CHAPITRE 7 : Parsemé d'éclats brisés [1/1]

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Un bras après l'autre, je me hissais sur l'arbre. Le sifflement agaçant de l'énergumène me parvenait. Soigneusement calé contre la branche d'un arbre_ et pas la plus basse_ il me narguait sournoisement en effeuillant les pages d'un mystérieux carnet à la reliure rouge. Je me propulsais à la vitesse d'un caméléon, le front plissé et luisant de sueur. Je fermai les yeux pour mieux me concentrer.

__ Bouh.

Quand je les rouvris, Kalliel se trouvait la tête à l'envers, le visage à quelques centimètres de moi. Je poussais un long cri et lâchais prise. Le jeune homme me saisit le bras d'une poigne ferme et me hissa jusqu'à sa branche.

__ Mais tu es fou ! fulminai-je tandis qu'il reprenait sa pose l'air de rien. Espèce de... de... désaxé !

Et comme il m'ignorait, je renchéris :

__ Et qui a idée d'aller se planquer dans un arbre, hein ? Un arbre !

__ C'est pourtant l'endroit où tu te sens le plus en sécurité au milieu d'un bois.

__ Hum, désolée, fis-je avec ironie, mais je ne "sens" rien de tel et sûrement pas de la sécurité.

La profonde hauteur de l'arbre s'ouvrait sous moi comme une abysse.

__ C'est parce que tu as la frousse, argua-t-il alors.

__ Je n'ai pas la frousse ! tiquai-je. Tu fais des sursauts de solitude ou quoi ? Des crises de misanthropie ?

__ J'ai juste besoin de mon espace. Et ton effarement m'étouffe, Tamariel.

__ Navrée d'être choquée par un massacre qui s'est déroulée sous mes yeux, ironisai-je.

Mais déjà Kalliel ne m'écoutait plus. Sifflotant et feuilletant son carnet, il avait replongé dans l'une de ses crises d'indifférence si réccurentes. Je me surpris à l'observer, comme désireuse de percer son secret à jour et de lever les mystères qui planaient sur lui. Laissée en plan un peu plus tôt, j'avais aussitôt recherché la compagnie du jeune homme pour ne pas retrouver ma solitude. J'avais peur d'à nouveau cauchemarder. J'avais peur d'avoir fait une bêtise.

Avec un claquement de langue agacé, il plissa ses yeux d'irritation :

__ Tu as bientôt finit ? Tu vas finir par te crever les yeux à force, Amour.

__ J'essaie de comprendre, articulai-je.

Il se pencha sur moi pour claquer une araignée sur mon épaule, le tout sans relever les yeux.

__ Ne cherche pas à savoir ce qui ne te regarde pas.

__ Tu mets trop de mystère ! reprochai-je. Comment veux tu que je te fasse confiance ?

__ Essaie. C'est vexant à force.

__ Tu oublies que je ne connais ni d'où tu viens, ni ton passé, ni tes mœurs.

Dis ainsi, c'était peut-être vexant mais lui aussi n'avait aucun tac.

__ Et si je demande ce que tu faisais près du Foyer tu vas encore m'envoyer balader ?

__ Ça, ce n'est pas tes affaires... sale gamine fouineuse !

Je soupirai.

__ La phrase de tout le monde ! Ne pouvais-tu pas faire preuve d'un peu plus... d'imagination ?

Le sarcasme le fit tiquer.

__ Bon, qu'est ce que tu veux ? s'irrita-t-il. Tu as bientôt finit de me soûler, au moins ?

__ Tu me fais penser à N'Della, fis-je sans réfléchir. Elle aussi avait beaucoup de secrets...

__ Tu reconnais être une sale peste alors ? argua-t-il. Et puis vous n'aviez pas mieux à faire que de vous amuser en commères entre apprentis ? Comment elle s'appelait la copine du béren, Saly, c'est ça ?

Les Légendes De MagadãnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant