Liam voulait arrêter la fac. Même si lui seul pouvait influer sur sa propre existence et je ne pouvais pas l'empêcher de la mener comme il l'entendait, je sentais qu'il faisait une grosse bêtise. Et cela n'allait pas plaire à nos parents. Il avait déjà renoncé à l'Université de l'Illinois à Urbana-Champaign, et maintenant, il voulait tout abandonner, parce qu'il considérait que ce n'était pas une vie pour lui. Et peut être que dans vingt ans, il se dirait que la vie qu'il avait abandonné en laissant tomber la fac aurait été meilleure et qu'il avait tout gâché. Mais on ne pouvait malheureusement pas prédire l'avenir pour convaincre les personnes qu'on aimait.
Notre échange ne s'était pas envenimé. Il m'avait expliqué que la vie que nos parents voulaient pour lui ne lui convenait pas. Il n'était pas fait pour rentrer dans une case comme on avait appris, comme tous les gens ici avaient appris. Etre normal.
Etre brillant sportivement et académiquement, aller dans une bonne fac, trouver un métier qui paye bien et qui offre une vie confortable, se marier, acheter une maison, avoir des enfants pour finir par se demander ce qu'on avait fait de notre vie. Cela était passé trop vite mais on ne savait pas trop ce qu'on avait fait, à part attendre. Mais attendre quoi?
Liam ne voulait pas attendre. Il voulait voyager, faire de belles rencontres, puis voir après si la vie bien rangée dans une case ne lui conviendrait pas. Il voulait essayer.
Peut être que c'était ça, la réponse, essayer. Essayer d'être quelqu'un de nouveau, essayer de vivre différemment, essayer d'appréhender différemment le poids de la vie.
Avais-je une fois essayé dans ma vie?
Non, parce que j'avais peur. J'ai toujours été étreinte par la peur. La peur me gardait en sécurité, même si en échange elle prenait toujours un peu de moi. Mais je me suis accommodée à ce sentiment. La vie dans une case était sans doute celle qui était faite pour moi.
Le soir, avant le repas familial du dimanche, je suis allée voir mon frère dans sa chambre. Une petite voix dans ma tête me disait toujours que j'avais blessé la personne à qui je m'étais adressée avec bienveillance. Je regrettais toujours le choix de mes mots, ou de les avoir prononcés tout court. Mais Liam était mon frère, et on avait assez grandi pour se parler sans que cela ne finisse en dispute, même quand il s'agissait de sujets délicats. Pourtant, quand il m'a vue appuyée à l'encadrement de la porte, je me suis dit que j'allais paraître pathétique de m'excuser alors qu'il ne m'avait jamais signifié que je l'avais blessé.
- Merci de me l'avoir dit en premier.
- Tu es ma sœur. Je pense que tu es assez compréhensive pour que je te le dise.
Je me suis tue. Il a tourné la chaise de bureau sur laquelle il était assis vers la fenêtre pour admirer le ciel empli de nuages et les arbres secoués par le vent. L'atmosphère extérieur était sombre et désolant alors qu'il était à peine dix-huit heures. C'était ça, l'automne, le retour vers les jours gris de l'existence. J'ai poussé un soupir.
- Pourquoi tu soupires? a demandé Liam.
- Je ne sais pas. Je pensais qu'on était quand même bien ici.
On n'avait jamais été aussi proches. En prendre conscience me réchauffait le cœur.
- C'est-à-dire?
- Laisse tomber.
Tout le long du dîner, je me suis demandée si Liam allait leur dire, même si cela me semblait précipité. On connaissait parfaitement la réaction de nos parents quand on leur annonçait quelque chose qui ne correspondait à la vision de la vie qu'ils nous avaient prévus. De toutes manières, je n'avais pas vraiment songé à m'éloigner du chemin tout tracé.
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Ephemeral Blue
Teen Fiction" Tu es parfaite, Novela" "Personne n'est parfait" "Alors tu es presque parfaite" Novela fait tout. Novela sait tout. Novela aime tout le monde. Elle est sage, sa parole ne dérange pas. Certains la remarquent, d'autres non. Toute sa vie est bâtie su...