CHAPITRE 2 : Tamariel [1/2]

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Dans la Ménagerie, je soignais les blessures d'un fauve assommé. Une petite vengeance de Salil. Quelques pansements plus tard, huit gaillards étaient réquisitionnés pour l'installer dans son box.

En repassant par le portail de la Carrière, harassée, je pensais encore à la manière la plus simple de ramollir le lionceau. On l'avait trouvé à moitié mort de douleur non loin du camp, sans doute le fait d'un chasseur. Réfléchissant à une solution, j'avisai simplement le grillage rouillé de la pépinière, adossé à une réserve de grain. Une vague idée germa dans mon esprit mais je la remis à plus tard.

Suri débitait son cours dans une chaleur peuplée de grincements de craies sur l'ardoise. Dans son dos, la bouteille de Xütz faisait le tour de la salle. C'était la boisson préférée des apprentis. Aku, sur mon épaule, observait cette joyeuse débauche du coin de l'œil. Je fis semblant d'en boire à mon tour_ refuser était vu comme séditieux.

La conversation couvait ça et là. On parlait de la chaleur, du vieil Isil que personne ne regretterait, de son remplaçant, des derniers potins du Foyer, et d'Azalé qui refilait du minélésium à tout ceux qui lui dénichaient des ouvrages intéressants. La craie dorée crissait toujours dans la main du professeur.

__ Ton contrôle ? chuchotai-je en me penchant vers Yeleen.

__ Pas terrible.

__ Qu'est ce qu'on vous a demandé, cette fois ? Un exposé oral sur les cataplasmes ?

__ Non, Ivary nous a tendu à tous une feuille vierge pour disserter sur les os brisés. Un piège ! s'insurgea-t-elle.

__Malia et elle vous ont demandé les bases, c'est ça ? J'aurais dû m'en douter, elles le font chaque année.

Je lui fis part de l'insolite événement qui s'était produit à la Ménagerie. Un lion dans le Foyer ? Nul doute que cela allait se répandre comme de la poudre.

Inconsciemment, Yeleen avait parlé si fort que Suri jeta un œil derrière son épaule, pour découvrir une classe parfaitement sage qui ne tarda pas à grouiller de nouveau lorsqu'il se retourna. Des regards courroucés se braquèrent sur nous.

Une agitation gagna soudain le dehors et je vis mes camarades tordre le cou pour apercevoir quelque chose. Ce n'était pas encore l'heure mais le tambour gronda. Les ardoises volèrent et les élèves délaissèrent leur professeur, ahuri devant leur empressement. Intriguée, je rejoignis Sala accompagnée de Kalid et de la séri. Le beren nous avait lâché pour partir aux premières loges.

__ Que se passe-t-il ?

Sala me regarda comme si je venais du petit continent. Ce fut Yeleen qui me répondit :

__ Un nouveau convoi vient d'arriver. Une trentaine d'apprentis à ce qu'il parait.

Sala plissa ses yeux, amusée.

__ Si tu étais avec nous tout à l'heure, Nazara te l'aurait appris ! C'était dans une rubrique du soleil. Un convoi d'apprentis avait déjà été signalé par les gens de Siloé.

__ Un truc pareille est relayé par les feuilles de chou ?

__ Avoue que ce n'est pas rien, tout de même ! Un aussi gros convoi ne passe pas inaperçu !

__ On va surtout le manquer, votre convoi, intervint calmement Yeleen. Dépêchez-vous.

Elle avait pris de l'avance, avec Kalid qui semblait impatient de connaître le fin mot de l'histoire. Nous traversâmes le Foyer déserté où pas un seul apprenti n'était demeuré. L'arrivée d'un convoi était tout de même un évènement.

La foule se pressait à vingt mètres autour de la palissade.
Au milieu du cercle ainsi formé, le flot bigarré des nouveaux arrivants nous dévisageant avec une curiosité insatiable. Ils semblaient un étrange troupeau entouré par les prédateurs que nous représentations.

Les Légendes De MagadãnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant