Chapitre 14

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Ce fut le signal qu'attendait le pyromane pour passer à l'action. Il quitta précipitamment la pièce, fonçant dans le tas.

—Des chasseurs !? Par Satan, tonton, on fait quoi ?! fit Simon.

Le camarade de classe d'Alya était terrorisé. Et c'était une peur tout à fait justifiée. Les chasseurs étaient des experts dans l'extermination des créatures, quels qu'ils soient. Simon n'était qu'un jeune sorcier, il ne ferait jamais le poids contre un tel soldat.

—Simon, regarde-moi, lui ordonna son oncle. Je vais ouvrir un portail. Il ne sera sans doute pas assez puissant pour t'emmener très loin mais ce sera toujours ça de gagner. Je veux que tu passes dedans et que tu trouves un lieu sûr. Tu m'as compris ?

Simon hocha difficilement la tête.

—Mais... et toi ? osa t-il demandé.

—Trevor et Valentina ont besoin de moi pour lutter contre les chasseurs. Mais toi, il faut que tu partes !

Simon était réticent à l'idée de quitter son oncle, mais quel autre choix avait-il ? C'était fuir ou mourir.

Alya eut le cœur déchiré en assistant aux adieux de la petite famille. Elle savait ce qui allait se produire. Le sorcier allait se mesurer aux chasseurs et il allait périr. Tel était le sort réservé aux créatures surnaturelles qui croisaient la route des exécuteurs.

Le sorcier se tourna vers la jeune femme.

—Le portail sera assez grand pour deux.

Alya déclina l'offre. Malgré l'urgence de la situation, son cerveau continuait de fonctionner - à son grand étonnement - et elle savait que passer ce portail n'était pas nécessaire.

—Je suis une humaine, ils ne me feront pas de mal.

D'autant plus qu'elle connaissait les seuls chasseurs qui étaient en ville. Non, elle ne risquait rien en restant ici. Peut-être même étaient-ils là pour elle. Si tel était le cas, ce serait bête de fuir.

Le sorcier acquiesça, puis se tourna vers un mur du salon. Il ferma les yeux et commença à psalmodier en latin. Il fallut attendre quelques secondes avant qu'un ovale lumineux apparaisse au milieu du salon. Alya se sentit faiblement attirée vers le portail, comme si celui-ci voulait l'aspirer.

Simon hésitait à y entrer, fixant son oncle qui ne pouvait le voir en retour.

—Il faut y aller, le pressa Alya.

Elle était un peu déconcertée par la situation, mais elle tenait à son camarade de classe et elle ne souhaitait aucunement mettre sa vie en danger. Les chasseurs approchaient à grand pas, Trevor - le géant enflammé - semblait avoir du mal à les retenir.

Simon lui lança un regard si torturé qu'il lui fit mal au cœur.

—Alors c'est ainsi que l'on doit vivre notre vie ? La passer à fuir en abandonnant ceux qu'on aime ?

Il secoua la tête. Ses yeux brillaient par la détermination.

—Je refuse d'être lâche. Je vais me battre !

Simon fit un pas vers la porte du salon quand une force invisible le poussa et le jeta dans le portail. Son corps disparut dans une gerbe d'étincelles multicolores. Le sorcier revint à lui et le portail disparut.

—Vous l'avez forcé à partir ! s'indigna la jeune femme qui assistait impuissante à toute la scène.

—J'ai promis à ses parents de prendre soin de lui.

Le sorcier s'approcha d'elle et doucement la prit par les épaules.

—Est-ce que tu pourras veiller sur lui à ma place ?

Alya sentit son cœur se serrer dans sa poitrine. Elle ne connaissait pas cet homme et voilà qu'il lui demandait - non, la suppliait - de prendre soin de son neveu. C'était une grande responsabilité qu'elle refusait. Non, il était hors-de-question qu'elle prenne soin de Simon quand son propre oncle pouvait le faire. Il allait se battre, survivre et le faire lui-même !

C'était ce qu'Alya aurait voulu lui dire. Mais elle n'en eut pas le temps.

Elle entendit comme un sifflement dans l'air. Puis le corps du sorcier tressaillit. Le visage de la jeune femme fut éclaboussée de gouttelettes chaudes qui la remplirent d'effroi. Alya loucha sur la pointe de la flèche qui dépassait de la trachée du sorcier.

—Attrape-le ! ordonna une voix grave qu'elle ne reconnut pas tout de suite.

Alya regarda le corps du sorcier être tiré vers l'arrière, impuissante. Les larmes lui brûlaient les yeux. Elle était en train d'assister à un meurtre, une exécution cruelle. Et elle ne pouvait rien faire.

Le chasseur entraina le sorcier agonisant en dehors de la pièce, comme s'il n'osait pas finir le travail devant ses yeux innocents. C'est à ce moment-là qu'une nouvelle silhouette entra dans son champ de vision.

Le nouveau venu pénétra dans le salon dans un cliquètement de métal. Il était si imposant qu'il semblait occuper tout l'espace du petit salon. Du sang encore frais barbouillait le bas de son visage. Et une lueur meurtrière flamboyait dans ses yeux.

Raphaël s'avança à grand pas vers Alya. Terrifiée par une image du chasseur qu'elle ne lui avait jamais connu, la jeune femme recula d'un pas. Celui-ci hésita un instant, analysant son visage. Puis il l'attrapa et l'attira à lui.

Raphaël la serrait fort entre ses bras, l'écrasant contre son torse. Il lui caressa les cheveux d'une main, presque tendrement. Alya était tellement choquée des évènements qu'elle ne s'offusqua pas de sentir ses lèvres lui embrasser le front.

—Tu es en sécurité maintenant. Tout va bien se passer, je te le promets, essayait-il de la rassurer.

Mais tout allait mal. L'oncle de son ami avait été tué sous ses yeux et son meurtrier la serrait présentement contre lui.

Alya n'avait pas la force de se dégager. Elle était fatiguée et encore sous le choc.

—J'ai trouvé une vampire dans l'autre pièce. On l'emmène ? demanda un chasseur près de l'entrée.

Raphaël releva la tête en direction de son collègue.

—Assure-toi qu'elle ne brûle pas à la lumière du soleil, lui répondit-il. Ce serait dommage que cette garce ne parte en cendre avant qu'on ait pu la faire parler.

Alya sentit l'étreinte se relâcher. Raphaël lui prit le visage entre ses mains pour le lui relever. Elle affronta son regard qui s'était considérablement radouci.

—Je te ramène chez toi. Est-ce que tu peux marcher ?

Elle acquiesça faiblement. Ils sortirent ensemble du salon. Le chasseur avait passé un bras autour de sa taille, sans doute pour la soutenir au cas où ses jambes faibliraient.

Ils montèrent doucement les marches une par une et arrivèrent dans un corridor. Du sang avait éclaboussé les murs taupe, rendant les lieux macabres. Et lorsqu'Alya jeta un œil au sol, elle y aperçut le corps inanimé de Trevor.

La jeune femme ferma les yeux tandis qu'ils passaient près de lui. Les chasseurs les avaient tous eu. Non, pas tous. Il restait Simon. Avec un peu de chance, personne ne l'avait remarqué sortir du portail et il était déjà loin maintenant.

Ils étaient presque arrivés à la sortie lorsque quelque chose saisit la cheville de la jeune femme. Alya sursauta violemment tout en poussant un cri de terreur. À ses pieds, Trevor avait relevé le bras afin d'agripper sa jambe.

—On compte sur toi, a-t-il soufflé.

Quelque chose s'est mis à briller autour de son cou, un pendentif, crut-elle voir. Elle n'eut pas le temps de bien voir car une sensation de brûlure lui parcourut le corps, comme si une coulée de lave traversait ses veines.

Alya chancela sur ses jambes, étourdie par la sensation étrange et douloureuse qu'elle ressentait. Elle entendit un coup de feu et la tête de Trevor explosa, éclaboussant ses chaussures de molaires et de bouts de cervelles.

C'en fut trop pour la jeune femme qui se pencha en avant pour compléter le tableau avec le contenu de son estomac.

Les Précurseurs de l'HarmonieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant