CHAPITRE 1 : Le Foyer Ardent [2/2]

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Tous, nous convergeions vers la Carrière, à l'autre bout du Foyer. Les apprentis quittaient les alats par petits groupes homogènes, s'attardant sous un abri pour échanger gaiement puis reprenant leur chemin. Berens, séris, salomiens, thétys. Les apprentis venaient d'un peu partout dans la région, chacun avec son histoire propre, chacun avec ses rêves et ses désirs, tous sous l'autorité royale par l'intermédiaire de notre chef. Bien évidemment, les cayoriens restaient les plus nombreux. Quoi qu'il en soit, Askil menait son petit monde comme le berger son troupeau, c'est à dire au pas.

Kalid marchait à mes côtés. Quelques apprentis voyant en moi la fille de la Guérisseuse du Foyer, me lancèrent des saluts joyeux. Je leur rendis la politesse, un brin agacée.

En deux mois, j'avais reçu beaucoup de novices souhaitant sympathiser avec la fille de la très respectable soigneuse, très probablement dans un but très intéressé. Embarrassée, je n'avais pas eu à cœur de leur faire savoir que Malia n'était malheureusement_pour eux_ que ma tutrice, qu'elle tenait mon opinion avec autant d'estime que celle d'un de ces charmants pots d'argile qui lui servaient dans ses préparations, et que par conséquent, aucune de mes intervention auprès d'elle en leur faveur ne saurait avoir le pouvoir de hâter leurs projets quels qu'ils soient. Il avait bien fallût refroidir leurs ardeurs, pour préserver ma tranquillité.

 

__ A ton avis, les rumeurs évoquées par Nazara seraient sérieuses ? Demanda Kalid.

__ Si c'est au sujet des rebelles du sud, je-...

  __ Non, je veux parler du professeur Sisil. Tu crois vraiment qu'il a été remercié ?

__ Je crois surtout que Nazara passe bien trop de temps avec les apprentis des alats du mur. Et quoi qu'en dise Sala, il ne peut pas espérer mettre de nouveau les pieds chez moi avec l'un de ses soleils...

Je réfléchis avant d'ajouter :

__ Quoiqu'il en soit, que Sisil ait été remercié sans que Malia le sache m'aurait étonnée. Askil les aurait consultées, elle et Kosua.

__ Rayéji s'est révélé être une véritable commère, tu sais ? Lorsque Méka Ciré s'est battue avec un novice la semaine dernière, il ne lui a pas fallut longtemps pour propager la nouvelle dans tout le Foyer.

__ Sala et toi arrivez à le supporter, moi j'en suis incapable. Il a de la chance que Malia se fiche des rapporteurs, confiai-je.

Les éclats de voix de nos camarades nous parvenaient. Linguaire pestait contre Yeleen qui lisait un livre de médecine tout en marchant, et contre moi par la même occasion, pour une raison qui m'échappait. Sala éclatait de rire au moindre son qui franchissait la bouche de Nazara, aux anges. Ces deux là semblaient s'entendre à merveille, et ce depuis le premier jour. Que la verve et le charme goguenard de l'ennuyeux beren ait agit sur mon amie ne m'étonnerait guère. Il n'était pas tout à fait une mocheté, il fallait au moins lui rendre justice.

 
__ Concernant Sisil, ce ne serait pas un bien grand mal s'il était remercié.

__Pourquoi ça ?

__Crois-moi quand je te dis qu'il n'y a pas pire que la Racaille. Tout s'éclaircira sans doute dans la journée. Et je te parie les plumes de ma perruche que ça vas jaser autour du Feu ce soir !

Kalid sourit, amusé. Nous nous retournâmes pour attendre nos amis.

                                                •

La grande enceinte de la Carrière était couverte par d'innombrables mailles de fer soigneusement serrées qui empêchaient l'évasion des créatures de la Volière, et étalait son imposante structure à des lieues à la ronde. À l'extérieur de la haute muraille, s'adossaient les enclos, accoudés les uns aux autres dans un enchevêtrement disparate de tôles, de pierre et de bois. Parmi ce fatras hétéroclite, se distinguaient l'amas noirci des grandes forges d'où parvenaient incessamment les chuintements incessants du métal chauffé dans l'âtre. Y sifflaient constamment foyers et soufflets, au milieu des battements rythmés du marteau sur l'enclume. À l'intérieur de la muraille, le sable jaune de l'arène aveuglait par cette chaude journée ensoleillée. Plusieurs rangées de strapontins, accessibles par des escaliers et des échelles de bois, la surplombaient tel un entonnoir.

Les Légendes De MagadãnOù les histoires vivent. Découvrez maintenant