Nuit 16

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Enfin, après plusieurs nuits d'interruption, le réveil put crier tout son soûl. Il s'en donna à cœur joie, augmentant l'intensité de ses tintements à chaque minute. Apparemment, la petite fille roulée en boule dans son lit n'avait aucune intention de bouger. Elle ne voulait rien faire ce soir, pas même éteindre son réveil et donc le faire taire.

Un clic parvint aux oreilles de Jiji, suivit d'un silence. Intriguée, elle sortit la tête du lit et poussa une exclamation de surprise. L'enfant de l'armoire se tenait devant elle, le visage trempé de larmes, un gobelet en plastique dans les mains, brisé.

Jiji se leva et posa sa main sur la joue de l'autre petite fille qui continuait de pleurer. Son étoile avait disparu, le gobelet était vide. L'enfant avait dû traverser l'armoire sans lumière, voilà pourquoi elle était si bouleversée. Elle tendit le gobelet à Jiji qui l'observa. Rien à faire, il était plié et fissuré de partout, rien ne pouvait le réparer et Jiji ne possédait plus de gobelet.

Mais elle pouvait en revanche en créer un autre.

Elle porta la main à son cou puis se ravisa aussitôt. Non, il n'y était plus. Il était brisé lui aussi, détruit par la colère de Jiji. La tête basse, elle chercha dans sa chambre les morceaux de son crayon. L'un d'eux se trouvait sous la commode et l'autre sous les rideaux. Jiji ramena les morceaux auprès de l'enfant pour lui montrer son impuissance. À son tour, les larmes envahirent ses yeux.

Les deux petites filles furent alors alertées par le carillon du grelot. Puce se tenait près du bocal de l'étoile flottante, la truffe collée sur la surface. Jiji et l'enfant de l'armoire s'approchèrent et, comprenant le conseil de sa chienne, la petite fille introduisit les morceaux du crayon dans le bocal.

Un éclair d'argent en émergea, brillant si fort que toute la chambre en fut inondée. Au bout de quelques instants, la lumière s'amoindrit, révélant au fond du bocal le crayon en parfait état, de teinte tout aussi argentée que la chaine attachée à l'une de ses extrémités.

Souriant jusqu'aux oreilles, Jiji se saisit du crayon et entreprise de dessiner sur le mur un nouveau gobelet. Celui-ci se détacha du mur et atterrit aux pieds de l'enfant de l'armoire, qui exulta en le prenant dans ses mains. Sa joie fut de courte durée, le gobelet disparut aussitôt.

C'est vrai, toutes les créations du crayon étaient éphémères.

L'enfant se remit à pleurer. Jiji s'avança vaincu et la prit dans ses bras pour la réconforter. Soudain, elle eut une idée. Elle reprit le gobelet amené par l'enfant et essaya de dessiner par-dessus le plastique. Elle imagina en même temps une surface solide, résistante mais transparente, destinée à durer. Il en résultat un gobelet fait de verre, aux formes plus arrondies, ressemblant au bocal. L'enfant de l'armoire le prit avec précaution cette fois-ci.

Son village s'illumina après un temps un temps d'attente. Le gobelet était réparé et même encore mieux qu'avant. L'enfant enlaça Jiji en signe de reconnaissance puis repartit dans son armoire, à la recherche de son étoile.

Au même moment, d'un mouvement lent, Jiji passa la chaine d'argent autour de son cou. Le crayon retrouva sa place. Avec un sourire timide, Jiji retourna se coucher avec Puce, tenant le crayon entre ses doigts, même quand elle s'endormit.

Alors le carillon du grelot chanta.

Bonne nuit, à demain.

Bonne nuit JijiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant