Derek maintenait Stiles contre lui. Fort. Parce qu'il avait recommencé à se débattre avec sauvagerie, vigueur, luttant contre il ne savait quoi. Il fallait qu'il le tienne, quitte à se prendre des coups de sa part, encore. Et ça faisait mal au cœur car Derek ne voulait pas l'entraver de la sorte, mais il n'avait pas le choix. L'humain se débattait comme un dingue. Il pleurait, aussi. Forcément, l'ancien alpha se retrouvait assez désarçonné et démuni devant un tel état... Qu'il ne comprenait pas. D'autant plus que son odorat mettait en lumière quelque chose qui, à défaut de se révéler dangereux en tant que tel, le préoccupait. En bougeant de la sorte, Stiles avait rouvert quelques-unes de ses blessures. Pour l'instant, ses cuisses semblaient épargnées mais ses bras... Ce n'était qu'une question de temps avant que ses manches ne se retrouvent tachées. Le problème que cela posait ? Tant que Stiles serait dans cet état, il serait impossible pour Derek de lui prodiguer le moindre soin. De même, il ne pouvait pas le lâcher pour attraper son téléphone : malgré sa faiblesse, l'hyperactif était étrangement vif. Comme mû par la force du désespoir. Un désespoir dont il ne connaissait pas l'origine.
Le plus frustrant, c'était d'ailleurs d'entendre son téléphone sonner depuis l'étage inférieur, mais de ne pas pouvoir aller le chercher. De toute manière, il n'aurait pas répondu : non, il aurait tout bonnement appelé Isaac ou Lydia – même Peter aurait pu faire l'affaire –, juste pour avoir de l'aide. Stiles était réellement intenable, impossible à laisser sans entraves. La manière dont il se débattait était trop désespérée, trop violente. Pourtant, Derek essayait de tout son cœur de le rassurer : il lui parlait, doucement, lui répétait qu'il était là, que tout allait bien... Mais Stiles semblait ne pas l'entendre. En fait, il paraissait hermétique à toute parole qu'il pourrait prononcer.
Fut un moment où Derek entendit la porte du loft émettre un fort bruit – on venait de l'ouvrir brusquement. L'ancien alpha pesta contre lui-même : un jour, il faudrait sans doute qu'il songe à la fermer à clé. Quoique cette fois, il fallait avouer qu'une éventuelle visite d'un membre de la meute n'était pas de refus. Extrêmement concentré sur l'hyperactif qui ne cessait de se débattre malgré la faiblesse évidente de son corps, Derek appela à l'aide sans se soucier de l'air que ça lui donnait. Seule la fragrance métallique du sang de Stiles emplissait ses narines. A cet instant, il était incapable d'identifier une autre odeur que celle-ci, qu'importe laquelle pouvait s'inviter sous son nez. Il n'y avait que son sang. Son satané sang. Le pire, c'est que Derek sentait Stiles se fatiguer peu à peu. Il n'avait aucun mal à le tenir et pouvait, pour cela, remercier sa force lupine, mais tout de même. Il aimerait réellement l'aider, faire quelque chose d'utile. Pas juste d'attendre qu'il s'épuise tandis que de son côté, il se battait pour ne pas laisser sa colère revenir au galop. Cette colère incompréhensible qui le chevillait au corps.
Derek entendit du bruit dans les escaliers. Trois cœurs battre à un rythme différent. Mais ne se concentra pas là-dessus. Une partie de lui espéra qu'une entité supérieure l'avait écouté et qu'on allait lui apporter une forme d'aide, quelle qu'elle soit. Parce que Stiles était intenable et Derek se retrouvait pieds et poings liés – au sens propre du terme. Il ne pouvait rien faire, si ce n'est le maintenir contre lui et lui répéter qu'il était en sécurité. Merde, il n'arrivait pas à comprendre ce qui le mettait dans cet état !
Et Stiles non plus.
Le jeune homme savait juste qu'il voulait mourir. S'ouvrir, se déchirer, expirer son dernier souffle. Parce qu'il avait mal. Parce que sa vie lui paraissait trop lourde. Parce qu'il était victime de quelque chose, mais ne savait pas quoi. Parce qu'il avait l'impression qu'on était en train de le détruire, sans se sentir réellement visé.
Mais le fait était qu'il sombrait.
Il ne voulait pas qu'on le touche. Il ressentait le besoin d'hurler un malheur dont il ne connaissait pas le nom, mais sa voix restait bloquée au fond de sa gorge. Les mots ? Il n'arrivait même pas à en former un seul dans son esprit. Tout ne lui venait que sous forme d'images, d'émotions ou de sons. Du reste, il n'arrivait pas à réfléchir.
Toutefois, il entendait un cri. Un cri qui ne cessait de s'allonger. Qu'un épuisement certain entrecoupait parfois d'un souffle court. Et puis il reprenait, inlassablement.
Ce hurlement était doucement en train de le rendre fou.
C'était ça qui le faisait bouger, sans arrêt. Stiles se disait malgré lui que la douleur pourrait l'aider. Que se faire du mal ferait peut-être stopper ce cri. Parce que ledit cri appelait la souffrance. Et cette pensée-là, celle de se saisir de quelque chose de coupant pour arrêter ça, emplissait son esprit. Il avait besoin de se mutiler. Juste pour ne plus entendre ce hurlement qui le brisait graduellement. Un hurlement qui avait un visage, mais que Stiles n'arrivait pas à voir. Il y avait dans son esprit un voile quasiment opaque. Quelque chose qui l'empêchait de distinguer ce fichu visage. Mais au final, était-ce réellement important ? Stiles n'eut d'autre choix que de reléguer ce détail au second plan. Comment pourrait-il se pencher dessus s'il n'arrivait même pas à réfléchir ? Tout ce qu'il savait, c'est qu'il entendait ce hurlement chaque fois qu'une crise lui tombait dessus. Il entrait alors dans cette espèce de transe malsaine et... Impossible pour lui de s'arrêter tant qu'il l'entendait encore. C'était ce qui s'était passé chez lui, dans sa salle de bain.
Et c'est ce qu'il risquait de faire à nouveau si Derek le lâchait. Stiles le savait. Dans un sens, il lui était reconnaissant de l'emprisonner dans l'étreinte de ses bras et en même temps... Il avait besoin que le silence règne dans son esprit. Or, il n'entendait toujours que ce cri. Ce seul et même cri.
- Lâche-moi... Je t'en supplie lâche-moi ! Hurla-t-il, les joues inondées de larmes.
Des mots qui n'étaient pas les siens. Des mots qu'il crachait, que son homologue ne pouvait même pas prononcer. Des mots qu'il poussait pour lui, parce qu'il le savait incapable de le faire. Des mots qui résonnaient en lui d'une manière si forte que Stiles avait l'impression qu'il pouvait et devait faire quelque chose. Mais quoi ? Tout ce qui lui venait, c'était cet appel à la violence. Au sang. Pour se soulager. Pour se nettoyer de toute cette souillure qui faisait sombrer tout son être.
Stiles ne vit pas la porte s'ouvrir. Il ne vit pas l'air exsangue d'Isaac, la figure paniquée de Lydia, l'émotion contenue de Peter, qui soutenait le bouclé pas bien en forme. Mais il sentit la présence d'Isaac. Tourna la tête vers lui. Croisa ses orbes claires emplies d'une inquiétude viscérale. Il eut alors un déclic. De quelle nature ? Il n'en avait aucune idée – réfléchir restait pour lui impossible à l'heure actuelle.
Mais dans son esprit, le voile qui rendait le visage difficile à identifier tomba. Et il le reconnut instantanément.
Le cœur de Stiles rata un battement. Un deuxième. Son souffle se fit court. La détresse le submergea avec une violence telle qu'il cessa complètement de se débattre. Sous l'air complètement déboussolé de Derek, il trembla, trembla, trembla. Sanglota à n'en plus finir.
Murmura un prénom en cherchant maladroitement à se blottir contre Derek, qu'il cherchait à tout prix à fuir quelques secondes auparavant. Parce qu'il recommençait à être lui-même, sans vraiment l'être. Car juste articuler ce prénom diminua drastiquement ses pulsions.
C'était comme s'il se livrait, comme s'il ouvrait son cœur.
Autour de lui, on s'était figé, on ne comprenait pas. Peter avait maladroitement aidé Isaac à s'assoir au bord du lit, Lydia restait à l'entrée de la chambre, paralysée, Derek... Derek continuait de serrer l'hyperactif contre lui, comme si sa soudaine accalmie était trop étrange pour durer. Fausse. Capable de céder sa place à la sauvagerie incompréhensible de Stiles. Mais ce dernier, au lieu de chercher à le repousser, s'accrochait à lui comme si sa vie en dépendait. Pour lui, ça semblait être la seule chose à faire...
... Tout comme répéter en boucle le prénom de Liam. Il le murmurait, le soufflait. Sans s'arrêter. Il avait la voix brisée, le souffle irrégulier, mais il continuait.
Il ne pouvait pas s'arrêter de le prononcer.
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Behind His Mask
FanficStiles sourit. Stiles aime tout le monde. Stiles est la maman de la meute. Stiles est toujours là quand on a besoin de lui. Stiles est l'humain dévoué dont toutes les meutes peuvent rêver. Oui, mais Stiles ne va pas si bien que ça. Non, en fait, son...