Chapitre 16

423 28 3
                                    

C'était pour aujourd'hui. C'était décidé. Baji allait se déclarer aujourd'hui. Après tout, c'était le meilleur moyen pour que Mikey arrête ses conneries non?...le noiraud n'avait pas pu rester chez lui. L'heure du rendez vous avec le blond approchait dangereusement mais sa nervosité ne lui permettait pas de juste attendre. Il déambulait donc dans les rues de la ville en réfléchissant vainement à ce qu'il pourrait dire pour exprimer ses sentiments. Il voulait éviter d'être trop maladroit. Il avait envisagé de lui écrire une lettre. Mais à peine eut il essayé de coucher les premiers mots sur le papier que la tâche l'avait déjà ennuyé et il avait fini par jeter le papier à la poubelle. Il n'avait vraiment pas l'habitude de réfléchir de la sorte. Il ne réfléchissait jamais avant de parler. Et il n'était certainement pas réputé pour ses talents d'orateur. Lui, il était plus doué pour frapper avant de parler. Mais dans ce cas précis, ça ne l'aidait pas. Le problème c'est qu'il ne savait pas poser les mots sur ce qu'il ressentait. Il ne voulait pas juste dire "je t'aime". Parce qu'il ne l'aime pas! Il aime sa moto, il aime les nouilles. Il aime ses amis, il aime le gang...mais quand il pensait à Chifuyu, c'était beaucoup plus fort que ça. Comment faire comprendre cette nuance alors que le verbe "aimer" est employé à tord et à travers pour tout et n'importe quoi?
Il n'était pas un putain de poète! Il voulait partager ces nouveaux sentiments simplement, sans prise de tête. Mais aucun mots ne lui semblait en mesure de porter ce qu'il ressentait envers son meilleur ami.

Plus que quelques minutes les séparaient de leurs rendez vous. Étant donné qu'il était déjà dehors, Baji envoya un message à Chifuyu pour lui proposer de directement le rejoindre près d'un petit fleuve. Le blondinet accepta, il était de toute façon sur le départ. Rien ne lui faisait plus plaisir que la perspective de passer une après midi en compagnie de Keisuke. Bien que depuis un moment déjà, une petite voix ne cessait de lui dire qu'il devrait arrêter d'enfouir ses sentiments qui se faisaient de plus en plus fort à mesure qu'il cherchait à les enfouir. Mais il ne se sentait pas près à risquer de perdre son amitié. Il était déjà heureux de pouvoir être si proche de lui.

Là dessus, le blondinet mit enfin le nez dehors et commença à presser le pas. Même si c'était Baji qui avait changé le lieu de rendez vous et qu'il ne lui en tiendra donc pas rigueur si il avait quelques minutes de retard, il voulait éviter de trop le faire attendre.
Alors que le jeune homme coupa par une allé, il sentit une main brusquement agripper son poignet et son corps fut projeté dans une ruelle. Se dressa devant lui un groupe d'homme qui lui parurut un peu plus âgé. Ils étaient sûrement au lycée.

-T'es du Toman toi non?

Sous l'effet de la surprise, Chifuyu ne réalisa pas tout de suite que l'un de ses agresseur s'était directement adressé à lui.

-Bah alors? T'as pas les couille de...
-Chifuyu Matsuno, vice capitaine de la première division du Toman. J'suis pressé là alors barrez vous. Je risque pas d'avoir peur de mecs comme vous.

Un sourire se dessina sur le visage de son interlocuteur.

-Vous foutez quoi là ? C'est pas Baji ça.

Le groupe s'écarta pour laisser passer ce qui était à l'évidence leurs chef. À l'évocation du nom de l'ébène, le corps de Matsuno se tendit.

-Qu'est ce que vous lui voulez?
-Chef! C'est son second. Chifuyu Matsuno.
-Hm...

Le regard de l'individu se reposa sur le blondinet. Ce dernier serra les dents.

-Vous lui voulez quoi bordel?!
-Rien de personnel. Le Toman est notre ennemi. Baji fait parti de vos meilleurs éléments. Si on l'élimine vous serez affaibli. C'est de la pure logique blond...

Chifuyu venait de lui donner un coup de poing. Pour qui se prenaient ils?! Parler de Baji comme si il pourrait être balayé comme un insecte! Et devant lui en plus! Comme si il allait laisser faire !
L'homme passa sa main sur le coin de ses lèvres où une traîné de sang venait de couler suite au coup.

-T'as fait une grosse erreur blondinet. Je me disais qu'on ferait mieux de se concentrer sur Baji et de te laisser partir. Mais puisque tu le prend comme ça...

Ignorant encore ce qui se passait à quelque rue de là, Baji s'était allongé dans l'herbe en attendant l'arrivée du plus jeune. Il leva l'écran de son téléphone au dessus de son visage pour lire l'heure. Ça faisait une bonne demi heure qu'il attendait là. Leurs immeuble n'était qu'à quelques minutes à pied. À moins de venir en rampant, Chifuyu devrait déjà être là depuis un moment. Son impatience commençait clairement à ressortir. Encore plus au vu de la déclaration qu'il avait prévu de lui faire. Il se décida donc à l'appeler. Il entendit la sonnerie retentir une fois, deux fois, trois fois...et enfin le blond décrocha.

-Chifuyu? Qu'est ce que tu fout, tu t'es perdu ou quoi?!

Pour seul réponse, Baji n'entendit qu'une respiration saccadé qui s'entrecoupaient de ce qui ressemblaient à des sanglots. Baji se redressa subitement.

-Chifuyu ? Il s'est passé quoi? T'es où ?!
-J...je...j'étais sur le chemin et...je sais pas...je...

Sa voix était tremblante. Keisuke se releva immédiatement et se lança sur le chemin qu'aurait dû prendre Chifuyu en partant de leurs immeuble.

-Bouge pas je vais te trouver !

Chifuyu voulut lui crier de ne pas venir. C'était lui que ces mecs cherchaient. Peut être qu'ils étaient encore dans les parages. Mais la boule qui s'était formé dans sa gorge l'empêchait de formuler ne serais ce qu'un mot de plus. Et ce fut alors que la communication fut coupé. Baji venait de raccrocher. Ça faisait plusieurs minutes que Chifuyu avait été laissé là. Il se releva lentement. Ses jambes étaient engourdi et son pas se faisait chevrotant. Chaque partie de son corps le faisait souffrir. Mais il devait intercepter Baji à tout prix. Son esprit était totalement embrouillé. Si bien qu'il ne fut même pas sûr d'avoir pris la bonne direction.
Lorsqu'il sentit une main attraper fermement son épaule, son sang ne fit qu'un tour. Il se retourna brusquement.

-Non! Lâche moi!!

Son poing vint mécaniquement s'écraser à plusieurs reprises contre le torse de Baji. Il n'y avait aucune force dans ses coups. Keisuke cherchait à le calmer. Mais dès qu'il tentait un geste rassurant, Chifuyu se débattait.

-Chifuyu ! C'est moi! Hé !... C'est moi!...

Chifuyu releva enfin les yeux vers lui. Il plongea son regard dans le siens et s'immobilisa. Le brun fut horrifié. Le visage du blond était couvert d'hématome et de sang qui avait même tâché ses vêtement.
Au début de l'affrontement, Chifuyu n'avait pas eut de mal à maîtriser plusieurs type. Mais rapidement, le groupe de délinquant qui avait déjà l'avantage du nombre eut recours à des armes. Il s'était fait déborder et ruer de coups. Et pour la première fois, l'angoisse l'avait envahi. Il était devenu incapable de riposter. Son corps ne lui obéissait plus. Il lui avait semblé que l'agression avait duré des heures.
Le blond ne parvint plus à tenir debout. Les bras de Baji était automatiquement passés dans son dos et il se mit à genoux avec lui.

-C'est moi...
-Keisuke...

Chifuyu se réfugia dans les bras du plus grand.
Il l'avait enfin appelé par son prénom. Mais Baji aurait tout donné pour que ce soit dans d'autres circonstances. Jamais il n'avait vu Chifuyu dans un état pareille.

-Chifuyu...

Le choc empêchait Chifuyu de bouger. Des larmes dévalaient sur ses joues. Il empoigna un bout du haut de Baji qu'il serra. Sa seule présence suffisait à calmer ne serais ce qu'un peu les battements effrénés de son coeur.

-Je t'aime...

Baji ne réfléchissais jamais avant de parler. C'était les seuls mots qui avaient passés le bord de ses lèvres. Ce foutu "je t'aime" qu'il avait trouvé beaucoup trop simple et commun pour décrire ses sentiments. Il l'avait prononcé d'une voix calme et douce. Lui même en était étonné. Il ne savait pas qu'il pouvait adopter un ton comme celui là. Ses bras avaient rapproché le corps du plus jeune du siens avec toute la délicatesse dont il pouvait faire preuve. C'était comme si au moindre geste brusque Chifuyu pourrait se briser...
Il comprenait la nuance maintenant. Elle ne résidait pas tant dans les mots employés. Mais plutôt dans la façon de le dire.

Pour Te ProtégerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant