Nuit 10

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 Le réveil cria à plein poumons, heureux de ne plus être bridé par un élément extérieur. Jiji eut du mal à l'éteindre. Sa tête cognait, ses yeux lui piquaient, sa respiration se faisait haletante par moment. Et surtout, elle ne lâcha pas Puce un seul instant.

À force de pleurer, elle eut soif et voulut donc rejoindre la salle de bain. Le carillon du grelot claironna juste avant que Jiji ne pose le pied par terre. Il était jonché de débris de verre.

Jiji ne comprit pas pendant un instant avant de constater que les morceaux venaient de sous son lit ? Cela pouvait-il être... les débris du bocal ?

Un mélange de joie et de honte étreignit le cœur de la petite fille. Le bocal lui était rendu, mais en piteux état. Et c'était de sa faute. Il fallait sans doute le jeter à la poubelle. Pourtant, elle n'en eut pas envie. Jiji avait fait une bêtise, elle souhaitait à présent la réparer.

Avec une grande prudence, elle enjamba les débris afin de rejoindre la salle de bain pour y chercher une serviette. Elle ramassa ensuite chacun des morceaux, les déposa dans la serviette puis regagna son lit. Jiji saisit les deux coins de ses couvertures et les rabattit au-dessus d'elle. La plongeant dans le noir.

Le grelot de Puce émit peu à peu une lueur dorée, suffisante pour éclairer Jiji qui entreprit de dérouler la serviette devant elle, révélant les éclats de verre. Avec un tube de colle liquide récupéré au préalable dans un tiroir de la commode, elle tenta de recoller deux morceaux compatibles.

Ce premier succès la mit en confiance. La petite commençait déjà à étaler une couche de colle sur un deuxième débris quand elle s'entailla le doigt, laissant échapper une perle de sang. Puce s'approcha de Jiji pour lui lécher le doigt avec douceur, la plaie cicatrisa aussitôt.

Hochant la tête pour l'initiative de la petite chienne, Jiji poursuivit la tache de réparer le bocal. La colle lui lia souvent les doigts, les entailles se multiplièrent sur sa peau, Puce continua de lui prodiguer des soins, frottant même sa tête contre les mains endolories de Jiji pour lui insuffler du courage.

La petite fille avait mal, autant dans ses muscles que dans sa chair, mais sa volonté resta intacte. Elle se remémora l'instant où elle avait lâché le bocal dans le gouffre pour rester concentrée. Elle n'avait pas le droit d'abandonner. Après un période qui parut interminable, le bocal était prêt. Il était amoindri et jonché de cicatrice mais il tenait. Malgré son appréhension, Jiji emmena le bocal sous le lit et attendit l'ouverture du trou.

Il ne se passa rien.

Cette soudaine fatalité arracha des larmes à Jiji. Elle posa ses mains abimées par terre, les mouilla de ses pleurs tout en suppliant intérieurement qu'on lui rende son étoile, sa lumière.

Le gouffre s'ouvrit soudainement, une petite lune blanche s'en extirpa. Son éclat fut tel que Jiji ne put le regarder. Quand la lumière se dissipa, elle vit le bocal luire, d'une lueur pale et familière. L'étoile flottante !

Jiji pleura de nouveau, mais de joie cette fois-ci. Elle embrassa le bocal, le serra et le caressa sans y aller trop fort pour autant, de crainte de le briser à nouveau. La petite fille replaça le bocal sur sa table de nuit, reprit Puce puis retourna se coucher. Une main caressant sa chienne, une autre effleurant le bocal, Jiji était heureuse.

Avait-elle vu que la poignée de la fenêtre gigotait de nouveau ?

Bonne nuit, à demain.

Bonne nuit JijiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant