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Au fil des séances, Betty avait remarqué qu'il y avait dans l'air trop de pathos à son goût, et, après deux mois, elle décida de prendre rendez vous chez un psychiatre et d'arrêter les séances de parole. Une fois cette décision prise, elle se rendit donc dans le bâtiment, puis toqua à ce que Sam considérait comme son bureau.

- Entrez ? déclara t il, d'un air interrogatif.

Elle appuya sur la poignée, et il posa un regard intéressé sur elle.

- Tout va bien, Betty ?

Elle hocha la tête, et demanda à s'asseoir.

- Je t'y autorise, se moqua t il gentillement.

La jeune femme leva les yeux au ciel, avant de se tourner vers lui.

- Je ne reviendrais pas au groupe de parole.
- Quoi, pourquoi ?
- Du calme, Cendrillon, ricana t elle. Je pense juste que ça ne me va pas vraiment.
- Oh, je vois.
- Je vais aller voir un docteur, ne t'en fais pas, je ne serai pas seule, répondit elle, anticipant sa prochaine question.
- Je suis prévisible à ce point ?
- Tu n'imagines même pas.

Sam l'observa avec un petit pincement au cœur, réalisant que c'était la dernière fois qu'il la voyait, et qu'elle allait terriblement lui manquer. Treize ans les séparait, et il aurait dû se rendre compte que c'était effectivement une chiffre de malchance. Betty se leva, d'un geste vif, et posa un regard amer sur Wilson, avant de se diriger vers la porte. Elle respira, la main sur la poignée, puis se tourna.

- Je vais probablement dire quelque chose de faux. Tu voudrais qu'on se voit ? proposa la jeune femme, les lèvres pincées de crainte.
- Qu'on se voit ? répéta t il.
- Heum, oui. Au restaurant. Ou chez moi.
- Chez...toi...?

Betty donna un coup de talon sur le sol, alors que son visage s'empourprait, et détourna les yeux.

- Je te charrie. Demain, chez moi ?

La brune eut un rictus ravi, et hocha la tête, avant de pivoter à nouveau, avec l'impression d'être observée par Sam. Elle laissa à nouveau ses yeux s'aventurer, et croisa son regard rieur. Elle revint sur ses pas, lui fit face et il eut un ricanement :

- Tu essayes d'être impressionnante ?

Elle l'ignora et pressa enfin sa bouche contre celle de l'homme, qui ne la repoussa pas, bien au contraire. Quand ils s'éloignèrent, Betty croisa son regard, et ôta ses mains des épaules de Sam.

- Je vais y aller, annonça t elle.
- Tu fuis ? la provoqua t il

Elle plaqua ses bras sur sa poitrine, les lèvres pincées, et lui jeta un regard noir, avant de s'enfuir de la pièce.

- Oh, Betty, sérieux ! s'exclama l'homme derrière elle, alors qu'elle se tournait vers lui et lui jetait un sourire malicieux. Idiote, murmura t il, en fermant la porte.

* * *

Le lendemain soir, elle toqua à sa porte, habillée de sa tenue la plus belle, et attendit patiemment qu'il lui ouvre, ce qu'il fit presque immédiatement.

- Bonsoir, annonça t elle, avec un rictus, qu'il ne prit pas le temps d'observer, puisqu'il l'embrassa, l'attirant près de lui, et ce en fermant la porte d'une seule main.

Quand elle s'éloigna, elle lui lança un regard surpris.

- Bon sang, dis bonjour, au moins, murmura t elle, abasourdie, en se passant les doigts sur les lèvres.
- Une vraie vieille, elle tient à sa politesse, la grand mère, répondit il avec un air joueur.
- Argh, j'étais maquillée, se plaint elle.
- Une grand mère, ou une casse pied ?

Betty le foudroya du regard, avant de fondre sur ses lèvres, en murmurant, "Tu verras, si je suis une vieille". Ils ne se firent pas attendre plus longtemps, tant ils se désiraient l'un et l'autre depuis un long moment.

Une fois leur désir rassasié, ou du moins pour l'instant, ils retournèrent dans la cuisine, où Sam constata avec malheur que son plat était à nouveau froid.

Elle embrassa son dos, et murmura :

- C'était le prix.
- Le prix de quoi ? se moqua t il.

Elle l'ignora, et attrapa à nouveau sa chemise blanche, qu'elle enfila. Sam lui lança un regard ému, voire déçu, mais devant lui, elle referma chaque bouton avec attention.

- Grand mère, ou sorcière ? se demanda t il, en allumant le gaz.
- Sorcière, répondit elle en jouant avec son collier.
- Tu as l'air tellement fière de le dire.
- Tu imagines même pas. Je trouve ça tellement fascinant les sorcières. Inez m'en parlait beaucoup, et j'en ai appris des tonnes. Surtout sur comment elles étaient torturées.

Une douce odeur commençait à s'échapper de la casserole, alors Betty s'approcha, observant avec attention Sam.

- Je vois.
- C'est prêt ? s'intéressa la femme.
- Bientôt.
- Oh, c'est long.
- Tu es vraiment une enfant insupportable.

Elle leva les yeux au ciel, et s'assit sur le plan de travail, récoltant un regard effaré de Sam.

- Ne t'en fais pas. Le feu, ça me connaît, en tant que sorcière, ricana t elle.
- Sûre de ta blague ? ria Sam. Parce que je suis pas sûr que le feu et les sorcières soient vraiment les meilleurs amis.
- Mais si, bien sûr.

Elle appuya son crâne contre le meuble, et soupira en voyant Wilson continuer de mélanger le plat. Elle attrapa son épaule, et garda sa main dessus, alors qu'il cuisinait encore.

- C'est fait ! annonça l'homme, et elle sauta sur le plancher.
- Alléluia, murmura t elle avec joie.

Ils s'installèrent alors à table, en face l'un de l'autre, puis commencèrent à manger.

- C'est plutôt bon, complimenta la femme avec perplexité et lenteur.
- Tu n'as pas l'air convaincu.
- Je pensais que tu allais le rater, déclara t elle avec un rire.

Il écarquilla les yeux, l'air outré, et elle pouffa.

- Pitié, ne me regarde pas comme ça, tu as une tête de mauvais cuisinier, se justifia la femme
- Non mais quel cliché ! Je rêve !
- C'est un cliché ?
- Même si c'en est pas un, je décide que c'est est un. Point final.
- Oh, tu modifies les règles du jeu, comme ça ? Je vois, d'accord.
- Quand tu t'énerves, on dirait une mouche qui essaye de se débattre d'une toile d'araignée.

Elle lui fit une moue boudeuse, et lui adressa un coup de pied.

- C'est mignon une mouche, prétexta Sam en riant.
- Bien sûr, c'est ça. Tu vas voir ce qu'elle va faire la mouche.

Il eut une expression mi-surprise, mi-exaspérée, puis soupira.

- Tu es adorable.
- Tais toi, et mange, bougonna la jeune femme.

Sam sembla lui adresser une expression joyeuse, et elle continua de manger. Après ce repas, le couple alla prendre une douche et s'installa dans le lit, en regardant la télévision.

Bien sûr, comme à son habitude, Betty gigotait, mal à l'aise, sur le lit, et il se tourna vers elle.

- Toi aussi ?

Elle comprit, et hocha positivement la tête, alors il la convia à descendre par terre, pour s'installer au sol. Elle l'aide à pousser le lit, et ils s'assirent ainsi, le bras de Sam autour de ses épaules, la main de Betty sur la cuisse de l'homme.

- On est mieux, par terre, déclara t il, tout bas.

Elle se tourna vers lui, sourit et susurra :

- Oui. On est mieux.

La jeune femme se glissa pour délicatement embrasser les lèvres de Sam, qui l'attira contre lui.

BRISE LE LIEN [Bucky Barnes] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant