Chapitre 4

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Le reste de la soirée avait été plus ou moins étrange. Coline n'avait eu de cesse de se sentir observée, son instinct de protection lui dictait de fuir la queue entre les pattes. La présence de chasseurs en ville était de toute évidence un très mauvais présage. D'ici à quelques jours, on annoncerait les morts des individus qu'ils auraient attrapés et éliminés. Ce serait un dur mois de peur et de deuil.

Sentant que sa meilleure amie n'était pas à son aise, Alya avait décidé d'annuler la sortie cinéma. Tant que les chasseurs seraient dans le coin, il leur faudrait être prudentes. Elle avait raccompagné son amie métamorphe jusque chez elle avant de prendre le chemin de sa propre maison.

Le lendemain, elle prit aussitôt des nouvelles de Coline, soucieuse que des chasseurs l'aient débusquée. La féline la rassura en lui racontant que toute la famille était en sécurité. Alya en était soulagée. Elle avait souvent été invitée à dîner chez la troupe de métamorphes, si bien qu'elle les considérait maintenant comme sa deuxième famille. Ils étaient tous si adorables avec elle, surtout le dernier enfant qu'ils avaient recueilli, Sasha.

La famille de Coline était en réalité un refuge pour métamorphes. Ils recueillaient les pauvres orphelins, les protégeaient et les élevaient jusqu'à ce qu'ils puissent voler de leurs propres ailes - enfin pour ceux qui en avaient. Alya trouvait cela formidable.

C'était un dimanche et tout était fermé. Alya n'osait pas proposer à son amie de sortir, à cause des chasseurs qui rôdaient peut-être encore dans le coin. Elle passa donc sa journée à réviser et à regarder des films à la télé, accompagnée de sa mère qui prenait un malin plaisir à s'étaler sur le canapé.

Le lundi arriva, obligeant Alya à aller en cours. Elle étudiait au lycée Gustave Flaubert afin d'obtenir son diplôme de comptabilité et de gestion. Elle avait toujours aimé les mathématiques, et il était évident pour elle de poursuivre dans cette voix après avoir obtenu son baccalauréat. Et elle s'en sortait remarquablement bien. Elle figurait même parmi les meilleurs élèves de sa classe.

En parlant de la classe, elle n'y comptait pas beaucoup d'amis. Un seul, en fait. Simon passait son temps le nez plongé dans les bouquins, mais il s'avérait d'une compagnie agréable lorsqu'elle réussissait à attirer son attention.

Son camarade était justement en train de relire ses leçons lorsqu'elle entra dans la salle de mathématiques appliqués.

—Par pitié, ne me dis pas qu'il y a un contrôle, j'ai oublié ma calculatrice ! protesta Alya en s'asseyant à côté de lui.

Simon reposa ses fiches de révision pour lui répondre.

—Pas du tout, je voulais simplement m'avancer pour celui de la semaine prochaine.

Elle soupira de soulagement.

Le professeur entra dans la salle de classe peu de temps après. Tous les volets étaient baissés, ne laissant filtrer aucune lumière au profit du projecteur qu'elle n'avait jamais vu au repos depuis le début de l'année. M. Maverick - le professeur de mathématiques appliquées - était accro à cette technologie et projetait l'ensemble de ses cours par ce biais.

Ce n'était pas très pratique pour écrire, mais à force, on finissait par s'y habituer.

Le cours était bien entamé, lorsque la porte s'ouvrit en trombe. L'ensemble des élèves sursautèrent, tous surpris par cette intrusion inattendue. Alya vit le directeur du lycée entrer dans la salle. Il était accompagné par trois hommes vêtus de cuir qu'elle reconnut sans le moindre effort.

Raphaël et ses deux amis avaient apparemment décidé de rester ici pour quelques jours. 

Tout ça n'augurait rien de bon.

Les élèves de sa classe étaient tous impressionnés de voir débarquer des chasseurs, en chair et en os. Il était rare d'en voir arriver dans une salle de classe, surtout de jour. Et de près, ils étaient vraiment impressionnants.

Mais si toute la classe était en admiration devant ces trois colosses, il y en avait un qui n'en menait pas large. M. Maverick était plus pâle que d'ordinaire. Ses mains étaient fermement accrochées au rebord de son bureau, et il jetait des coups d'œils furtifs aux fenêtres fermés.

Alya eut un mauvais pressentiment qui se confirma lorsqu'un chasseur barbu s'avança pour proclamer :

—Lohan Maverick, vous êtes en état d'arrestation.

On entendit des hoquets de stupeur s'élever dans la classe tandis que les chasseurs clamaient haut et fort ce que leur professeur avait tenté de cacher tout ce temps : il était un vampire.

—Suivez-nous, ordonna le barbu.

Mais au lieu d'obéir, M. Maverick contourna son bureau à toute vitesse et fonça vers les fenêtres closes. Avant qu'il ne puisse en atteindre une, un objet brillant fut projeté dans les airs et se planta dans le dos du professeur.

Le vampire s'écroula sur une table, éclaboussant de sang deux garçons qui y étaient installés. Les chasseurs se précipitèrent vers lui, tenant dans leurs mains ce qui s'apparentait à un instrument de torture fait d'argent.

—Pitié, pas devant mes élèves, souffla le professeur.

Les chasseurs firent la sourde oreille et placèrent la cage métallique sur sa bouche. Alya comprit avec horreur que c'était une sorte de muselière.

Une muselière pour vampire.

Les chasseurs commencèrent à le tirer hors de la classe. M. Maverick paressait horriblement souffrir lorsqu'il passa près d'Alya. Celle-ci, sortant de sa torpeur, décida qu'elle ne pouvait pas rester sans réagir. Elle connaissait les chasseurs et leurs méthodes. Ils n'allaient pas l'enfermer dans une prison.

Ils allaient le tuer.

À côté d'elle, Simon restait sous le choc. Elle l'enjamba précipitamment et se jeta sur le seul qui pouvait lui venir en aide : Raphaël.

Les Précurseurs de l'HarmonieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant