Nuit 19

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Une fois de plus, le réveil crut qu'il allait pouvoir imposer sa voix sans retenue. Sa déception fut forte quand après un tintement, la main de Jiji l'interrompit. La fougue était revenue.

Ce soir, Jiji repartait en expédition, elle prit donc son temps pour se préparer. Tout d'abord, elle enfila sa robe de chambre pour ne pas prendre froid. Dans le même esprit, elle chaussa ses pieds de chaussons, puis glissa Puce dans une de ses poches. La chienne serait ainsi mieux installée. Elle reprit sa règle et son sac en plastique pour recréer la lanterne avec son bocal et enfin repositionna son crayon autour de son cou.

Ainsi apprêtée, la petite fille se sentit prête. Elle attrapa la liane qu'elle avait récupéré la nuit précédente avant de se diriger vers la salle de bain. Une fois installée par terre, elle leva son crayon et traça un large cercle sur le carrelage. Cette fois-ci, elle n'attendait pas une vitre de verre mais bel et bien une ouverture dans le sol.

À la fin de son tracé, la zone encerclée disparut, dévoilant la profonde crevasse que Jiji avait vu auparavant. La petite fille défit la liane devant elle, attachant l'une des extrémités à la base des toilettes et lâchant l'autre dans le vide. Prenant une profonde inspiration, Jiji s'accrocha à la liane et se laissa glisser dans le vide.

Il n'y faisait pas complétement noir, il y avait un peu de lumière. Ce qui permit à Jiji de voir à quel point le fond était loin. Elle descendit encore pendant une large distance avant d'enfin se stopper. Jiji aurait été au fond d'un puit, l'ambiance y aurait été similaire, froid et humide. Jiji marcha devant elle en levant son étoile flottante devant elle, ne sachant pas vraiment ce qu'elle devait trouver. Ce n'est que lorsqu'elle arriva en vue de la paroi qu'elle eut sa réponse.

Une montagne de pierre se dressait devant elle. Des pierres empilées de façon désordonnées, suintant de l'eau à plusieurs endroits et bloquant une sorte de boyau dans la roche. Ces pierres empêchaient le passage de l'eau. Il fallait les dégager pour que Jiji puisse utiliser de nouveau son robinet. Mais comment dégager les pierres ? En usant de la même méthode qu'avec le carrelage de la salle de bain ? Creuser un large trou ? Pourquoi pas.

Avec son crayon, Jiji commença à dessiner la base de son cercle à son niveau. Quand il fallut monter, Jiji griffonna rapidement une échelle sur la paroi afin de continuer son ascension et son dessin. Elle se servit de cette échelle pour dessiner chaque partie du cercle se trouvant au-dessus des pierres.

Après de longs efforts, le tracé du cercle se conclue. Jiji vit avec un grand sourire le boyau s'élargir autour des pierres et l'eau commencer à jaillir. Ce fut-là qu'elle comprit son erreur. Elle venait d'ouvrir une grande cavité d'eau qui allait émerger brusquement, juste devant elle.

Prenant ses jambes à son cou, Jiji dessina à la hâte dans les airs une planche de bois et eut tout juste le temps de s'y agripper avant qu'un premier jet d'eau n'explose. En un clin d'œil, la caverne se retrouva immergée. Jiji dut se tenir fortement à sa planche pour ne pas tomber dans l'eau, s'assurant en même temps de ne pas lâcher la règle à laquelle était attaché le bocal.

Le niveau montant, Jiji s'éloignait de la liane la liant à la surface. S'agrippant fortement avec une de ses mains, elle employa l'autre pour tenter de dessiner un courant dans l'eau pour se rapprocher. Le tracé était maladroit mais il suffit à propulser Jiji au centre de la caverne. Malgré les secousses de la planche, Jiji parvint à attraper la liane fermement. Le cœur battant, la petite fille remonta à la surface aussi vite qu'elle le put avant que l'eau ne l'engloutisse.

Après une ascension aidée de quelques coups de crayon, Jiji parvint à retourner dans la salle de bain. Elle prit quelques minutes pour retrouver son souffle. Cette fois-ci, ce n'était pas passé loin. Se débarrassant de tout son attirail, Jiji se releva afin d'aller tester son robinet. Après un court instant d'inaction, de l'eau s'en écoula. Jiji sauta sur place, folle de joie. Elle récupéra Puce dans sa poche et dansa avec sa chienne dans la salle de bain.

Dans son engouement, elle n'avait pas vu que l'ouverture de la caverne s'était refermée. Sur cette mission accomplie, Jiji rangea toutes ses affaires et se servit un grand verre d'eau avant d'aller se coucher. Ce qu'elle ne vit pas aussi, c'est que le grelot de Puce avait également disparut.

Bonne nuit, à demain.

Bonne nuit JijiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant