heure de plus, désirait qu'on la conduise à l'aéroport afin de ne pas rater son vol. Jaïa s'offusquât, sa mère devait accepter de rester; au moins même pour la nuit. Têtue qu'elle est, Caroline refusait catégoriquement, son travail l'en empêchait.
-Maman je t'en prie arrête de tenir tête, dis-lui toi Kai qu'elle est trop têtue.
Il pencha la tête sur le côté, comme pour lui dire que elle aussi elle était têtue comme une mule. Sa seule réponse.
Jaia souffla.
-Maman, elle dit en se tournant vers sa mère, s'il te plaît reste.
-Ma chérie j'ai le boulot je ne peux pas, déjà...
-Tu n'as même pas besoin de travailler maman!
-Comment ça je n'ai pas besoin de travailler? C'est pas toi qui va me dire ce que je dois faire. Je ne suis pas une infirme, je ne suis pas si vieille, je peux travailler et je le ferai.
Jaïa souffla encore, mais cette fois-ci, de résignation. Ils la conduisirent à l'aéroport et deux heures après, environ, elle arriva à destination.

Les grands championnats universitaires d'automne débutèrent avec un retard d'une semaine, faute de préparation. Les équipes de football et de Volley-ball furent à l'honneur, au premier jour de la compétition. Kai se mêla aux fanatiques dans les tribunes, une énorme pancarte dans les mains.
Le match se termina avec la victoire de l'équipe de Jaïa. Sur les soixante quinze points en trois set de match, elle en avait mis à elle seule une trentaine. Ce qui avait valu les félicitations de ses coéquipières et de son coach. Coéquipières à l'exception de Yamela qui, après le coup de sifflet final, avait laissé tomber son masque qu'elle usait tout le long du match. Elle qui lui tapotait amicalement le dos à chaque points, était maintenant entrain de passer devant elle sans lui adresser le moindre mot. Le jeu était fait, plus de sympathie.
-Tu es la plus belle. Kai dit à Jaïa, la retenant par les épaules, et en déposant un baiser sur les lèvres. La plus forte. Il lui déposa un autre baiser sur la bouche. Et la plus intelligente.
-Merci. Jaïa répondit avec un large sourire.
-Tu as magnifiquement bien joué ma puce. Tu les a pulvérisés avec ton bras. Il dit en faisant le mouvement d'attaque avec son propre bras. Vraiment, je suis fier de toi.
-Je suis heureuse que tu sois fier de moi.
Elle dit en l'enlaçant.
Et avec un ton plus comique et taquin elle dit:
-Et je ne n'arrive toujours pas à croire que tu sois venu avec une pancarte. Où est donc passé ton orgueil d'homme.
-Ah comme ça je te fais honte? Répondit-il avec le même ton. Eh bien prépare toi car je vais faire plus qu'une simple pancarte à ton prochain match.
Ils rigolèrent longuement puis prirent ensuite le chemin de leur appartement.
Le cœur, pas seulement le cœur mais aussi tous les organes sensibles du corps, peut arriver à sentir son environnement d'épanouissement. Là où il se retrouve à l'aise, sans arrière pensée, sans inquiétude. L'esprit se vide de tout dommage et une sensation terriblement indescriptible y jaillit. Une forme d'amour, quand même.
Tous les événements qui se passèrent ensuite relevaient en grande partie, des moments du tournoi. Jaïa et Kai allaient suivre, quand cela était possible, les matches de football de Kyle, devancés de Mary qui criait au bord des tribunes pour supporter son petit-ami.
-C'est comme ça que je suis aussi dans les tribunes de tes matches? Kai demanda stupéfait, pointant Mary du doigt.
Jaïa hocha la tête positivement, ne pouvant s'empêcher de s'esclaffer.
-J'ai honte.
-Pourquoi? N'est ce pas ta copine chérie que tu supportes?
-J'ai honte parce que toi tu ne ferais jamais ça.
-C'est vrai tu as raison.
Le lendemain, premier match de saison pour Kai, dans l'après-midi, Jaïa criait dans les tribunes. Elle en riait, pensant bien que cela semblait sans doute ridicule mais elle le faisait, pour Kai. Bien qu'ils perdirent le match, elle essayait de le détendre. Dans la voiture, elle conduisait, une main sur la cuisse de son copain.
-Mon cœur c'est juste le premier match. Elle dit pour le calmer. Ne t'inquiète pas, vous allez certainement gagner les autres, j'en suis sûre.
-Je sais bien que tu dis ça pour me faire plaisir.
-Quoi? Non! Ok, oui un peu mais ce n'est pas de ta faute. Tu n'y es pour rien, tu t'es bien débrouillé.
-Si tu le dis.
-Comment ça si je le dis? C'est la vérité c'est tout.
Ils gardèrent quelques secondes de silence.
-Et tu as vu? J'ai crié pendant tout le match, à chaque fois que tu marquais un point.
Kai sourit.
-N'est-ce pas un sourire que je vois là? Jaïa dit. Ça a pris pas mal de temps mais j'y suis arrivé. Tu crois que je devrais m'inscrire au Comédie Club?
Kai rit encore.
-Tu n'es pas drôle du tout. Il dit pour l'embêter, fermant derrière lui la porte d'entrée de leur appartement.
-Pas grave, il y en a certainement plein de pas drôle au Comédie Club et ils font quand même de l'argent. Mais devine quoi?
-Quoi?
-Tu en as une à ta disposition ici, rien qu'à toi, et ceci, gratuitement.
-Que je suis chanceux! Il dit en la ramenant à lui.
Ils se regardèrent fixement un moment.
-Je suis désolé pour tout à l'heure, j'étais énervé pour rien.
-C'est pas grave, j'aurais sans doute agi pire si j'avais perdu moi aussi. Fais-moi un câlin.
Ne se faisant pas prier il s'exécuta. Le temps de frustration était passé. L'espace de ce moment, il avait tout oublié de sa colère et de sa défaite. Les bras de Jaïa lui étaient un refuge, il s'y abandonnait.

Le surlendemain samedi, fini l'entraînement de la journée, Kai se dirigea vers la salle où celui de Jaïa se passait. Son visage se referma puis prit une expression plus sévère lorsqu'il passa la lourde porte qui se dressait devant lui à l'entrée.
Il s'avança et embrassa langoureusement Jaïa, une main lui entourant la taille.
Gray Foster qui se tenait là, paru submergé de gêne, détourna alors les yeux du spectacle devant lui.
Jaïa lui sourit timidement, n'étant pas dupe elle comprit tout de suite son geste et lui passa à son tour sa main à la taille.
-O.K. Gray Foster dit, sentant la tension monter. Je crois que je vais y aller maintenant. Encore une fois félicitations pour ta victoire Jaïa. Kai. Il dit simplement pour le saluer avant de tourner les talons.
-Pas besoin de t'énerver mon cœur il me félicitait juste pour le match. Jaïa dit en prenant les devants.
-Tu lui souriais.
-Je croyais que l'on devait faire comme ça quand quelqu'un nous complimentait non?
Il lui lança un regard noir, la reluquant de haut en bas.
-Ne me regarde pas comme ça. Elle dit en riant.
-Moi je rentre chez moi.
Il prit les devants, ce qui n'était pas dans ses habitudes.
-Attends-moi! Jaïa dit, courant presque pour le rattraper au pas. Tu ne portes pas mon sac aujourd'hui?
-Je n'ai pas envie.
-J'ai mal au dos.
-C'est ton problème. Il dit sèchement, ne s'arrêtant pas.
Jaïa le surpassa puis, étant à présent devant lui, se jeta à son cou, serrant fortement ses bras derrière sa nuque.
-Ne me fais pas ça s'il te plaît. Elle dit.
-Tu vas me casser le cou Jaïa arrête ça.
-Sauf si tu arrêtes toi aussi.
Il expira bruyamment puis la souleva, les pieds de cette dernière s'enroulèrent autour de ses reins. Elle sourit dans sa nuque.
-C'est moi ou tu es entrain de sourire? Il lui demanda. Fais attention à ta tête.
Il la déposa délicatement sur le siège passager du véhicule.
Elle lui sourit encore comme seule réponse.
-Pourquoi je ne peux pas te résister?
-Parce que tu m'aimes. Dit-elle. Tu m'aimes et moi aussi je t'aime. Elle continua en glissant sa main le long de sa cuisse.
-Tu comptes nous faire tuer ou quoi? Kai lui dit sentant quelque chose lui parcourir le corps au contact de sa paume. Attends qu'on arrive chez nous c'est mieux.
Têtue qu'elle était, elle courba sa tête au niveau de son entre-jambe. Malheur, une poussée de vitesse la propulsa contre le volant et l'arrière de sa tête prit un terrible choc. Elle pleurait presque, Kai ne s'arrêtait pas de rire.
-Ça te fait mal? Il lui demanda enfin, se retenant d'éclater de rire encore.
-Non c'est bon.
-Tu es sûre? Pourtant ça saigne.
-Quoi? C'est vrai? Dit-elle, ôtant alors la main qui retenait l'arrière de sa tête, pour vérifier.
Voyant qu'il se moquait ouvertement, elle lui jeta un regard furieux.
-Ne me parles plus je te préviens, ou c'est moi qui vais te tuer là maintenant.
-Tu aurais dû voir ta tête. Rigola t-il.
-Arrêtes c'est pas drôle du tout Isak.
-D'accord j'arrête mais mon dieu! Il y a du sang qui coule derrière ta nuque.
Jaïa vérifia encore et encore une fois elle vit qu'il se moquait. Furieuse, elle se mit à se déplacer vers les sièges arrières de la voiture et ignora complètement Kai tout le long du trajet, malgré ses tentatives désespérées pour lui adresser la parole.
À dire qu'ils n'étaient en froid que sur la route car arrivés à destination, s'en était tout autre chose. Elle avait oublié sa colère ou bien du moins, elle n'était qu'intérieurement furieuse car son corps répondait gravement et intensément aux lèvres, au toucher et aux avances de Kai, qui s'était grandement débrouillé pour la rapprocher.
Ils étaient corps à corps à présent, qu'importe l'antérieur état de leur embrouille.

    De l'autre côté Où les histoires vivent. Découvrez maintenant