Nuit 18

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Lorsque le réveil émit ses premières plaintes, un bruit de porte claquée retentit. Jiji émergea en catastrophe de la salle de bain pour mettre fin à la sonnerie néfaste. Revenant sur ses pas, elle retourna au problème que lui posait le robinet.

Il ne marchait plus, pas une goutte d'eau n'en sortait. Jiji eu beau l'observer attentivement avec son étoile flottante, elle n'était pas sûre de savoir ce qu'elle devait chercher, même Puce n'avait pu lui apporter son aide. Elle s'était levée quelques minutes plus tôt pour aller boire mais seul le néant s'échappait du robinet.

Il ne lui restait que son crayon, mais là encore, elle ne savait pas quoi faire. Elle tenta de dessiner par-dessus le robinet, imaginant de l'eau s'écouler de nouveau. Et effectivement, l'eau arriva dans l'évier mais seulement pour un court instant.

Se demandant d'où pouvait bien venir l'eau du robinet, elle ouvrit le placard situé sous l'évier. Elle y vit une série de tuyaux s'enfouissant dans la terre, impossible de voir au-delà. À moins que le crayon ne puisse l'y aider. S'agenouillant, Jiji traça un immense cercle sur le sol, visualisant une vitre transparente.

Le cercle de verre apparut, dévoilant une profonde crevasse dans la terre, assez grande pour y placer plusieurs maisons, mais vide. Il n'y avait pas d'eau non plus, Jiji voulut descendre pour aller voir mais la crevasse était trop profonde, elle se blesserait si elle sautait.

Dessiner une corde alors ?

Non, elle ne savait jamais combien de temps les créations duraient. Et si la corde disparaissait tandis qu'elle descendait. Avec un frisson, la petite fille se souvint qu'elle possédait déjà une corde, ou plutôt une liane, faite de mouchoirs, dont elle s'était servie pour se débarrasser du livre merveilleux. Il fallait la récupérer.

Jiji reprit l'écharpe dont elle s'était déjà servie pour attacher Puce à sa taille, enveloppa de nouveau son bocal à un sachet plastique qu'elle attacha à sa règle puis alla sous son lit. Pour un voyage qui se voulait rapide. Jiji dessina finalement une corde d'un coup de crayon, elle ne désirait vraiment pas s'attarder dans le gouffre alors elle espéra que la corde tiendrait.

Elle apposa sa main sur le sol froid, le gouffre s'ouvrit alors aussitôt. Déroulant sa corde, Jiji entreprise la descente tout en tenant fermement sa règle dans sa main. Elle remarqua que les champignons incrustés dans le mur ne délivraient plus aucune lumière. Tout semblait plus terne et plus froid qu'avant.

Au bout d'un instant, ses pieds rencontrèrent le sol, Jiji était au fond du gouffre. Levant sa règle, l'étoile flottante éclaira un parterre de terre où elle trouva la liane de mouchoirs recouvrant négligemment le livre.

Avec une angoisse persistante, Jiji détacha la liane et l'enroula autour de son bras. Elle aurait pu attraper la corde et remonter mais la petite fille ne put détacher son regard du livre. Il ne dégageait aucune lumière, aucune musique, il semblait mort.

Poussée par une impulsion soudaine, Jiji prit le livre dans sa main pour le reposer sur le pupitre de bois où elle l'avait trouvé la première fois. Et dans un geste inconscient, elle l'ouvrit en grand. Un rayon de lumière jaillit des pages du livre, inondant l'entièreté du gouffre, les champignons se réveillèrent, l'air se réchauffa, la terre retrouva son éclat brun luisant et le livre chanta.

Mais Jiji n'était pas venu pour l'écouter, elle le trouvait toujours aussi féérique mais avec son étoile, sa chienne et son crayon, le merveilleux l'accompagnait déjà. Après avoir jeté un ultime coup d'œil au livre, la petite fille remonta à la surface. Juste au moment où la corde disparaissait, le gouffre se referma derrière elle.

Après toutes ces émotions, Jiji préféra aller dormir, elle s'occuperait du robinet la nuit prochaine. Elle rangea donc la liane dans le tiroir de sa table de nuit, et au lieu de placer le bocal près de son réveil, le mit dans son lit avec Puce.

Elle rabattit ensuite la couverture sur sa tête et se laissa bercer par l'éclat rassurant de l'étoile flottante. Jiji s'endormit dans la minute qui suivit. Les lueurs produites par le grelot de Puce et le crayon autour du cou de Jiji vinrent ensuite s'ajouter à celle de l'étoile flottante.

Bonne nuit, à demain.

Bonne nuit JijiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant