Nuit 23

2 0 0
                                    

Cette nuit-là, personne ne vint éteindre le réveil. Lorsqu'à minuit, il débuta sa complainte, Jiji n'était pas dans son lit. Elle se trouvait devant la fenêtre, les rideaux tirés, le bocal dans sa main et Puce debout à ses côtés. Ouvrant la fenêtre, Jiji vit ses cheveux virevolter par l'air nocturne. Aucune sensation de froid ne l'atteignit pourtant. Enveloppée dans sa robe de chambre et chaussée de ses chansons, elle ne risquait rien.

Prenant Puce avec elle, la petite fille monta sur le rebord de la fenêtre. Jiji ne regarda pas en bas mais droit devant elle. Levant son crayon, elle dessina deux traits partant de la fenêtre et continuant devant elle. En un instant, un chemin de lumière argenté apparut devant elle, semblant continuer jusqu'à la ligne d'horizon.

Retenant son souffle, Jiji quitta le rebord de la fenêtre de sa chambre et posa les pieds sur le chemin. Il était parfaitement solide et brillait d'une lumière douce et chaleureuse. Alors Jiji déposa Puce près d'elle, la petite chienne exécuta une série de cabrioles tout en remuant la queue, sous le regard attendri de Jiji qui brandit devant elle son bocal.

Ensemble, elles avancèrent sur le chemin, admirant le paysage se dévoilant devant elles. Il était moins reluisant que tous ce que Jiji avait rencontré jusqu'à présent et pourtant, en le voyant apparaitre devant elle, illuminé conjointement par le chemin, l'étoile flottante ainsi que par le croissant de lune lui souriant dans le ciel nocturne, Jiji en eut les larmes aux yeux. Des larmes de bonheur.

Rien ne gâcha la félicité de ce moment. Elle trouva la vue belle alors que certaines allées étaient laides. Elle avait chaud alors que des flaques d'eaux croupies jonchaient le sol à proximité de personnes enveloppées dans des couvertures sales. Pour elle, l'air était un mélange d'eau, de sel, de feuille et de pierre et non d'égout, d'immondices et autres choses en attente de disparaitre.

Tout cela, Jiji le vit et le ressentit mais pas avec les mêmes yeux ni le même esprit que ceux déambulant devant elle en grommelant des plaintes. Cette sortie fit le plus grand bien à Jiji. Riant de plaisir, elle fit la course avec Puce pour retourner dans la chambre. Arrivée devant la fenêtre, néanmoins, Jiji ne put se résoudre à y retourner. Pas déjà.

Reprenant son crayon, elle dessina un escalier en colimaçon qu'elle gravit à mesure qu'il apparaissait devant elle, Puce sur ses talons. Jiji ne s'arrêta que lorsqu'elle vit le toit où elle ajouta une passerelle à son escalier.

Une fois traversée, Jiji se cala contre la toiture d'une fenêtre sortant du toit. Elle ouvrit sa robe de chambre pour que Puce vienne s'y réchauffer puis posa le bocal de l'étoile flottante sur ses genoux. Après quoi, Jiji se laissa glisser dans le sommeil.

Bonne nuit, à demain.

Bonne nuit JijiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant